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Des prostituées inquiètes des « effets négatifs » d’une pénalisation des clients


Des prostituées ont alerté mardi les sénateurs français, dans une vidéo envoyée par Médecins du Monde, des conséquences négatives qu’impliquerait pour elles une pénalisation des clients si elle était intégrée dans la proposition de loi examinée au Sénat à partir de lundi.

Dans un webdoc intitulé Pénaliser nuit gravement à la santé, quatre prostituées interrogées par Médecins du Monde donnent leurs arguments. « Je pense que ce n’est pas une bonne loi. Ce sera difficile pour les filles. Elles iront loin pour suivre les clients » et « Médecins du Monde ne pourra plus les voir pour les aider », explique ainsi Charlotte, 33 ans. Autre inquiétude, « les Madames (NDLR : les femmes proxénètes des réseaux nigérians) garderont les filles à la maison où elles feront venir les clients ».

« Ce sera plus dangereux pour celles qui travaillent dans la rue, ajoute Flora, 35 ans. Elles se prostituent pour vivre. Si elles arrêtent, elles n’ont pas d’autres solutions pour gagner de l’argent. »

« Les proxénètes les conduiront dans des endroits qu’on ne connaît pas. Les filles n’auront pas le temps de discuter avec le client de l’utilisation du préservatif », poursuit Glory, 27 ans. « Elles vont travailler en cachette », ajoute Sonia, 25 ans.

Ce webdoc « c’est l’occasion de laisser un espace de parole aux personnes directement concernées », explique Jean-François Corty, directeur des missions France à Médecins du Monde, qui vient en aide aux personnes prostituées. « Ces femmes expliquent pourquoi, dans la vraie vie, ça va compliquer leur existence. »

Alors que la loi n’est pas encore adoptée, « on a déjà vu sur le terrain des effets délétères. Des stratégies de contournement sont déjà mises en place par les prostituées et les clients : ils passent par des intermédiaires, la négociation va plus vite, ils se retrouvent dans des lieux reculés », explique Jean-François Corty. « On n’est pas pour la prostitution », ajoute-t-il, mais il dénonce une « mesure couperet » d’une loi qui « met plus en avant la problématique des inégalités hommes-femme, que les problèmes de pauvreté ou de migration ».

Les sénateurs examineront lundi et mardi la proposition de loi sur la lutte contre la prostitution. Des amendements ont été déposés pour réintégrer dans le texte le principe d’une amende de 1 500 euros pour les clients ayant recours à une prostituée, adopté par les députés mais rejeté par la commission spéciale du Sénat.

AFP