Nouvelle ère pour les constructeurs automobiles et consommateurs européens: vendredi entre en vigueur un protocole d’homologation des véhicules neufs plus sévère, qui remplace un processus discrédité par le scandale des diesel truqués.
Graduellement, d’ici à 2019, le WLTP, acronyme en anglais de «test de véhicules légers harmonisé au niveau mondial», va se substituer au NEDC (nouveau cycle européen de conduite) qui trouvait ses racines dans les années 1970. Ces tests en laboratoire, préalables à la commercialisation d’un modèle dans l’Union européenne, mesurent la consommation de carburant et les émissions de CO2, mais aussi de particules, oxydes d’azote (NOx) et autres nocifs.
La réforme, fruit de négociations serrées entre Etats-membres de l’UE, sous la pression d’une puissante industrie et le regard critique de défenseurs de l’environnement, a été galvanisée par le scandale Volkswagen il y a deux ans. L’affaire a mis en lumière la facilité avec laquelle des constructeurs pouvaient, même sans formellement tricher, se jouer des tests d’homologation, les émissions réelles étant souvent largement supérieures aux seuils officiels.
La norme WLTP «marque une amélioration énorme, par rapport au NEDC qui était très obsolète», affirme Greg Archer, responsable du programme «véhicules propres» de Transport & Environment (T&E), ONG dénonçant depuis longtemps une dérive des écarts entre valeurs homologuées et la réalité. Le cycle NEDC simulait des accélérations poussives et était effectué dans des conditions irréalistes. D’autant plus que les constructeurs avaient recours à des subterfuges tolérés pour obtenir de meilleurs résultats, comme débrancher des accessoires électriques.
Pour tenter d’éliminer le caractère prévisible des tests en laboratoire, exploité par le logiciel truqueur des Volkswagen diesel, le cycle WLTP s’accompagne de tests en conditions réelles et aléatoires de conduite (Real driving emissions, RDE) mesurant les NOx et les particules. «C’est le RDE qui va empêcher, plus que le cycle lui-même, ces problématiques de systèmes de dépollution moins efficaces en fonction du temps», indique à l’AFP Gaëtan Monnier, directeur de l’institut Carnot à l’organisme public de recherche français IFP-Energies nouvelles.
Encore insuffisant pour les ONG
Des tests menés en France par une commission d’experts ont mis en évidence des dépassements d’émissions de NOx pouvant atteindre dix fois le seuil réglementaire de 80 mg/km. Pour les nouvelles homologations, un compromis sur le NOx a été trouvé, un «facteur de conformité» de 2,1 permettant des émissions réelles jusqu’à 168 mg/km. Ce facteur sera peu à peu resserré. Plus long (23 km en 30 mn) que le NEDC (11 km en 19 mn), le WLTP prévoit davantage de phases d’accélération plus franches, ainsi qu’une vitesse maximale plus importante, tandis que certaines optimisations sont proscrites.
«Le WLTP donnera une base bien plus précise pour calculer la consommation et les émissions d’une voiture. Cela permettra de faire en sorte que les mesures en laboratoire reflètent mieux le comportement d’une voiture sur route», argumente l’association des constructeurs européens d’automobiles (ACEA). «Il y aura toujours un écart important» entre la consommation homologuée WLTP et les performances réelles, prévient toutefois M. Archer.
«Le WLTP sera vraiment utile quand on aura un test en conditions réelles de conduite» pour le CO2, renchérit à l’AFP Lorelei Limousin, responsable des politiques climat-transports au Réseau action climat qui milite comme T&E pour que les tests RDE mesurent aussi la consommation de carburant. Le WLTP, «sur le plan technique, ça change énormément de choses» pour les constructeurs, affirme Bernard Swoboda, maître expert consommation au sein du groupe PSA, en évoquant des tests plus compliqués et plus longs. En outre, la réglementation impose de donner au client une information sur chaque modèle précis. «La moindre option va changer la valeur de consommation», dit-il à l’AFP.
Du coup, il y a actuellement «engorgement à l’UTAC», l’organisme qui homologue les véhicules en France, révèle M. Swoboda, alors que la réelle échéance est en septembre 2018, quand il faudra que toutes les voitures commercialisées, et pas seulement les nouveaux types, soient homologuées WLTP.
Le Quotidien/AFP