Une agression violente recensée chaque mois depuis novembre, et bien d’autres non rapportées : voilà à quoi sont confrontés les conducteurs de bus qui sillonnent le pays. Les syndicats dénoncent un climat de tension qui s’aggrave et réclament des mesures d’urgence.
La dernière date du 29 mars. C’était boulevard Roosevelt à Luxembourg, en plein après-midi : un chauffeur de bus menacé, mordu, puis roué de coups. Une agression qui s’ajoute à la longue liste des violences subies ces derniers mois par les conducteurs de bus du pays. Tous décrivent des conditions de travail qui se dégradent et un climat de plus en plus tendu.
«Certains ont peur, paniquent à l’idée d’aller au travail. Une psychose s’installe», rapporte ainsi Paul Glouchitski, responsable de la coordination Transport au LCGB, syndicat majoritaire dans le secteur.
«Ce qui est inquiétant, c’est que non seulement les agressions s’enchaînent, mais la violence s’accentue», insiste-t-il, expliquant que même les caméras de surveillance, déjà installées dans les bus des réseaux TICE et AVL, n’ont plus rien de dissuasif. «Un cap est désormais franchi, on n’a jamais vu ça au Luxembourg. Les caméras n’empêchent plus les passages à l’acte, elles servent a posteriori pour identifier les coupables.»
Une situation intenable que confirme l’OGBL : «Les statistiques dont on dispose sont très loin de la réalité car la plupart des victimes ne déclarent pas les violences si elles ne sont pas physiques», explique Sveinn Graas, secrétaire central du syndicat Transport sur route. «Les chauffeurs sont stressés, avec le sentiment que leur métier n’est pas apprécié par la société», poursuit-il.
Deux tendances se dégagent toutefois du peu de chiffres disponibles : les agressions se produisent indifféremment le jour ou la nuit, et certaines lignes – communales comme nationales – desservant des endroits sensibles sont beaucoup plus exposées que d’autres.
«Les alentours des gares sont particulièrement concernés, que ce soit à Esch-sur-Alzette, Luxembourg ou Ettelbruck. Le quartier du Kirchberg aussi», poursuit Paul Glouchitski. «Nos délégués nous disent que le personnel féminin est maintenant écarté des lignes problématiques.»
Des agents de sécurité aux endroits sensibles
Alors que la question de la sécurité des chauffeurs de bus est un serpent de mer, les syndicats sont unanimes : il devient urgent d’agir, alors qu’au moins une agression violente a eu lieu chaque mois depuis novembre. Le LCGB pousse le gouvernement et la Fédération luxembourgeoise des exploitants d’autobus et d’autocars à accélérer le déploiement de mesures discutées ensemble, dont l’installation de cabines sécurisées.
Une solution qui existe dans d’autres pays et que les autorités ont accueilli favorablement lors du dernier comité de pilotage Sécurité dans les transports publics en novembre dernier : «Comme cela prendra du temps, on plaide pour des agents de sécurité postés à des points stratégiques, aux abords des gares, passages de frontières, et parkings, comme le P&R de Rodange, à l’image de ce qui se fait aux CFL», ajoute-t-il.
Un dispositif soutenu aussi par l’OGBL, qui aimerait aller plus loin, avec un concept global et un véritable plan dédié à la sécurité pour toutes les entreprises du secteur : «Il devra faciliter les rapports d’incidents et permettre un soutien immédiat du chauffeur victime, au niveau psychologique et juridique», détaille Sveinn Graas.
Car pour le moment, il n’y a pas de ligne commune, chaque société ayant sa propre façon de traiter les agressions de ses chauffeurs, quitte parfois à les mettre sous pression : «On nous a rapporté des cas dans lesquels, après une agression jugée peu violente, l’employé a été contraint de finir sa journée de travail malgré tout.»
L’administration des Transports publics, que le LCGB a rencontré en urgence le 11 mars, a confirmé que les cabines antiagression seront bien implémentées, et que les futurs véhicules destinés au réseau RGTR seront équipés de caméras de surveillance. En parallèle, une discussion va être menée avec le ministre pour étudier la possibilité d’engager des agents de sécurité sur certaines lignes ou à des endroits et horaires ciblés.
Des avancées positives, alors que les syndicats rappellent que tout ne peut pas venir du gouvernement : le code du travail impose aux employeurs de garantir la sécurité et la santé de leur personnel.
Une appli pour recenser les agressions
Promise par les autorités pour cet été, une application devrait être lancée pour permettre aux chauffeurs de bus de déclarer facilement tout incident rencontré durant leur service. Très attendue par les syndicats du secteur, cette procédure simplifiée permettra d’avoir une idée plus fidèle à la réalité de l’ampleur du phénomène de la violence dans les transports en commun et donc de peser dans les discussions pour la mise en œuvre de mesures efficaces.
Le chauffeur ne doit plus contrôler les tickets et rendre la monnaie avec le transport public gratuit, on pourrait donc bien fermer l‘accès au chauffeur?