L’énorme fraude fiscale baptisée « cum ex », révélée en Allemagne, a coûté 55 milliards d’euros à une dizaine de pays européens, soit bien plus que les évaluations initiales, affirment 19 médias jeudi dans une enquête conjointe.
Jusqu’à présent, circulaient uniquement les estimations des sommes extorquées au fisc allemand, allant d’environ 30 milliards d’euros selon la presse à 5,3 milliards selon le ministère allemand des Finances. Mais les investigations de 19 médias européens, dont le Monde, concluent que le « cum ex » a coûté 55,2 milliards d’euros à 11 États, soit l’Allemagne, la France, l’Espagne, l’Italie, les Pays-Nas, le Danemark, la Belgique, l’Autriche, la Finlande, la Norvège et la Suisse.
Ce montage litigieux attribué à un avocat allemand de renom, Hanno Berger, consiste à acheter et revendre des actions autour du jour de versement du dividende, si vite que l’administration fiscale n’identifie plus le véritable propriétaire. La manipulation, qui nécessite l’entente de plusieurs investisseurs, permet de revendiquer plusieurs fois le remboursement du même impôt sur le dividende, lésant ainsi le fisc.
17 milliards à la France
L’affaire a éclaté en 2012 en Allemagne, entraînant l’ouverture de six enquêtes pénales et la tenue prochaine d’un premier procès à Wiesbaden, dans l’ouest, visant Hanno Berger et plusieurs négociants en Bourse. Sur la foi « d’informations des autorités fiscales et d’analyses des données de marchés », l’enquête conjointe des 19 médias détaille désormais le préjudice supposé par pays. Pour l’Allemagne, l’enquête reprend la fourchette haute des estimations, soit 31,8 millions d’euros extorqués au fil, d’après les calculs déjà connus de Christoph Spengel, spécialiste de fiscalité à l’université de Mannheim.
L’escroquerie aurait aussi coûté « au moins 17 milliards d’euros » à la France, 4,5 milliards à l’Italie, 1,7 milliard au Danemark et 201 millions d’euros à la Belgique.
LQ/AFP