Accueil | A la Une | Une «sphère de sécurité» pour débloquer le télétravail transfrontalier?

Une «sphère de sécurité» pour débloquer le télétravail transfrontalier?


Le télétravail s'est imposé comme un critère décisif d'attractivité pour les entreprises luxembourgeoises.

Face à l’essoufflement des flux frontaliers et aux difficultés de recrutement, l’UEL dévoile un plan : autoriser jusqu’à 25 % de télétravail sans complications fiscales, puis créer un portail unique pour simplifier toute l’administration transfrontalière.

L’Union des Entreprises Luxembourgeoises (UEL) propose la création d’une «sphère de sécurité» alignée sur le seuil de 25 % déjà reconnu par la législation européenne en matière de Sécurité sociale. Cette mesure permettrait d’offrir aux salariés frontaliers la possibilité de télétravailler un quart de leur temps en toute neutralité fiscale et sociale.

Concrètement, les employeurs qui le jugent opportun pourraient proposer jusqu’à 25 % de télétravail à leurs salariés frontaliers sans craindre de créer un «établissement stable à l’étranger» ou de se heurter à des complications administratives.

«Cette proposition répond à la fois aux besoins des entreprises et à ceux des salariés, tout en assurant un équilibre entre secteurs d’activité, statuts des salariés et pays impliqués», expliquent Gwendoline Berger et Laura Bacharzyna, auteures du communiqué de l’UEL détaillant cette proposition.

Celle-ci intervient dans un contexte de plus en plus tendu pour les employeurs luxembourgeois. Près d’une entreprise sur deux déclare avoir récemment perdu un candidat faute de flexibilité en matière de télétravail, révèle ainsi l’UEL.

Un constat qui fait écho aux difficultés de recrutement largement documentées dernièrement : selon le Guide des Salaires 2026 publié par le cabinet Robert Half (dont nous faisions l’écho le 6 novembre dernier), 67 % des entreprises sont prêtes à offrir une rémunération plus élevée pour des compétences spécialisées, mais ces profils recherchés exigent désormais bien plus que le salaire luxembourgeois.

Le télétravail, imposé pendant la pandémie, s’est en effet imposé comme un élément central de l’organisation du travail et un critère décisif d’attractivité. Or, le Luxembourg accuse un retard : les contraintes réglementaires actuelles empêchent les entreprises de répondre à cette attente, particulièrement pour les métiers télétravaillables qui représentent une part croissante du marché de l’emploi luxembourgeois.

D’autant que les flux frontaliers donnent des signes d’essoufflement préoccupants. Pour la première fois en 2024, le nombre de frontaliers belges et allemands a diminué, après des décennies de croissance ininterrompue.

Du côté français, les projections d’atteindre 300 000 frontaliers lorrains en 2040 semblent désormais bien lointaines, tandis que 56 % des frontaliers présents il y a onze ans sur le territoire grand-ducal sont depuis rentrés dans leur pays de résidence, comme le révélaient des universitaires à Metz.

Vers un portail unique?

Au-delà de cette première étape des 25 % de télétravail, l’UEL dévoile une autre vision plus ambitieuse : la création d’un portail digital déclaratif unique, un «one-stop-shop», qui centraliserait toutes les démarches administratives liées au travail, à la fiscalité et à la Sécurité sociale pour les employeurs de la Grande Région.

Ce portail dédié simplifierait l’intégration socio-économique transfrontalière en améliorant «la fluidité des échanges économiques, la mobilité des travailleurs et la prestation de services transfrontaliers», explique le patronat. L’objectif : exploiter pleinement les opportunités de l’écosystème transfrontalier pour dynamiser l’activité économique dans la Grande Région.

Cette approche globale s’inscrit dans la lignée des recommandations formulées en mars 2025 par le Parlement Benelux et vise à construire un véritable «espace économique et de travail transfrontalier étendu, interconnecté et simplifié».

«Il est aujourd’hui essentiel que le Luxembourg prenne l’initiative de moderniser le cadre du télétravail transfrontalier en instaurant une solution pérenne, équilibrée et avantageuse pour tous», martèle l’UEL.

La mise en œuvre de cette «sphère de sécurité» offrirait aux entreprises la possibilité de renforcer leur compétitivité, de répondre aux attentes de leurs salariés et de contribuer à la pérennité économique du pays ainsi que de la Grande Région.

Pour le patronat, l’urgence est ici claire : dans un contexte où le marché du travail devient «de plus en plus sélectif» et où le salaire luxembourgeois ne suffit plus à lui seul à attirer les talents (pour rappel, seuls 44 % des frontaliers choisissent désormais le Luxembourg pour des raisons salariales, selon le LISER), la flexibilité du télétravail pourrait faire la différence.

«La Grande-Région constitue un véritable laboratoire européen, mettant concrètement en œuvre les libertés fondamentales de la construction européenne. Il est temps de poser les prochains jalons», conclut l’UEL, qui appelle le gouvernement luxembourgeois à prendre rapidement les devants sur ce dossier stratégique pour l’attractivité du pays.

Newsletter du Quotidien

Inscrivez-vous à notre newsletter et recevez tous les jours notre sélection de l'actualité.

En cliquant sur "Je m'inscris" vous acceptez de recevoir les newsletters du Quotidien ainsi que les conditions d'utilisation et la politique de protection des données personnelles conformément au RGPD .