Comme chaque mardi de Pentecôte, la procession dansante d’Echternach a rassemblé de nombreux pèlerins venus rendre hommage à saint Willibrord.
La pluie est battante et le ciel gris. Les parapluies et coupe-vent sont de sortie. Mais cela n’empêche pas les nombreux pèlerins de se retrouver pour danser tous ensemble. En ce mardi de Pentecôte, ils ont rendez-vous dans la basilique où se trouve le tombeau de saint Willibrord et dans les rues d’Echternach, dans l’est du pays, pour la procession dansante. «Je perpétue la tradition que je connais depuis petite. Je viens depuis plus de 34 ans et cette fois, avec mes deux filles» indique Stéphanie, à la sortie de la basilique.
Il faut dire que cette tradition, vieille de plus de 1 000 ans, est inscrite depuis 2010 sur la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité de l’Unesco. «Au départ, c’était pour les malades, rappelle Germaine. Mais maintenant, c’est plus pour la fête et le moment passé ensemble.»
En effet, chaque année, ce sont entre 12 000 et 14 000 personnes qui se retrouvent dans la petite ville pour célébrer saint Willibrord. Fondateur de l’abbaye d’Echternach, ce moine bénédictin anglo-saxon aurait eu un don pour guérir des maladies. Les pèlerins viennent de tout le Luxembourg, d’Allemagne, de France, mais aussi de Belgique et des Pays-Bas. «Je viens pour la première fois, c’est incroyable», s’émerveille une Néerlandaise qui a fait le déplacement pour danser dans les rues et s’amuser avec les pèlerins.
«Si tu la fais une fois, tu as envie de revenir»
Divisés en groupe, les danseurs se déplacent alignés par cinq en se tenant par des mouchoirs en tissu. Ils sont accompagnés dans chaque groupe d’un orchestre d’harmonie qui joue une mélodie simple et entraînante. D’un pied sur l’autre, de gauche à droite, les pèlerins se balancent sur le rythme de la musique et avancent progressivement dans les rues de la ville.
Ils poursuivent ensuite leur route jusque dans la basilique. Les personnes qui se rendent à la procession sont normalement tout de blanc vêtu, mais sous la pluie qui se fait forte, les téméraires en chemise claire ou t-shirt sont rares et les coupe-vent de toutes les couleurs sont nombreux.
(Vidéo : Camille Vari)
Carola Molitoi est, elle, originaire d’Allemagne. Depuis ses 10 ans, elle se rend chaque année à la procession. «Les années où je n’ai pas pu venir, parce que je n’habitais plus dans la région, ça m’a beaucoup manqué. Si tu la fais une fois, tu as envie de revenir chaque année. C’est amusant, tu croises toujours des gens que tu connais.» Elle affirme que cet endroit et ce moment sont «uniques au monde».
Il s’agit aussi d’un instant «très spirituel, où l’on apprend des choses sur soi-même», note l’Allemande. Accompagnée de son groupe, les pèlerins d’Eifel, ils ont fait le déplacement à pied depuis Prüm, soit une soixantaine de kilomètres à l’est de la frontière. «Nous avons marché depuis dimanche jusqu’à aujourd’hui. Là, on a fini et on est complètement finis, rigole Carola. On est mouillés, transpirants, on a faim et on a soif, mais c’est un évènement !»
Une tradition inscrite dans la culture
Pour les croyants ou non, cette tradition est importante. «Si on habite ici, ce moment appartient à la culture. Les enfants n’ont pas école, ils sont libérés», explique Stéphanie. Elle aussi a pu obtenir un congé pour profiter pleinement de l’évènement et «célébrer le fait d’être ensemble».
«Je ne suis pas croyante. On vient ici pour la musique. Avec la fanfare, on va manger ensemble après», rapporte Diane, musicienne. Les plus jeunes sont nombreux dans les rues, conduits par leurs parents ou les enseignants des écoles voisines. Les enfants s’appliquent à bien réaliser la danse sautant de pied en pied dans les rues remplies d’eau.
Un peu plus loin attendent les groupes qui défileront ensuite. Parmi eux, des musiciens qui, sous la pluie depuis plusieurs heures, s’inquiètent de l’état de leurs instruments à bois. Un trompettiste vide l’eau qui est rentrée par le haut de son instrument. «Les bois n’aiment pas la pluie, confirme Diane. Aujourd’hui, j’ai pris un saxophone plus âgé pour ne pas l’abîmer, mais j’ai quand même mis une protection dessus.»
Nombreux sont les membres des fanfares habillés de ponchos de pluie pour tenter de couvrir leur instrument. «Je n’ai pas compté combien de fois on a joué la mélodie, mais je dirais au moins 10 ou 15 fois sur tout le parcours», s’amuse Diane, captivée par la musique. La saxophoniste vient depuis sept ans déjà, mais n’hésitera pas à revenir encore dans les années à venir !