[1/4 de finale] Si Cristiano Ronaldo était Batman, Nani serait Robin. Mais un Robin qui est sorti de l’ombre et est prêt à récidiver contre la Pologne ce jeudi soir.
Un éternel espoir ? «Je vois le même Nani que je voyais il y a dix ans, dit Alain Giresse l’ancien milieu de terrain français. Il a beaucoup de talent mais mal exploité, il n’a pas réussi la carrière qu’il aurait pu accomplir.» Et Cristiano Ronaldo n’y est pour rien. «Il n’a pas passé sa vie à Manchester United avec lui, s’il se retrouve à Fenerbahçe ce n’est pas la faute de Ronaldo, il faut assumer, il n’a pas pu ou pas su faire mieux», poursuit le vainqueur de l’Euro-1984 avec la France.
En effet, Nani, formé au Sporting, comme son capitaine, a passé sept saisons à ManU (2007-2014), mais seulement les deux premières dans l’ombre de Cristiano. Quand en 2009 la star est partie au Real Madrid, Nani a d’ailleurs vécu ses meilleurs moments avec les Red Devils. Mais ensuite, il est retombé dans ces excès d’individualisme et n’a plus été un joueur indispensable. Louis van Gaal l’a laissé partir en lâchant un cinglant commentaire : «Nous n’avons pas d’ailier de très haut niveau il va falloir qu’on en achète un.»
Nani avait été prêté dès le début de saison au Sporting, avant d’être transféré à Fenerbahçe à l’été suivant, en 2015.
Pour Alain Giresse : «C’est un intermittent»
Il s’est vengé en critiquant Van Gaal dans les médias anglais. Le Néerlandais «criait sur les joueurs comme s’ils étaient des enfants», disait Nani, «difficile de jouer quand quelqu’un vous dit : Il faut passer la balle comme ça, blablabla. Le foot c’est l’instinct, c’est des décisions à prendre.»
Mais il n’a pas toujours fait les bons choix. Dans les cœurs des supporters de Manchester United, sa cote n’a jamais approché celle de Cristiano. Ils se souviennent surtout de lui pour une action pleine d’insolence, pas même un but, une série de jongles de la tête et du genou pour chambrer Justin Hoyte et Arsenal, un soir de février 2008 où ManU passait une correction aux Gunners (4-0). La vidéo, qui se termine par une tentative de découpage de Nani par Mathieu Flamini, égaye toujours les forums.
«C’est un intermittent», résume Giresse. Du coup, Nani a connu une carrière «en dents de scie», poursuit «Gigi». «Il est très talentueux, mais le constat est là, on en attendait plus de lui, un peu comme Quaresma d’ailleurs», l’autre surdoué de l’attaque portugaise. Pendant l’Euro, Nani «a été correct», estime Giresse, dans son rôle de dribbleur côté droit. Il a ouvert le score contre l’Autriche (1-1) puis égalisé contre la Hongrie (1-1), avant… le doublé de Cristiano Ronaldo (3-3 score final).
Des excuses publiques à Ronaldo
Décidément, Nani retombe dans l’ombre du maître. Il ne pèse pas le même poids, malgré ses 100 sélections (20 buts), tout de même à 29 ans, loin de CR7 et ses 60 buts en 130 capes. Avec l’équipe nationale, il avait pourtant commencé par un but sur corner direct dès sa première sélection ! Mais le Portugal s’était incliné contre le Danemark en amical (4-2), le 1er septembre 2006, bref : un coup d’éclat pour rien.
Né à Praia au Cap-Vert, Luís Carlos Almeida da Cunha, surnommé Nani par sa grande sœur quand il était petit, a appris à se contenter des entrées annexes dans la grande histoire du football, comme le 600e but de l’Euro, marqué contre l’Islande, comme il a appris à vivre dans l’ombre du triple Ballon d’or. Il avait même dû s’excuser publiquement auprès de Cristiano pour l’avoir privé d’un triplé contre l’Espagne (4-0), en amical en novembre 2010, en touchant le ballon qui allait entrer dans le but. Il avait été signalé, à tort, hors-jeu, et le but avait même été refusé.
Robin s’est d’ailleurs lui-même chargé de défendre Batman après son doublé contre la Hongrie : «Tout le monde devrait la fermer ce soir sur Cristiano.» Contre la Pologne, on reparlera peut-être de Nani.