Yassin Salhi, qui nie toute dimension religieuse dans l’assassinat et la décapitation de son patron et l’attentat contre une usine dans l’Isère, était toujours interrogé ce lundi par les enquêteurs qui ont découvert une connexion avec la Syrie.
Transféré dimanche en fin de journée vers le siège de la sous-direction antiterroriste de la police judiciaire (SDAT) à Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), le suspect a contesté en garde à vue « toute religiosité dans son passage à l’acte », selon une source proche du dossier. Mais il « ne s’explique pas » sur le fait que la tête de sa victime a été retrouvée fixée à un grillage et encadrée de deux drapeaux frappés de la « chehada », la profession de foi musulmane.
Salhi, qui a aussi crié « Allah akbar » (« Dieu est le plus grand ») vendredi aux pompiers qui l’ont maîtrisé alors qu’il tentait d’ouvrir des bouteilles de gaz dans une usine de Saint-Quentin-Fallavier (Isère), a avoué avoir assassiné et décapité son patron, Hervé Cornara, 54 ans.
Les enquêteurs ont découvert dans son téléphone portable un macabre selfie, pris avec la tête de sa victime, envoyé à un Français connu comme étant enrôlé dans les rangs de l’organisation Etat islamique dans les zones de jihad en Syrie.
Originaire de Vesoul, cet homme, prénommé Yunes-Sébastien, est parti en novembre 2014 en Syrie, rejoignant le secteur de Raqa, où il combattrait dans les rangs de l’organisation État islamique (EI), selon des sources proches du dossier.
Les services de renseignement n’avaient pas repéré son départ en Syrie en novembre dernier. C’est son père qui a prévenu la police de la disparition de son fils, ont précisé des sources proches de l’enquête. Yassin Salhi connaît depuis 2006 Yunes-Sébastien, qui appartenait, comme lui, à une mouvance islamiste évoluant dans le secteur de Vesoul, Besançon et Pontarlier (Doubs), précise une autre source proche du dossier.
Aucun élément ne montre pour l’instant que Yassin Salhi se serait lui-même rendu en Syrie, bien qu’il ait été fiché entre 2006 et 2008 par les services de renseignement comme s’étant radicalisé dans sa ville natale de Pontarlier. Il avait de nouveau été repéré entre 2011 et 2014 pour ses liens avec la mouvance salafiste lyonnaise.
Juste avant son tranfèrement en région parisienne dimanche, Salhi a été conduit à son domicile de Saint-Priest, près de Lyon, entouré de policiers cagoulés et armés, revêtu d’un gilet pare-balles et la tête couverte d’un tissu blanc, notamment pour y récupérer son passeport, qui n’a cependant pas été retrouvé.
Le directeur de l’usine Air Products & Chemicals de Saint-Quentin-Fallavier a indiqué lundi n’avoir jamais constaté de « problème de comportement » chez Yassin Salhi, qui « avait un badge pour avoir accès au site ».
L’épouse d’Hervé Cornara avait vu son mari pour la dernière fois peu après 07H30 vendredi, dans leur société de transport de Chassieu (Rhône). L’attentat a eu lieu deux heures plus tard. Après une explosion dans l’usine de Saint-Quentin, Yassin Salhi a été rapidement interpellé.
Le suspect a expliqué aux enquêteurs avoir tué son patron sur un parking en se rendant sur les lieux de l’attentat.
Deux jours plus tôt, Salhi avait eu un différend d’ordre professionnel avec sa victime. Le ton était monté entre les deux hommes, quand l’employé avait fait tomber une palette de matériel informatique.
Quelque 200 personnes, en majorité des musulmans, se sont rassemblées dimanche en fin d’après-midi devant la mosquée de Villefontaine (Isère) pour « condamner l’attentat diabolique » de Saint-Quentin-Fallavier, à quelques kilomètre de là.
« Ces gens-là ce sont des terroristes qui ont trahi le message essentiel de l’islam », a lancé Azzedine Gaci, recteur de la mosquée de Villeurbanne (Rhône). « Ne les laissons pas nous diviser. »
AFP