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Viol sur mineur : «Je n’ai rien fait qu’il ne voulait pas», se défend l’ex-curé de Belair


Le prêtre encourt jusqu'à un an de prison et une amende de 3.000 euros (photo illustration AFP)

Vendredi à la barre, le curé de Belair suspendu de ses fonctions a tenté de convaincre les juges que c’est l’adolescent qui lui avait fait des avances en 2008.

Depuis le début du procès de l’ancien curé de Belair mardi, une quinzaine de témoins ont été entendus. Vendredi, au quatrième jour, c’était au tour du prévenu Emile A. (59 ans) poursuivi pour viol sur un mineur de 14 ans de s’expliquer. Alors que ce dernier avait affirmé que l’initiative venait du curé, le quinquagénaire prétend tout le contraire.

« Je conteste lui avoir fait une fellation. Il m’en a fait une. » Voilà la dernière version du prévenu Emile A., vendredi matin. À la barre, le prévenu poursuivi pour viol a contesté avoir aguiché l’adolescent de 14 ans. Dès le voyage dans le bus vers Taizé, c’est ce dernier qui aurait été l’auteur d’un « comportement ambigu ». L’homme d’Église conteste avoir pris sa main dans le bus. « On n’était pas assis côte à côte. Il y avait le couloir entre nous deux », se justifie-t-il.

Selon le prévenu, c’est également l’adolescent qui avait essayé de l’embrasser dans la crypte quand la lumière s’était éteinte. « À l’époque, vous aviez 52  ans et le garçon 14  ans. Admettons que l’adolescent aurait fait cela. Pourquoi avez-vous vu des insinuations sexuelles ?», le coupe la présidente de la 13 e  chambre criminelle.

« Ce n’était pas un petit garçon. Il savait exactement ce qu’il voulait », rétorque Emile A. La présidente ne le lâche pas aussitôt  : « Pourquoi percevez-vous cela comme une provocation sexuelle pour vous?» «J’aurais dû tirer le frein , reprend l’ancien curé qui dit voir les choses différemment avec le recul. En 2008, j’étais à bout de forces, après 25  ans en fonction. »

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À Taizé dans la maison d’hôtes, le curé s’était retrouvé avec l’adolescent de 14  ans dans la même chambre pendant deux nuits. « J’ai fait tout mon possible pour l’éviter. Personne ne le voulait dans sa chambre », se défend-il. Après le dîner, quand il était sorti de la salle de bains en pyjama, c’est de nouveau l’adolescent qui se serait approché de lui  : « Il y a eu masturbation, rien de plus .» « Et vous ne pouviez pas vous défendre? », intervient la présidente. Le prévenu  : « La raison m’a abandonné. »

Quand la présidente lui demande s’il n’aurait pas dû être sur ses gardes après avoir constaté les gestes précédents de l’adolescent, il répond  : « Vous êtes une bonne philosophe! » Dans la foulé, il rappelle qu’il n’a jamais eu de problèmes avec les 1  000  adolescents avec qui il a déjà travaillé. Un autre signe, selon lui, que ce n’est pas lui qui a aguiché l’adolescent à Taizé.

«Il en est désormais à sa sixième version»

« Je me suis mal comporté, ça c’est vrai », finit par concéder l’homme d’Église. « Et le deuxième soir, vous n’avez de nouveau pas pu vous défendre contre le garçon de 14  ans? », enchaîne la présidente.

« C’est mal exprimé. Je n’étais pas sa victime. Et il n’était pas ma victime. Cela s’est fait dans le consentement. Je n’ai rien fait qu’il ne voulait pas », tente de convaincre le quinquagénaire le tribunal.

Pour rappel, le parquet reproche au prévenu d’avoir commis un viol sur le mineur de 14  ans. Les attentats à la pudeur, quant à eux, sont prescrits. Y a-t-il eu fellation et dans quelles circonstances ce rapport a-t-il eu lieu? C’est la question sur laquelle se penche aujourd’hui la chambre criminelle.

Au cours de l’instruction, l’homme d’Église a changé plus d’une fois sa version. Lors de sa première audition à la police judiciaire, il a indiqué avoir refoulé l’épisode et ne pas s’en souvenir. Le lendemain au juge d’instruction, il a reconnu  le rapport sexuel oral. Face à l’expert en psychiatrie, il a contesté avoir fait une fellation, mais il disait ne pas se souvenir si l’adolescent lui en a fait une.

Vendredi, il a fini par reconnaître que l’adolescent lui en avait bien fait une. « Il en est désormais à sa sixième version », récapitule M e Albert Rodesch, l’avocat de la partie civile. Tandis que la représentante du parquet ne manque pas de retenir  : « Aujourd’hui, il fait un aveu pour dire qu’il y a eu pénétration orale –  le pénis du curé était dans la bouche de l’adolescent .»

En toute fin de l’audience, l’homme d’Église a indiqué vouloir s’excuser pour ce qu’il a fait. Quelques instants plus tôt, il avait dit l’avoir déjà fait en 2013. Le procès se poursuit mardi matin, à 9  h, avec les plaidoiries de la partie civile et de la défense ainsi que le réquisitoire du parquet.

Fabienne Armborst

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