Plusieurs milliers de personnes ont manifesté samedi après-midi dans plusieurs villes de France à l’appel notamment d’associations antiracistes et de syndicats, pour protester contre les violences policières, donnant lieu à Paris à quelques incidents à l’issue du rassemblement parisien.
A Paris, 2 300 personnes selon la police, 4 000 à 5 000 selon les organisateurs, se sont rassemblées sur la place de la République, plus de deux semaines après l’agression de Théo, ce jeune homme noir de 22 ans victime d’un viol présumé lors de son interpellation.
Quelques incidents ont eu lieu après la fin du rassemblement, qui avait été déclaré auprès de la préfecture de police par les organisateurs, des associations antiracistes (SOS Racisme, Cran, Ligue des droits de l’Homme, Mrap, Egam…), des syndicats (CFDT, CGT, FSU), des organisations lycéennes et étudiantes (Fidl, Unef, UNL, Fage, La Fabrique), auxquels s’est associé le Syndicat de la Magistrature.
A l’issue du rassemblement, un groupe de quelques centaines de personnes a «testé les barrages des forces de l’ordre», a indiqué une source policière. Puis, après avoir essuyé des jets de divers projectiles (bâtons de bois, canettes, pavés), les forces de l’ordre ont riposté avec charges et tirs de gaz lacrymogènes. Treize personnes ont été interpellées selon la préfecture de police, et deux policiers légèrement blessés.
D’autres manifestations ont réuni environ 350 personnes à Rennes – où 4 manifestants ont été interpellés – 250 à Nice, 230 au Mans, 200 à Poitiers, 150 à Montpellier, 150 à Dijon où des incidents ont également eu lieu. Ils étaient également 150 à Nantes et Angers, une centaine à La Rochelle, 80 à Avignon.
Mercredi et jeudi, deux rassemblements non déclarés avaient donné lieu à des heurts et dégradations à Paris et Bobigny. «L’affaire Théo n’est pas qu’un fait divers, c’est un problème structurel de violences policières que la France doit avoir la maturité de traiter», a déclaré le président de SOS Racisme, Dominique Sopo.
«On n’oublie pas, on pardonne pas»
Avant les heurts, la foule, réunissant une population de tous âges, a scandé «On n’oublie pas, on pardonne pas !», «C’est l’impunité et l’injustice, alors désarmons la police !». Une banderole barrée de l’inscription «De Zyed et Bouna à Théo et Adama, à bas le racisme et la violence d’État» et des panneaux «Flic violeur en prison» étaient également brandis.
Plusieurs élus, notamment le député écologiste Noël Mamère, ont pris part au rassemblement, ainsi que le candidat à la présidentielle Jean-Luc Mélenchon ou encore l’ex-footballeur Lilian Thuram. Théo a quitté l’hôpital jeudi, deux semaines après son viol présumé lors d’une interpellation brutale le 2 février à Aulnay-Sous-Bois (Seine-Saint-Denis). Quatre policiers ont été mis en examen, dont un pour viol, dans cette affaire devenue hautement politique.
Cette violente interpellation a déclenché de nombreux mouvements de protestation en France et dans les banlieues de région parisienne. Certains ont dégénéré, comme samedi dernier à Bobigny où du mobilier urbain avait été saccagé et des voitures brûlées. Trente-sept personnes avaient été interpellées en Seine-Saint-Denis durant cette soirée, point culminant des violences qui ont depuis reculé.
Marine Le Pen, candidate à l’élection présidentielle, avait demandé samedi matin «l’interdiction des manifestations contre les violences policières» prévues dans l’après-midi, fustigeant la «complaisance» des autorités face aux «milices d’extrême gauche ultraviolentes». «Ce serait aussi l’occasion d’éviter que ne soient une nouvelle fois entonnés d’immondes slogans insultants pour l’ensemble de nos forces de l’ordre et insultants pour la France», a-t-elle ajouté.
Le député LR Eric Ciotti a également réclamé «l’interdiction» de la manifestation parisienne «contre les pseudo-violences policières». En déplacement à Perpignan, le ministre de l’Intérieur Bruno Le Roux a répété un message d’apaisement. «Le rapport police-population est quelque chose d’important. Il faut qu’il y ait de la sérénité dans le travail de la police, avec un respect total de part et d’autres. Ce respect ne peut pas être à sens unique», a-t-il déclaré.
Le Quotidien/AFP