La Cour de justice de la République a déclaré lundi la directrice générale du FMI Christine Lagarde coupable de « négligence » dans l’affaire de l’arbitrage Tapie en 2008, mais l’a dispensée de peine.
L’ancienne ministre de l’Économie, dont le casier judiciaire ne fera pas mention de cette condamnation, n’est pas venue assister à la lecture de l’arrêt, retenue pour « raisons professionnelles » à Washington selon son avocat Patrick Maisonneuve. Le conseil d’administration du FMI, qui représente ses 189 États-membres et qui a toujours apporté sa confiance à la directrice générale, « devrait se réunir bientôt pour évaluer les plus récents développements », a déclaré lundi le porte-parole Gerry Rice, sans donner davantage de précisions.
Christine Lagarde, 60 ans, pour qui le parquet avait demandé la relaxe, risquait jusqu’à un an de prison et 15 000 euros d’amende. La CJR, composée de trois magistrats professionnels et douze parlementaires, n’a rien trouvé à reprocher à Christine Lagarde concernant le lancement en 2007 d’une procédure d’arbitrage pour solder un vieux contentieux entre Bernard Tapie et le Crédit Lyonnais. En revanche, la Cour a estimé qu’en ne tentant pas de recours en 2008 contre la sentence arbitrale défavorable à l’État, la ministre avait bien fait preuve de « négligence ». Plus précisément, elle a « rendu inéluctable l’appropriation par les époux Tapie d’une somme de 45 millions euros », correspondant à leur prétendu préjudice moral. Cette négligence « a été l’une des causes déterminantes » du détournement de fonds publics dont a ainsi bénéficié à l’homme d’affaires, lequel a touché au total plus de 400 millions d’euros via un arbitrage.
Impossible de faire appel
Selon l’arrêt lu par la présidente Martine Ract Madoux, la ministre aurait à l’époque dû demander plus de détails sur « une sentence aussi choquante ». La CJR estime que si elle l’avait fait, cela « aurait certainement permis de découvrir » que la procédure d’arbitrage avait été manipulée à son insu, pour ouvrir à la voie à une indemnisation du « préjudice moral ». L’État aurait alors eu de solides arguments pour attaquer la sentence arbitrale en justice. Les juges ont aussi reproché à Christine Lagarde de n’avoir pris que des avis hostiles à tout recours contre l’arbitrage, négligeant les avertissements qui allaient dans un autre sens. Malgré cette culpabilité, la CJR a estimé que la « personnalité » de la patronne du FMI et sa « réputation internationale », ainsi que le fait qu’elle bataillait à l’époque contre une « crise financière », plaidaient en sa faveur et justifiaient de la dispenser de peine.
Les arrêts de la CJR peuvent faire l’objet d’un pourvoi en cassation, mais il est impossible de faire appel. Vendredi, Christine Lagarde avait devant ses juges « assumé » ses actes, et assuré avoir « agi (…) avec pour seul objectif la défense de l’intérêt général ». Elle avait reçu le soutien du procureur général Jean-Claude Marin, pour qui « prendre une mauvaise décision n’est pas (…) en soi seul un délit ».
Le Quotidien/AFP