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Viols : huit ans de réclusion requis contre le frère


Les faits sur lesquels se penchait la 13e chambre criminelle s'étirent sur plusieurs années. Les premiers remontent à l'année 2009. (photo lq)

Poursuivi pour avoir abusé pendant des années de sa propre sœur, un trentenaire était convoqué mardi devant la chambre criminelle à Luxembourg. Les premiers faits reprochés au prévenu remontent à l’année 2009. À l’époque, il avait 22 ans, sa sœur en avait 20.

«C’est un dossier extrêmement grave. Le frère devait être une personne de confiance et avoir un rôle protecteur pour sa petite sœur, mais il a abusé d’elle…», récapitulait, mardi matin, la représentante du parquet. Les faits sur lesquels se penchait la 13e chambre criminelle s’étirent sur plusieurs années. Si les premiers remontent à l’année 2009, il a fallu attendre début juin 2017 pour que la jeune femme trouve le courage de porter plainte. C’est à l’occasion d’une dispute lors de laquelle il aurait exigé d’elle de faire le ménage et le repassage qu’elle avait craqué. Elle avait confié avoir été, depuis l’âge de 20 ans, régulièrement violée chez eux dans le sud du pays. Entre deux et trois fois par semaine, elle aurait fait ce que son frère lui demandait. «À cause de son caractère soumis, elle n’avait pas la force de s’opposer au comportement tyrannique de son frère», a ainsi retenu l’expert, chargé d’examiner la cadette, dans son rapport.

Des SMS, son frère lui en avait envoyé un paquet. Qu’il s’agisse de lui rapporter quelque chose à manger – «Ramène-moi un hamburger de la kermesse» – ou d’assouvir ses besoins sexuels… souvent elle n’avait pas d’autre choix que de céder à ses exigences.

À la barre, mardi, la jeune femme, âgée aujourd’hui de 29 ans, a une nouvelle fois fait le récit de son calvaire. Son audition a eu lieu à huis clos. La chambre criminelle n’aura toutefois pas pu entendre son frère, âgé aujourd’hui de 32 ans.

Le prévenu ne s’est en effet pas présenté à son procès. Il ne s’était pas non plus fait représenter par un avocat. Sa mère, appelée comme témoin, a informé les juges qu’il était bien à la maison, mais qu’il ne comptait pas venir et que depuis l’annonce du procès il s’était remis à boire.

Elle-même déclare ne jamais avoir remarqué quoi que ce soit entre son fils et sa fille : «Je n’ai été au courant de rien, je n’ai jamais rien vu. Je travaillais toute la journée.» Par la suite, elle n’aurait pas non plus incité sa fille à retirer sa plainte. Toujours selon la mère, la fille était toujours ivre et bourrée de médicaments à la maison. Son fils, quant à lui, était plus calme, selon elle. «Mais il a atterri avec une cirrhose à l’hôpital», l’a coupée court la présidente.

C’est finalement à travers le rapport d’expertise du psychiatre, qui déclare le prévenu totalement responsable de ses actes, que quelques éléments sur sa position auront filtré : «Il reconnaît les relations sexuelles avec sa sœur. Mais il écarte toute pression physique ou morale. Selon lui, elle était consentante dès le début.»

«Pas aujourd’hui, mais demain…»

Si le prévenu écarte toute tyrannie, pour le parquet, l’absence de consentement est clairement établie. C’est parce qu’elle avait peur que la sœur a tardé à porter plainte. «Elle nous a décrit son frère comme une personne agressive. Dans le dossier, il y a une ribambelle de SMS qui prouvent que ce qu’elle déclare est vrai», a argué la parquetière. Un SMS de réponse contenant les mots «Pas aujourd’hui, mais demain» ne serait pas à considérer comme un consentement, mais comme une manière de gagner du temps. Enfin, du dossier il ressort qu’à partir de 2015 le frère filait de l’argent à sa sœur. «Une façon, selon le parquet, de la faire venir» et «qui lui aurait permis de financer son addiction».

Aujourd’hui, la jeune femme n’a plus aucun contact avec son frère. Elle ne vit plus à la maison et est suivie psychologiquement par le Service central d’assistance sociale (SCAS). Assistée d’une avocate, elle s’est constituée partie civile. Elle réclame 5000 euros de dommages et intérêts.

Le parquet, pour sa part, a requis huit ans de réclusion contre le trentenaire. «Même s’il ne trouve pas utile de venir au tribunal, il doit assumer ses responsabilités. Il doit être condamné», a estimé sa représentante. Comme il était absent à son procès, il ne pourra bénéficier d’aucun sursis. Prononcé le 29 mai.

Fabienne Armborst