Le président français Emmanuel Macron a promis mardi « un combat sans relâche » contre « le terrorisme islamiste », en rendant hommage aux quatre fonctionnaires de la préfecture de police de Paris tués par un collègue radicalisé jeudi dernier.
Le chef de l’État, accompagné notamment du Premier ministre Édouard Philippe, s’est exprimé en fin de matinée devant les cercueils alignés dans la cour de la préfecture où l’auteur de l’attentat, Mickaël Harpon, un informaticien, a été abattu après avoir poignardé ses collègues. Ils « sont tombés sous les coups d’un islam dévoyé et porteur de mort qu’il nous revient d’éradiquer », a-t-il lancé, en appelant « la nation toute entière » à « se mobiliser » face à « l’hydre islamiste », à « faire bloc » en bâtissant « une société de vigilance ».
Selon le quotidien Le Parisien, les services antiterroristes ont mis la main sur une clé USB contenant des vidéos de propagande du groupe jihadiste État islamique et des coordonnées de collègues. Cette clé a été retrouvée dans son bureau, selon une source proche du dossier. Les enquêteurs cherchent d’éventuels complices dans les milieux radicaux et à éclaircir la nature des informations auxquelles l’assaillant a pu avoir accès à la préfecture de police, où il travaillait depuis 2003, « là-même où l’État traque terroristes et criminels », a souligné Emmanuel Macron.
Les forces de l’ordre figurent parmi les objectifs récurrents des organisations jihadistes, alors que les attentats islamistes ont fait, avec cette dernière attaque, 255 morts en France depuis 2015. Les victimes de la préfecture, trois hommes et une femme, ont été décorés de la Légion d’honneur mardi, à titre posthume, par le ministre de l’Intérieur Christophe Castaner, devant quelques centaines de personnes rassemblées sous la pluie.
Des signaux d’alerte dès 2015
Christophe Castaner a été très critiqué après cette attaque sans précédent et doit répondre à plusieurs convocations au parlement. Il a déjà été auditionné à huis clos juste avant la cérémonie, par la délégation parlementaire au renseignement, sur d’éventuels « dysfonctionnements ». Il devait enchaîner dans l’après-midi avec la commission des lois de l’Assemblée nationale, et sera également interrogé jeudi par la commission des lois du Sénat.
Depuis l’attaque, beaucoup cherchent à comprendre comment Mickaël Harpon a pu passer sous les radars de détection. Selon le ministère, il avait donné des signes de possible radicalisation au sein de la direction du renseignement de la Préfecture de police (DRPP) qui l’employait. Selon un rapport interne de la DRPP, Mickaël Harpon, qui était habilité secret défense, aurait déclaré à deux collègues « C’est bien fait » après l’attentat jihadiste en janvier 2015 contre l’hebdomadaire Charlie Hebdo (12 morts), mais ces derniers n’ont pas transmis de signalement écrit à leur hiérarchie. « Les signaux d’alerte auraient dû être suffisants pour déclencher une enquête en profondeur », a accusé Christophe Castaner.
L’assaillant était converti à l’islam depuis une dizaine d’années et fréquentait des membres de la mouvance « islamiste salafiste », selon les enquêteurs, qui s’interrogent également sur ses éventuels problèmes psychologiques. Deux enquêtes administratives confiées à l’Inspection générale du renseignement ont été ouvertes par le Premier ministre. Sans attendre les conclusions, Christophe Castaner a tenté d’éteindre la polémique en demandant que toute alerte liée à la radicalisation fasse désormais « l’objet d’un signalement automatique », sans plus de précisions.
Dans le cadre de l’enquête menée par les services antiterroristes, l’épouse de Mickaël Harpon, arrêtée au domicile du couple à Gonesse, en région parisienne, a été relâchée dimanche soir après trois jours de garde à vue.
LQ/AFP
Aurélia, Damien, Anthony et Brice
Aurélia, Damien, Anthony et Brice ont passé « leur vie à protéger les autres » avant d’être victimes du « terrorisme islamiste », selon Emmanuel Macron. Voici le portrait de ces quatre fonctionnaires poignardés à mort par leur collègue jeudi.
Gardienne de la paix, Aurélia Trifiro était entrée dans la police il y a dix-sept ans et était rattachée à la Direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne. Mère de deux jeunes fils, elle résidait à Combs-la-Ville, en Seine-et-Marne, où la ville a ouvert un registre de condoléances en sa mémoire. Sur le compte Facebook de la commune, des anonymes décrivent une femme « forte », « gentille » et une « jolie famille ».
Entré dans la police il y a vingt-huit ans, Damien Ernest avait accédé au grade de major et était responsable d’une unité au sein de la Direction du renseignement de la préfecture, le service où était employé son assassin. Il avait deux filles et « nourrissait des projets de mariage » avec sa compagne après des années de vie commune, a indiqué le président de la République en lui rendant hommage. « C’était un collègue extraordinaire, jamais un mot plus haut que l’autre, bon vivant, très bosseur », a témoigné mardi l’un de ses plus proches collègues.
Gardien de la paix, Anthony Lancelot cumulait onze ans de services dans la police et travaillait également à la DRPP, le service chargé de détecter la radicalisation notamment islamiste. « C’était un bon garçon, dynamique, avec une bonne bouille. Je m’en souviendrai toujours. Ça fait mal. Surtout à l’intérieur de la maison », a indiqué un de ses anciens chefs. Il était père de deux jeunes fils.
Brice Le Mescam était entré dans la police il y a six ans et était lui aussi employé à la DRPP, en qualité d’adjoint administratif. « Il était drôle, moqueur, provocateur, intelligent », a réagi sur Twitter une de ses connaissances. Lors de son hommage mardi, le président de la République a adressé ses condoléances au « compagnon » de cet homme qui avait songé à se lancer dans une carrière de comédien avant d’entrer dans la police, selon le Parisien.