Le Premier ministre socialiste français, Manuel Valls, a fustigé lundi une offensive « politique » de l’opposition de droite visant « à déstabiliser le gouvernement » dans la polémique qui fait rage en France sur les failles du dispositif policier à Nice lors de l’attentat du 14-Juillet.
« C’est une polémique purement politique », a dénoncé le chef du gouvernement sur les médias RMC/BFMTV, en ciblant en particulier le patron de la droite niçoise, Christian Estrosi, ex-maire de la ville très critique à l’égard du pouvoir. Comme l’avait fait vendredi le président François Hollande, il a défendu avec vigueur le ministre de l’Intérieur, Bernard Cazeneuve, accusé dimanche par une policière municipale de Nice de pressions pour modifier un rapport sur l’attentat et qui a dénoncé « une campagne de vilenies », promettant de « rendre coup pour coup ». Bernard Cazeneuve « est un homme intègre, un homme d’Etat, un ministre de l’Intérieur formidable », a martelé Manuel Valls.
La policière niçoise Sandra Bertin, chef du service pilotant la vidéosurveillance, accuse le ministre de l’Intérieur d’avoir fait pression pour modifier son rapport sur le dispositif de sécurité au soir de l’attentat. Bernard Cazeneuve a annoncé le dépôt d’une plainte pour « diffamation ».
Depuis l’attentat de Nice, la polémique ne faiblit pas sur les mesures de sécurité prises le 14 juillet au soir dans la ville autour du feu d’artifice de la fête nationale française. C’est à son terme qu’un Tunisien de 31 ans, Mohamed Lahouaiej Bouhlel, a fauché des centaines de personnes avec un camion de 19 tonnes sur la Promenade des Anglais, le front de mer emblématique de la ville. Bilan: 84 tués et plus de 350 blessés.
La controverse porte notamment sur des effectifs policiers – police nationale et police municipale – jugés insuffisants comme sur les barrages, en principe réalisés au moyen de véhicules de police en travers de la chaussée pour empêcher la circulation sur l’avenue. Dès le 15 juillet, le Premier ministre avait assuré qu’aucune « faille » n’était à reprocher aux forces de l’ordre. « Il faut que tout cela cesse (…) Cette idée que l’Etat ment, que l’Etat a quelque chose à cacher, alimente le doute, fracture le pays », s’est agacé lundi le chef du gouvernement.
« Il faut évidemment la vérité (…) mais pour cela il faut laisser la justice aller jusqu’au bout », a-t-il ajouté. Il a aussi rappelé qu’un rapport de la police des polices était attendu dans les jours à venir sur la sécurité à Nice le soir du 14 juillet. Lundi matin, François Hollande a lui aussi jugé une nouvelle fois qu’il revenait à « la justice » et à « personne d’autre » de faire émerger la vérité.
Plaintes possibles
Des familles de victimes ont fait part de leur intention de porter plainte contre l’Etat et contre la mairie de Nice pour manquements à leurs obligations de sécurité. L’opposition de droite, qui dirige Nice, et l’extrême droite, qui y est très implantée, attribuent depuis le 14 juillet au pouvoir socialiste la responsabilité des failles présumées du dispositif policier le soir de la tuerie. « Tout cela est indigne. Depuis dix jours, on abaisse le débat politique », s’est emporté Manuel Valls.
Le Premier ministre a accusé Christian Estrosi, président de la région qui englobe Nice, d’avoir « commencé cette polémique » dès la nuit de l’attentat, alors que les cadavres des victimes jonchaient encore la Promenade des Anglais.
La controverse est alimentée par deux rapports: le premier, fait par la police municipale de Nice affirme que le camion du jihadiste est monté sur le trottoir de la promenade des Anglais sans « aucune présence policière ». Le second, réalisé par la police nationale, assure que le camion a voulu éviter un barrage.
L’attentat du 14-Jjuillet est un coup dur pour le gouvernement comme pour l’ex-maire de Nice, adjoint à la sécurité de la ville. M. Estrosi s’est souvent targué d’avoir fait de Nice une des villes les plus sûres de France, grâce au réseau de vidéosurveillance le plus dense du pays. L’attaque de Nice est la pire en Europe depuis les carnages du 13 novembre à Paris et du 22 mars à Bruxelles. Les trois attentats ont été revendiqués par le groupe jihadiste Etat islamique.
Le Quotidien / AFP