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Viols : le père condamné à 12 ans de réclusion


À la barre, le père avait contesté avoir violé ses filles. D'après lui, elles avaient inventé cette histoire après qu'elles n'eurent pas réussi à le tuer en 2012 aux Philippines... (Photo : archives lq)

Le sexagénaire était poursuivi pour avoir abusé de ses trois filles au Luxembourg et aux Philippines entre 2006 et 2012. Sa peine est assortie d’un sursis de quatre ans.

«Je ne veux pas me souvenir de tout cela.» Les larmes avaient coulé à flots dans la petite salle d’audience. À la barre, les trois sœurs (32 ans, 26 ans, et 24 ans) qui accusent leur père, âgé aujourd’hui de 62 ans, de les avoir violées pendant de longues années. La cadette avait littéralement éclaté en sanglots au moment d’aborder les faits dont elle racontait avoir été victime en 2008 : «C’était un jour où j’étais malade… J’ai crié. Mais à la maison il n’y avait personne. Il a commencé avec les attouchements…»

C’est l’aînée du trio qui avait fini par porter plainte au printemps 2012 au Luxembourg. Elle situait le premier fait à l’été 2006, soit quelques mois après son arrivée au Grand-Duché. À l’époque, elle avait quitté avec ses deux sœurs et son frère les Philippines pour rejoindre leur père qui avait refait sa vie au Luxembourg. Le but était qu’ils aient une «meilleure vie». Comme elle était majeure, elle en aurait profité pour suivre des cours de langue. Et son frère et ses sœurs, aussi, pour pouvoir aller à l’école. Mais très vite cette «meilleure vie» aurait chaviré. À l’âge de 19 ans, alors que sa belle-mère était partie avec ses deux sœurs en Belgique, son père en aurait profité pour la violer. Ce n’aurait été que le début d’une longue série d’autres abus.

Face aux juges, le sexagénaire avait parlé d’«accusations infondées». Il avait affirmé avoir travaillé toute sa vie pour payer l’éducation de ses enfants, puis une maison de plus de 100000 euros aux Philippines. Mais ses filles, toutes étudiantes alors, l’auraient accusé de dépenser leurs bourses Cedies.

D’après lui, l’histoire des viols avait été inventée à la suite de la tentative de parricide… Lors de l’instruction et l’analyse des échanges SMS, les enquêteurs avaient découvert que les filles avaient engagé un tueur à gages pour liquider leur père aux Philippines. C’était en mai 2012, juste avant que l’aînée du trio ne porte plainte pour viols à la police à Esch et ne s’adresse à une assistante sociale. «Quand le complot a échoué, elles ont opté pour une autre solution. Le parricide manqué a fait naître le viol», avait plaidé Me Roby Schons.

Les sœurs se voient allouer 30 000 euros

Mais les déclarations du prévenu chez le juge d’instruction, où il avait parlé de relations consenties avec l’aînée, n’étaient pas tombées dans l’oubli. À l’issue de cinq jours de débats, la parquetière avait qualifié les déclarations des trois sœurs de crédibles : «Il n’y a aucun intérêt pour elles d’inventer les abus.» Évoquant la tentative de suicide ainsi que les deux avortements de l’aînée, elle avait parlé de faits particulièrement graves. Et d’appuyer : «Le père qui devait être leur personne de confiance a finalement détruit leur vie.»

Si le parquet avait requis 18 ans de réclusions contre le père, la 13e chambre criminelle est restée en dessous de ces réquisitions. Mercredi après-midi, elle l’a en effet condamné à douze ans de réclusion, dont quatre ans avec sursis. Les juges ont retenu qu’il y avait dépassement du délai raisonnable. Les trois filles se voient allouer respectivement 15 000, 10 000 et 5000 euros de dommages et intérêts. À cela s’ajoute une indemnité de procédure à hauteur de 500 euros pour chacune.

Le sexagénaire a 40 jours pour interjeter appel. À noter que l’affaire de la tentative de parricide fait l’objet d’une autre procédure. Si cette dernière aboutit, ce sont les sœurs qui se retrouveront sur le banc des prévenus. À l’ouverture du procès du père, Me Schons avait demandé que les deux affaires soient jugées en même temps. Cela serait «dans l’intérêt de son client». Mais la 13e chambre criminelle en a décidé autrement. Elle avait même estimé que les deux affaires devaient être jugées par deux compositions différentes. Car les sœurs entendues comme témoins dans le premier procès risquent de se retrouver sur le banc des prévenus dans le second. Et inversement pour le père.

Fabienne Armborst

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