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Vol d’extincteurs : «On m’avait dit que je pouvais me servir»


«Pour moi, c’était de la ferraille. Je pensais que l’entreprise n’en voulait plus», a affirmé le prévenu à la barre. (Photo : archives lq)

Voler des déchets pour les revendre. Pour Mirsad, ce n’est pas du vol puisque personne n’en veut. Pour la justice, si. Surtout sur le terrain de l’entreprise à laquelle ils appartiennent.

Mirsad est accusé d’avoir volé des extincteurs à une entreprise luxembourgeoise. Pas moins de 200 au total pour une valeur de 11 000 euros en plusieurs fois. Le jeune homme conteste avoir commis des vols. «Pour moi, ce n’étaient pas des vols. Tout était ouvert. Il n’y avait pas de clôture. J’avais demandé l’autorisation à quelqu’un de l’entreprise il y a quelques années et on m’avait dit que je pouvais me servir», s’est justifié le prévenu à la barre de la 9e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg hier après-midi. «Pour moi, c’était de la ferraille. Je pensais que l’entreprise n’en voulait plus.»

La présidente lui explique qu’il aurait dû demander l’autorisation à nouveau avant de les prendre et passer en journée plutôt que le soir après l’heure de fermeture de l’entreprise. «Ma copine et moi n’avions qu’une seule voiture. Je devais attendre qu’elle rentre du travail pour la prendre», a avancé le jeune homme qui «ne pensait pas à mal». Dans la nuit du 20 août 2023, avec son cousin Murat, il recommence. Cette fois, ils embarquent l’équivalent de 30 kilogrammes d’aluminium sous la forme de cadres de fenêtres d’une autre entreprise. «Nous nous promenions et nous les avons vus. Nous les avons chargés dans la voiture et nous sommes partis», a indiqué le prévenu qui pensait également qu’il s’agissait de déchets.

«Même s’il s’agissait de déchets, ce n’étaient pas vos déchets. Ils ont une valeur, preuve à l’appui, vous les revendiez», note la présidente. «Vous n’aviez pas à rentrer sur des terrains privés et vous servir.» Le prévenu s’est rendu au moins à trois reprises sur le terrain de l’entreprise qui entreposait les extincteurs. Les 22 et 30 août 2021, ainsi que les 2 et 4 septembre 2021, selon les images de vidéosurveillance. «Il y avait eu plusieurs vols entre le 16 et le 21 août. L’entreprise avait installé des caméras», a témoigné un policier. «Sur les images, on peut voir arriver un homme qui ressemble au prévenu, dans une voiture immatriculée en France. Il en descend et charge les extincteurs. La cour à l’arrière en était remplie.»

Aucune partie civile

Vol ou pas vol? Aucun représentant des deux entreprises n’était présent à l’audience pour le confirmer. La représentante du parquet tranche : Mirsat a dérobé les extincteurs à l’insu de leur propriétaire sur un terrain privé dans le but d’en tirer un bénéfice. Idem pour le deuxième fait, selon elle. «Je ne crois pas qu’il ne savait pas qu’il ne fallait pas les prendre.» La magistrate a demandé au tribunal de retenir l’infraction de vol simple à l’encontre des deux prévenus et a requis une peine de 9 mois de prison ainsi qu’une amende appropriée et du travail d’intérêt général à l’encontre du cousin de Mirsad.

«Personne ne demande réparation. Aucune des deux entreprises ne s’est portée partie civile», a constaté l’avocat des cousins. «L’entreprise à laquelle ils ont pris les cadres de fenêtres a reconnu devant la police n’avoir subi aucun préjudice étant donné qu’il s’agissait uniquement de déchets.» L’homme de loi s’appuie sur un jugement de 2023 qui statue que les choses abandonnées ne sont pas à considérer comme des choses appartenant à autrui pour contester les vols. «Sans préjudice, il ne peut y avoir d’infraction», poursuit-il. «Mirsad est fils de ferrailleur. Il a l’habitude d’aller chercher des objets abandonnés auprès des entreprises.»

Certain d’être dans son bon droit, Mirsad, images à l’appui, ne se serait pas caché et aurait pris son temps pour charger les extincteurs dont son avocat conteste le nombre déclaré par l’entreprise ainsi que la valeur. «Le préjudice n’est pas prouvé. À trois reprises, il se rend sur le site et repart sans rien.» «Les extincteurs étaient trop remplis ou pas assez détériorés. Ce n’étaient pas des déchets pour moi», souligne le prévenu.

L’avocat demande à ce que les deux cousins soient acquittés du vol de cadres de fenêtres et à ce que Mirsad puisse bénéficier d’un large sursis et d’une peine plus courte si le tribunal arrivait à la conclusion que les extincteurs ont bien été volés. Donc qu’il ne s’agissait pas de déchets.

Le prononcé est fixé au 25 avril prochain.