La traque du troisième assaillant de l’aéroport de Bruxelles a repris de plus belle après la libération du principal suspect, une semaine après les attentats-suicides jihadistes qui ont fait 35 morts dans la capitale belge.
Après avoir été perturbés dimanche par une manifestation nationaliste tendue, les hommages aux personnes tuées, d’une dizaine de nationalités, ont repris lundi avec une veillée oecuménique à la cathédrale Saints-Michel-et-Gudule.
Un hommage aux victimes de Bruxelles, mais aussi de Lahore (Pakistan) où un kamikaze islamiste a tué dimanche 72 personnes, est également prévu mardi matin à Paris. Signe d’une menace toujours élevée, les enquêtes sur les réseaux jihadistes prennent une tournure de plus en plus européenne, avec de nouvelles arrestations ces derniers jours en Belgique, en Italie et aux Pays-Bas. Mais les investigations sur les attentats-suicides du 22 mars à Bruxelles ont subi un revers. Fayçal Cheffou, 30 ans, seul inculpé dans ce dossier, notamment pour «assassinats terroristes», a été remis en liberté lundi, sans conditions.
«Les indices qui avaient entraîné l’arrestation du nommé Fayçal C. n’ont pas été confortés par l’évolution de l’instruction en cours», a annoncé le parquet fédéral belge. Une source proche de l’enquête a confirmé qu’il «n’est pas +l’homme au chapeau+».
Depuis son arrestation jeudi, les enquêteurs tentaient de confirmer leur «hypothèse» selon laquelle cet homme, qui se présente comme journaliste indépendant, pouvait être «l’homme au chapeau» repéré sur des images de vidéosurveillance – le poseur de bombe de l’aéroport de Bruxelles-Zaventem qui a pris la fuite avant que ses deux complices ne se fassent exploser. La police a diffusé lundi une nouvelle vidéo de ce troisième homme pour l’«identifier».
Nouvelle polémique
Seule certitude pour l’instant, les trois kamikazes – Ibrahim El Bakraoui et Najim Laachraoui à l’aéroport, Khalid El Bakraoui dans le métro bruxellois – sont directement liés aux commandos des attentats qui avaient fait 130 morts et des centaines de blessés le 13 novembre à Paris. Et notamment au suspect-clé Salah Abdeslam, logisticien présumé du carnage parisien, arrêté le 18 mars à Bruxelles après plus de quatre mois de cavale au nez et à la barbe des autorités belges.
Les attentats de Paris et Bruxelles ont été revendiqués par le groupe jihadiste Etat islamique (EI), et les réseaux qui les ont commis s’imbriquent en un seul. La Belgique demande ainsi l’extradition de Djamal Eddine Ouali, un Algérien arrêté samedi en Italie, soupçonné de fabrication de «faux documents» utilisés par certains «auteurs présumés des attentats de Paris et probablement aussi par Salah Abdeslam».
Parallèlement, la justice belge a annoncé lundi l’inculpation de trois suspects arrêtés la veille dans une opération «antiterroriste» dans plusieurs villes de Belgique, mais sans lien direct avec les attentats. Une autre enquête révèle de nouvelles ramifications européennes: celle sur un projet d’attentat que la France dit avoir déjoué, avec l’arrestation jeudi près de Paris de l’ex-braqueur français Reda Kriket. Un Français qui a séjourné en Syrie a été interpellé dimanche aux Pays-Bas, soupçonné d’avoir été mandaté par l’EI pour attaquer la France avec Kriket.
Deux hommes avaient déjà été inculpés en Belgique dans ce dossier, dont l’un, Abderamane A., né en Algérie, avait été condamné en 2005 en France à sept ans de prison et une interdiction définitive du territoire français pour son soutien logistique aux assassins du commandant Ahmad Shah Massoud, tué le 9 septembre 2001 en Afghanistan. A Bruxelles, les polémiques sur l’attitude des autorités ont été relancées par la manifestation tendue de 300 hooligans venus perturber dimanche les hommages aux victimes. Déjà critiqué pour le raté dans la surveillance du kamikaze Ibrahim El Bakraoui, qui n’avait pas été inquiété après avoir été arrêté en Turquie puis expulsé, le ministre de l’Intérieur Jan Jambon a été de nouveau fustigé.
Le bourgmestre de Bruxelles Yvan Mayeur l’a ainsi accusé sur RTL de n’avoir «rien fait» pour empêcher la venue de ces «hooligans d’extrême droite». Plusieurs centaines de personnes ont prié lundi à la cathédrale de Bruxelles, en présence notamment de responsables musulmans et juifs. «Il n’y a pas un vrai vivre ensemble s’il n’y a pas un profond et sincère respect pour l’autre», a lancé Mgr Jozef De Kesel dans son homélie.
Le Quotidien/AFP