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À Davos, le président chinois tance le protectionnisme de Donald Trump


Devant 3000 dirigeants économiques et politiques, Xi Jinping a mis en garde contre toute tentation de repli. (photo AFP)

Il faut « rééquilibrer » la mondialisation, mais il est « impossible » de l’arrêter, a déclaré mardi à Davos le président chinois Xi Jinping, mettant en garde contre des « guerres commerciales », dans un discours ciselé pour dépeindre Pékin en défenseur du libre-échange face à un Donald Trump isolationniste.

« Nous devons rester attachés au développement du libre-échange (…) et dire non au protectionnisme », a martelé M. Xi lors de son discours d’ouverture du Forum économique mondial qu’il est le premier chef d’Etat chinois à visiter.

Devant 3.000 dirigeants économiques et politiques réunis dans la station de ski helvète, il a mis en garde contre toute tentation de repli. « Que cela vous plaise ou non, l’économie mondiale est le grand océan auquel on ne peut échapper (…) Toute tentative de stopper les échanges de capitaux, technologies et produits (…) est impossible et à rebours de l’histoire », a-t-il insisté.

Autant de piques visant implicitement Donald Trump: le milliardaire, qui s’installera vendredi à la Maison Blanche, est vent debout contre une mondialisation libérale accusée de détruire des emplois américains.

Le président élu américain a promis d’abandonner l’accord de libre-échange transpacifique (TPP) signé en 2015, d’ériger des barrières douanières avec le Mexique et la Chine et pourfend volontiers l’Organisation mondiale du commerce (OMC). Le protectionnisme, c’est « comme s’enfermer dans le noir », a raillé Xi Jinping, avertissant que « personne ne sortira vainqueur d’une guerre commerciale ».

À l’inverse, « la Chine gardera sa porte ouverte, ne la fermera pas (…) et nous espérons que les autres pays garderont eux aussi leur porte ouverte pour les investisseurs chinois avec un environnement équitable », a-t-il ajouté.

« Cela ne sert à rien de blâmer la mondialisation » pour les problèmes de la planète, comme le chômage, les flux de migrants, ou encore la crise financière de 2008 due « à des problèmes de supervision », a encore estimé le président.

« À double tranchant »

La mondialisation économique « est à double tranchant » et « crée de nouveaux problèmes », elle « doit être plus inclusive et plus durable » et il faut la « rééquilibrer », a cependant reconnu Xi Jinping.

Il a fustigé des institutions multilatérales « inadéquates » et insuffisamment « représentatives », une critique récurrente de la part de Pékin qui juge ne pas occuper dans les institutions de Washington (FMI, Banque mondiale) et sur la scène mondiale un rôle diplomatique équivalant à son économie.

Or, la Chine entend profiter de l’élection de Donald Trump pour muscler sa stature de puissance mondiale « responsable » et redessiner à sa manière la carte du commerce planétaire.

Face à l’échec du TPP, Pékin promeut de nouveaux accords régionaux de libre-échange (FTAAP pour le bassin Asie-Pacifique et RCEP en Asie orientale). Le pays initie aussi de nouvelles « routes de la soie » ceinturant le continent eurasiatique à coups d’investissements dans des infrastructures.

Mais ces « routes de la soie » assurent surtout des débouchés à la colossale production excédentaire des industries lourdes chinoises –acier et ciment–.

La Chine, première puissance marchande planétaire, fait un improbable héraut du libre-échange. Elle est volontiers accusée par l’Union européenne et les Etats-Unis (ses deux principaux partenaires commerciaux) de dumping, de mesures protectionnistes pénalisant les produits importés et de restrictions à l’accès des firmes étrangères.

« Il faut voir cette nouvelle politique pour ce qu’elle est: une promotion du mercantilisme chinois », tranche Christopher Balding, professeur à l’université de Pékin.

Pragmatique, la Chine veut enfin relancer ses exportations après un plongeon de 7,7% en 2016. La part du commerce dans son PIB est tombée de 66% en 2006 à 40,7% en 2015, selon la Banque mondiale, mais reste un moteur de croissance crucial pour le pays.

Le Quotidien / AFP