Fin des régimes spéciaux de retraite, « grande loi de moralisation de la vie publique » contre le « népotisme », réforme de l’indemnisation chômage… Emmanuel Macron, accusé d’être trop vague dans ses propositions, a abattu jeudi les cartes sur son programme.
Désormais favori pour l’emporter selon les sondages, le candidat d’En Marche a entamé devant une foule de plus de 300 journalistes la présentation d’un document d’une trentaine de pages lors d’une conférence de presse jeudi matin au pavillon Gabriel, à un jet de pierre de l’Élysée. S’il était élu, Emmanuel Macron a promis de s’engager sur six chantiers : réforme de l’école, « société du travail », modernisation de l’économie, sécurité, stratégie internationale et moralisation de la vie publique.
En partie dévoilé jeudi matin dans une interview au Parisien, le programme reprend des mesures déjà annoncées depuis le début de sa campagne en octobre: extension des allocations chômage aux démissionnaires et aux indépendants, gestion par l’État de la formation continue, exonération de la taxe d’habitation pour 80% des ménages, renforcement des accords d’entreprise et de branche… Mais le document présenté, qui doit être renforcé par un document plus complet de 150 pages, inclut plusieurs propositions nouvelles.
Chantier titanesque
Objectif : casser l’image bâtie par ses détracteurs d’un candidat vague, qui n’a pas de programme, ou cherche en permanence à ménager tantôt à gauche tantôt à droite. Nouveau gros chantier social proposé par le candidat Macron, là où Alain Juppé avait échoué en 1995 : la fin des régimes spéciaux de retraites, avec une harmonisation progressive des règles « qui seront les mêmes pour tous les régimes » et une « vraie fin des inégalités entre fonctionnaires et salariés du privé ».
En revanche, contrairement au projet de François Fillon, l’âge de la retraite et le montant des pensions resteraient inchangés, tandis que le minimum retraite et l’allocation des handicapés seraient augmentés de 100 euros par mois. Adieu aussi le régime spécial de retraite des parlementaires, dans le cadre d’une « grande loi » de moralisation de la vie publique, réclamée par le nouvel allié de Macron, François Bayrou.
En pleine affaire Fillon, le candidat veut interdire « aux parlementaires l’emploi de proches ou de membres de leur famille, pour mettre fin au népotisme », ou empêcher ces mêmes parlementaires d’exercer des activités de conseil… Quant à sa majorité présidentielle à l’Assemblée, Emmanuel Macron croit pouvoir réunir « plusieurs familles politiques », avec « la gauche social-démocrate, les radicaux de gauche, les écologistes, le centre, la droite », autour d’un « Premier ministre fort » pour « tenir les équilibres d’une telle majorité ».
Du social-libéralisme
Côté éducation, il propose aussi de continuer à créer des postes d’enseignants lors du prochain quinquennat, « entre 4 000 et 5 000 » quand il compte supprimer 120 000 postes de fonctionnaires globalement. Les enseignants en zone prioritaire toucheraient une prime de 3 000 euros net par an.
Pour les banlieues, Macron propose des « emplois francs »: pour l’embauche d’un habitant d’un des 200 quartiers prioritaires de la politique de la ville, une prime de 15 000 euros sera versée. Une mesure de « discrimination positive assumée » selon l’entourage du candidat.
Devançant sur sa droite un François Fillon sur lequel pèse la menace d’une mise en examen le 15 mars, et sur sa gauche Benoît Hamon et Jean-Luc Mélenchon, distancés dans les sondages, l’ancien ministre de l’Economie doit désormais confirmer. Sans perdre les intentions de vote qu’il a grappillées à droite et à gauche. « La logique du programme, c’est d’enlever les verrous qui font qu’aujourd’hui les gens ne bougent pas, ne changent pas de job, de région… Mais faire en sorte qu’une fois qu’on a enlevé les verrous, les gens ne se retrouvent pas à travailler sans filet », explique un proche du candidat, qui assume l’étiquette de « social-libéralisme ».
L’égalité hommes-femmes, « une cause nationale »
« Il y a une cause nationale que je porterai, qui est l’égalité entre les hommes et les femmes », a par ailleurs soutenu Emmanuel Macron. « C’est une cause nationale parce que, au-delà des mesures techniques (…), je considère que c’est un sujet absolument fondamental de la vitalité de notre société, de notre économie et de notre démocratie ».
« Et donc l’égalité hommes-femmes sera une cause nationale », a assuré le fondateur d’En Marche. « Les femmes sont aujourd’hui sous-représentées, elles sont aujourd’hui l’objet de violences, de harcèlement », a déploré le candidat, dénonçant « une forme de consentement tacite » qui « s’est trop longtemps installé dans la société, s’est trop longtemps installé dans la vie professionnelle, s’est même trop longtemps installé dans la vie politique ».
« Et donc c’est à travers une politique assumée que je porterai moi-même dans les nominations, dans les pratiques, dans le suivi de notre vie économique et sociale, avec plusieurs mesures concrètes, que cette cause sera suivie », a-t-il conclu.
Le Quotidien/AFP
A 24% d’intentions de vote
Selon un sondage Ifop-Fiducial publié mercredi, Emmanuel Macron poursuit sa progression dans les intentions de vote au premier tour de l’élection présidentielle (24%, +1,5 point) derrière Marine Le Pen toujours en tête malgré un léger recul sur une semaine.
Et il creuse l’écart sur François Fillon (21%, +0,5 point), Benoît Hamon (14%, +0,5) et Jean-Luc Mélenchon (11%, stable).