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Une rentrée scolaire sur fond de malaise des enseignants


Les représentants syndicaux du SEW/OGBL n'ont pas épargné la politique menée en matière d’enseignement par le gouvernement. (Photo : hervé montaigu)

Alphabétisation bâclée, inclusion ratée, chute des résultats au bac, malaise des enseignants… Le tableau dressé par les représentants des enseignants est bien noir.

Écoliers et lycéens ne sont, semble-t-il, pas les seuls à ne pas être pressés de retrouver les salles de classe. Certains de leurs enseignants non plus, selon leurs représentants syndicaux du SEW/OGBL. Les plus jeunes cherchent même des pistes de reconversion professionnelle. À la base de cette désaffection de plus en plus marquée pour la profession, des ressources manquantes, une mauvaise transposition de l’inclusion, des réformes de plus en plus nombreuses, une infantilisation des enseignants ou des problèmes de gouvernance au sein de certaines directions.

«Les conséquences de ce malaise des enseignants sont alarmantes», témoigne Joëlle Damé. «Or nous avons besoin d’enseignants en bonne santé et forts pour une école publique et des étudiants forts.» Le syndicat, lors de sa traditionnelle conférence de presse avant la rentrée scolaire a, comme chaque année, critiqué la politique menée par le ministère de l’Éducation nationale. Plus particulièrement sa manière d’envisager l’inclusion et l’alphabétisation des élèves, avant de présenter sa manière de voir les choses.

Au fondamental d’abord. «Le contingent d’enseignants doit être adapté aux besoins, le ministre doit s’entretenir de manière critique avec les enseignants au lieu de se contenter de campagnes de communication sur les réseaux sociaux, les enseignants et les personnes du terrain doivent être (associées) aux discussions stratégiques concernant l’inclusion, une base de données sur les enfants à besoins spécifiques doit être créée, et du personnel spécialisé doit être présent dans les écoles…», énumère la présidente du syndicat.

Des lacunes irrattrapables

La liste est longue. S’y ajoute celle des revendications pour le secondaire. Plus courte, elle n’en est pas moins importante. Que ce soit en matière de lecture ou d’écoles internationales, le Luxembourg est le plus mauvais élève de l’OCDE. Tout en bas du tableau même. La faute notamment aux écrans ainsi qu’à un mode de notation qui bénéficie aux mauvais élèves et ne trompe plus les universités qui, de plus en plus, font des tests d’admission plutôt que de se fier aux diplômes.

Un phénomène qui commencerait également à apparaitre dans l’enseignement secondaire traditionnel, pourtant plus strict. «Les réformes actuelles semblent viser à exiger de moins en moins d’efforts de la part des élèves. Tout va bien du moment que personne ne redouble, que tout le monde est content et a un diplôme», regrette Vera Dockendorf. «Malgré des notes catastrophiques, les élèves passent sans problème de la 7e à la 5e année d’enseignement général. Ils payent la note à l’issue de la 5e, mais c’est déjà trop tard.» Les lacunes sont irrattrapables.

«Nous devons revoir les critères de promotion à la hausse pour pouvoir exiger un effort constant de la part des élèves», ajoute-t-elle en rappelant le marché du travail très compétitif au Grand-Duché. Le taux de réussite au bac dans cette filière (66 %, contre 98 % pour les écoles européennes et 83 % au classique) est en forte baisse, conséquence du «laxisme» dénoncé par le syndicat. «Ce n’est pas seulement dû à la pandémie», poursuit-elle, incriminant la réforme du cycle inférieur de 2018. «La base manque aux lycéens.»

«Urgence artificielle»

Les diplômes doivent être mérités, pas offerts en cadeau, selon Vera Dockendorf qui regrette l’absence de données concernant le passage des élèves en études supérieures et leur taux de réussite. «Ces données sont importantes pour comprendre comment adapter ou améliorer notre enseignement.» Elle plaide pour un retour à un système scolaire plus sévère et mieux pensé que ces dernières années. Un système pour toutes les classes sociales, libéré de ces incohérences ou n’en créant pas de nouvelles, comme cela risque d’être le cas avec l’alphabétisation en français.

«Ce n’est pas un moyen vers plus d’équité. Tout au plus un petit levier pour certains enfants francophones ou lusophones dont les parents ont un statut socioéconomique moyen ou supérieur. Pour les autres, ce n’est pas une solution», prévient Joëlle Damé. Elle dénonce une «urgence artificielle» créée par le ministère sans véritable étude d’impact préalable, et pointe les incohérences prévisibles lors du choix d’orientation des élèves.

Bref, cette année encore pour le syndicat, Claude Meisch, ministre de l’Éducation nationale, peut mieux faire, doit revoir sa copie et approfondir sa connaissance du monde de l’enseignement.

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