Un quotidien allemand de Hambourg, qui avait publié des caricatures de Mahomet provenant de Charlie Hebdo, a été la cible dimanche matin d’une attaque avec un engin incendiaire, sans faire de victimes, la première du genre depuis l’attentat meurtrier contre l’hebdomadaire satirique français.
Des débris noircis par le feu devant le quotidien allemand le « Hamburger Morgenpost » à Hambourg. (Photos : AFP)
Un engin incendiaire a visé le Hamburger Morgenpost dans la nuit de samedi à dimanche, mais la police de Hambourg se refusait dans un premier temps à faire un lien avec les événements de Paris. Cette attaque est survenue alors que des ministres européens de l’Intérieur se réunissaient à Paris et devaient annoncer des mesures de renforcement de la sécurité.
Samedi, la chancelière allemande Angela Merkel était précisément à Hambourg pour une réunion de l’Union chrétienne-démocrate (CDU), son parti conservateur, destinée à préparer les législatives régionales du 15 février, la grande ville portuaire du nord de l’Allemagne, étant aussi l’un des 16 Etats fédérés allemands. Dans son discours, elle a notamment souligné le nécessaire échange d’informations policières entre les Etats de l’espace Schengen.
Avant même les attentats à Paris, depuis l’automne, un mouvement anti-islam n’avait eu de cesse de gagner de l’ampleur en Allemagne. Le groupe Pegida (acronyme allemand pour Européens patriotes contre l’islamisation de l’Occident) est parvenu à rassembler près de 18 000 manifestants lundi dernier dans son fief de Dresde (est) et entend tirer profit du massacre commis à Charlie Hebd au nom du jihad pour se renforcer. Toutefois, les opposants à Pegida demeurent toujours nettement plus nombreux dans le pays, et samedi à Dresde quelque 35 000 personnes ont défilé pour défendre une société ouverte et tolérante.
A Hambourg, « des pierres puis un engin incendiaire ont été lancés à travers une fenêtre » du quotidien vers 01h20 GMT (2h20 locale), déclenchant un début d’incendie, a déclaré à l’AFP la porte-parole de la police Karina Sadowsky. « Deux pièces ont subi des dégâts mais le feu a été éteint rapidement », a-t-elle précisé. Deux personnes au comportement suspect ont été interpellées dans le quartier, et elles étaient toujours interrogées dimanche matin, mais la police se refusait à fournir davantage de détails. « Le motif n’est pas clair, il n’y a pas de revendication et pas d’autres indications », a précisé Mme Sadowsky, ajoutant qu’une enquête avait été ouverte. Elle s’est refusée à lier cet incident aux attentats de Paris.
Le Hamburger Morgenpost, un tabloïd connu localement comme le MOPO, avait publié des caricatures de Charlie Hebdo en Une après le massacre qui a coûté la vie à 12 personnes, dont cinq dessinateurs de l’hebdomadaire satirique mercredi, avec en titre : « Autant de liberté doit être possible ». Plusieurs journaux allemands en avaient fait autant. Il n’avait pas été possible dans l’immédiat dimanche matin de joindre quelqu’un au Hamburger Morgenpost, un quotidien qui tire à 91 000 exemplaires. « Une épaisse fumée flotte encore dans l’air, la police cherche des indices », écrivait le journal sur son site internet. Une photo montrait les pompiers en action dans une cour intérieure de l’immeuble, la légende précisant que l’engin avait été lancé dans le sous-sol. Une autre photo, prise dans la salle des archives, montrait des exemplaires noircis du quotidien. Personne ne se trouvait dans l’immeuble à ce moment-là, selon le MOPO. Selon des informations de presse le MOPO avait engagé des gardes pour renforcer sa sécurité.
(Photo : AFP)
Les milieux islamistes de Hambourg étaient apparus sur le devant de la scène en 2001 lorsqu’il fut révélé que trois des auteurs des détournements d’avions aux Etats-Unis le 11 septembre, dont leur leader Mohammed Atta, vivaient dans la cité portuaire de quelque 2,4 millions d’habitants. Citant une source non identifiée de l’agence américaine de renseignements NSA, le journal allemand Bild am Sonntag estime pour sa part dimanche que le massacre commis à Charlie Hebdo pourrait annoncer une vague d’attaques en Europe menées par des terroristes jihadistes. La NSA a intercepté des communications dans lesquelles des dirigeants de l’organisation Etat Islamique (EI) ont annoncé de nouvelles attaques, précise le journal.
Samedi, la justice allemande a annoncé l’arrestation d’un Allemand de 24 ans, soupçonné d’avoir rejoint les rangs de l’organisation de l’EI en Syrie. L’homme n’a aucun lien avec les attentats commis à Paris, a précisé dans un communiqué le parquet général fédéral allemand.
AFP