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Yao est accusé d’avoir foncé dans une voiture pour tuer sa femme


Yao a-t-il voulu maquiller une tentative d’homicide en accident de voiture ? (Photo : archives lq)

Et peut-être aussi d’avoir causé un accident de la route pour éliminer son ex-épouse, ainsi que d’avoir causé de graves dommages collatéraux. La 13e chambre criminelle devra en décider.

Une collision entre deux voitures a eu lieu dans la matinée du 16 septembre 2022 sur la route d’Echternach à Luxembourg-Dommeldange. Trois personnes sont blessées plus ou moins gravement. Un fait divers d’apparence classique. D’apparence seulement. L’ancienne épouse du conducteur de la voiture à l’origine de l’accident l’accuse d’avoir foncé sciemment dans la voiture arrivant en sens inverse pour attenter à ses jours. Yao, un Ivoirien de 43 ans, prétend le contraire.

Un coup de volant à gauche a détourné la voiture du couple de sa trajectoire, plaçant son côté passager dans la trajectoire de la voiture qui arrivait de la ville en direction du Waldhaff.

Un expert reconnaît ne pouvoir que spéculer sur les raisons de ce coup de volant en l’absence de problème technique du véhicule. Les deux époux se disputaient au moment de la collision. Yao avait annoncé son intention de tuer son ancienne épouse juste avant d’agir, selon la jeune femme. Il est accusé de tentative de meurtre, ainsi que de coups et blessures volontaires sur son ancienne épouse et sur les occupants de la deuxième voiture. Ou involontaires s’il ne s’agissait que d’un accident.

Des explications confuses

Yao indique, lors d’un interrogatoire haut en couleur, avoir posé sa main droite sur le genou de sa «chérie» pour la calmer. «Le diable était en train de nous tenter», prétend le prévenu face à la 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Elle l’aurait repoussé. Yao aurait été distrait et aurait perdu le contrôle de sa voiture en voulant éviter un fossé. «J’aime cette femme. C’est la seule chose qu’on puisse me reprocher. Je n’ai jamais voulu la tuer», jure Yao qui assure qu’«elle continue à monter en voiture avec moi.»

«Le fait de repousser votre main ne peut pas vous faire perdre à ce point le contrôle de la voiture. D’autant plus que votre ancienne épouse n’évoque pas cette version. Selon elle, vous auriez annoncé votre intention de la tuer avant de bifurquer», indique la présidente. «Pourquoi vous accuserait-elle à tort? Dans quel but?» «Bonne question ! Demandez-lui», répond Yao qui prétend qu’elle a menti pour se débarrasser de lui. «Vous avez indiqué au juge d’instruction qu’elle vous trompait», lui a rappelé le procureur, remettant involontairement un euro dans le jukebox, pour comprendre la nature de la dispute entre Yao et son ancienne épouse. Le chauffeur de bus de profession se lance dans d’interminables logorrhées. Il zigzague entre romantisme dégoulinant et explications confuses, frôle le machisme et la mauvaise foi, esquive toute prise de conscience.

«Un simple accident»

«On était à hauteur du Parc-Hôtel-Alvisse. Je l’ai vu arriver normalement au loin. Au dernier moment, il nous a percutés», s’est souvenu le conducteur de la deuxième voiture. «Il ne pouvait pas avoir eu un moment d’inattention. J’ai vu la voiture arriver sur nous d’un coup.» «Avez-vous eu l’impression que cette voiture attendait de croiser une autre voiture pour tourner?», l’interroge le procureur. «Il s’est mis en travers de ma route», répond le témoin qui s’est porté partie civile. «Mes clients vont très mal physiquement et psychologiquement. Ils ont vécu les faits comme un attentat. On les a percutés sciemment. Pour eux, c’est plus qu’un accident », constate leur avocate. «Il faut tirer le volant à deux mains pour effectuer ce genre de manœuvre.»

«La voiture du prévenu était uniquement endommagée du côté où était assise sa femme. L’autre véhicule était endommagé à l’avant», enchaîne le procureur qui estime qu’un «réflexe» est à l’origine de la collision. Le magistrat a choisi de croire l’ex-épouse du prévenu dont «les propos sont corroborés par les témoins». Un automobiliste a témoigné avoir vu la voiture bifurquer brusquement sans freiner, comme pour accéder à une entrée de garage avant l’impact. «Pour moi, son geste était délibéré pour tuer son ancienne épouse et le tribunal peut retenir la tentative de meurtre», affirme le procureur qui retient également les coups et blessures involontaires pour la collision avec le deuxième véhicule. Il a requis une peine de réclusion de 12 ans à l’encontre de Yao.

Me Entringer veut revenir au dossier et mettre de côté les spéculations. Il a relevé la banalité de la collision et rappelé que l’expert n’a pas pu «exclure un geste involontaire» à son origine. «Nous avons simplement un accident de la circulation et aucun élément probant permettant d’établir le contraire», clame l’avocat avant d’affirmer que «la victime présumée n’en est pas à ses premiers mensonges». «C’est uniquement sur la déposition de cette dame que mon client se trouve renvoyé devant une chambre criminelle pour tentative de meurtre.» L’avocat rappelle également que son client avait freiné après avoir perdu le contrôle de son véhicule, «mais cela ne caractérise en rien une volonté quelconque de faire souffrir ou de tuer quelqu’un. La volonté n’est pas prouvée dans ce dossier.»

Le prononcé est fixé au 27 juin prochain.

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