Au moins deux personnes sont mortes vendredi matin lors d’une prise d’otages menée par un homme se réclamant du groupe jihadiste Etat islamique dans un supermarché de Trèbes (Aude), près de Carcassonne.
Un Marocain suivi pour radicalisation est soupçonné d’être le preneur d’otages, selon une source proche de l’enquête. Le Premier ministre, Edouard Philippe, qui a qualifié la situation de « sérieuse », a estimé que tout laissait « penser qu’il s’agirait d’un acte terroriste », alors que la France est sous forte menace jihadiste depuis 2015.
Selon le maire de Trèbes, deux personnes sont mortes dans cette prise d’otages, survenue quelques minutes après qu’un CRS a été blessé par balle à Carcassonne, à moins de dix kilomètres de là. A Trèbes, « une grande partie des employés et des clients du Super U ont réussi à prendre la fuite. Un officier de gendarmerie en service est actuellement au contact du preneur d’otages », a ajouté la même source, qui n’était pas en mesure de dire combien de personnes se trouvaient encore dans le supermarché à la mi-journée.
Selon les premiers éléments de l’enquête, un homme « a pénétré vers 11h15 dans ce supermarché Super U et des coups de feu ont été entendus », a précisé une source. D’après le parquet de Carcassonne, le preneur d’otages se revendique de l’EI. La section antiterroriste du parquet de Paris a été saisie et le ministre de l’Intérieur Gérard Collomb se rend sur place.
Réfugié pendant une heure dans un frigo
Un témoin a déclaré que l’auteur des coups de feu, qui serait armé de couteaux, d’une arme de poing et de grenades, avait crié « Allah Akbar » en rentrant dans le supermarché, a-t-on indiqué de source proche du dossier. « Un homme a crié et a tiré des coups de feu à plusieurs reprises », a raconté une cliente du supermarché sur Franceinfo. « J’ai vu une porte de frigo, j’ai demandé aux gens de venir se mettre à l’abri. Nous étions dix et nous sommes restés une heure. Il y a eu encore des coups de feu et on est sorti par la porte de secours derrière ».
Tous les accès à la commune de Trèbes étaient bloqués dès la sortie de l’autoroute, où étaient postés des membres des forces de l’ordre fortement armés. Un hélicoptère de la gendarmerie survolait le secteur.
Un CRS blessé par balle à Carcassonne
Quelques minutes avant que ne survienne cette prise d’otages, un CRS rentrant d’un footing avec plusieurs collègues a été légèrement blessé par balle à l’épaule à Carcassonne par un homme armé qui a pris la fuite, selon des sources proches du dossier. Le Premier ministre a indiqué que le pronostic vital du CRS n' »était pas engagé ». La voiture de l’homme qui a tiré sur des CRS a été retrouvée sur le parking du supermarché de Trèbes.
La préfecture de l’Aude a annoncé sur Twitter que le secteur de Trèbes « était interdit » et a demandé à la population de « faciliter l’accès aux forces de l’ordre ». Selon le rectorat de Montpellier, les quatre écoles et collèges de Trèbes ont été confinés. L’antenne du GIGN de Toulouse est arrivée sur place, soutenue par les policiers d’élite du Raid et de la BRI. Pour la Sécurité civile, 80 pompiers et membres d’équipes médicales étaient sur les lieux, avec deux hélicoptères, selon l’Intérieur.
Ces attaques interviennent alors que la France vit sous une constante menace terroriste depuis la vague d’attentats jihadistes sans précédent, parfois de masse, qui ont fait 241 morts depuis 2015. La France est particulièrement visée car elle fait partie de la coalition militaire internationale intervenant en Syrie et Irak contre l’EI, qui perd peu à peu tous ses bastions.
Prise d’otages : une stratégie des jihadistes
La prise d’otages est aussi une stratégie utilisée par les jihadistes: le 9 janvier 2015, deux jours après la tuerie de Charlie Hebdo, Amédy Coulibaly avait retenu les clients et le personnel de l’Hyper Cacher de la Porte de Vincennes. La prise d’otages avait fait quatre morts. Amédy Coulibaly avait été abattu par les forces de l’ordre.
La dernière attaque meurtrière en France date du 1er octobre 2017 lorsque sur le parvis de la gare Saint-Charles à Marseille, un Tunisien de 29 ans avait tué au couteau deux cousines, avant d’être abattu par la police. L’EI a revendiqué ces assassinats, mais les enquêteurs français n’ont pas, pour l’heure, trouvé d’élément reliant l’assaillant à l’organisation jihadiste.
Les précédentes attaques ont souvent ciblé les forces de l’ordre. Le 15 septembre au matin, un homme de 39 ans armé d’un couteau a agressé un militaire de l’opération Sentinelle à la station de métro Châtelet à Paris, sans faire de blessé. Il s’agissait alors de la septième agression contre des militaires de cette force mise en place dans le cadre du plan Vigipirate après les attentats de janvier 2015.
Le 9 août, un homme de 36 ans, Hamou B., a renversé à bord de son véhicule six soldats de Sentinelle à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine). Blessé de cinq balles lors de son arrestation dans le Pas-de-Calais quelques heures plus tard, cet homme était jusqu’alors inconnu des services de renseignements. D’autres attaques ont visé ces derniers mois des militaires, sans les tuer, au musée du Louvre et à l’aéroport d’Orly.
Le Quotidien/AFP