Les chefs d’Etat et de gouvernement de l’UE pourraient faire un petit geste en direction du Royaume-Uni au cours d’un sommet européen jeudi et vendredi à Bruxelles afin de débloquer les négociations du Brexit.
Les Européens devraient dans un premier temps constater que les progrès enregistrés avec Londres sur les modalités du divorce sont encore insuffisants pour passer à une deuxième phase de négociation sur la future relation commerciale, renvoyant cette décision à décembre.
Mais en gage de leur bonne volonté, ils pourraient quand même décider, selon un projet de conclusions du sommet, d’engager des « discussions préparatoires internes » sur cette future relation « afin d’être totalement prêts » quand débuteront les premiers pourparlers.
« Le but est d’être un peu plus positifs, de montrer à Londres qu’on n’est pas totalement fermés », explique une source diplomatique à l’AFP. « Mais sur le fond, ça ne change rien », nuance-t-elle.
L’UE exige, avant de passer à toute discussion approfondie, d’avoir enregistré des « progrès suffisants » dans trois dossiers prioritaires: le règlement financier du divorce, le sort des expatriés et les conséquences du Brexit pour l’Irlande.
La question des engagements financiers du Royaume-Uni envers l’UE pose particulièrement problème faute « d’engagement ferme et concret » de sa part, relèvent les Européens dans leur projet de conclusions — qui peut encore évoluer.
Ils doivent payer
A l’issue d’un cinquième round de discussions sur le Brexit, conclu jeudi sans avancées majeures, le négociateur en chef des Européens, Michel Barnier, avait même déploré « une impasse préoccupante » sur le sujet.
Bruxelles estime officieusement le montant de la facture compris entre 60 et 100 milliards d’euros. « Ils doivent payer », a martelé vendredi le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker, accentuant la pression sur le Royaume-Uni.
« Lorsqu’on a l’impression que le partenaire britannique n’est pas solide sur une position de négociation, cela rend les choses compliquées », a pour sa part souligné le Premier ministre belge, Charles Michel, dans une interview samedi au quotidien Le Soir, demandant aux Britanniques « de faire au plus vite la clarté entre eux ».
Dans un tel climat, même un petit pas en avant, comme celui que les Européens s’apprêtent à faire, apparaît important à Bruxelles pour éviter le scénario d’un Brexit « sans accord » au soir du 29 mars 2019, quand le Royaume-Uni est supposé quitter l’UE.
Cette discussion cruciale sur le Brexit est prévue vendredi matin après le petit-déjeuner, sans la Première ministre britannique Theresa May. Mais les chefs d’Etat et de gouvernement doivent se réunir à 28 dès jeudi pour parler entre autres d’économie numérique –notamment la taxation des géants d’internet– mais aussi de l’avenir de l’Europe.
Guerre des nerfs
Le président du Conseil européen, Donald Tusk, qui présidera les deux jours de débats, doit soumettre aux dirigeants une feuille de route sur le futur de l’UE, en écho à deux discours sur le sujet de Jean-Claude Juncker et du président français Emmanuel Macron.
Il doit expliquer « comment nous pouvons améliorer nos méthodes de travail afin de présenter des résultats plus rapidement », a expliqué samedi la chancelière allemande Angela Merkel.
Au cours du sommet, M. Macron doit par ailleurs reconnaître officiellement le drapeau européen, afin qu’il ne puisse pas être « enlevé » de l’Assemblée nationale comme le réclame la gauche radicale française.
Les relations diplomatiques de l’UE devraient aussi occuper une partie des discussions, à commencer par celles avec Ankara. « Nous observons les évolutions politiques avec beaucoup d’inquiétude », a affirmé Mme Merkel, qui veut discuter d’un éventuel arrêt des négociations d’adhésion de la Turquie à l’UE.
Autre casse-tête: la crise en Catalogne, pas officiellement au programme, mais qui va sans doute s’inviter, ce sommet étant le premier pour le chef du gouvernement espagnol Mariano Rajoy depuis le référendum d’autodétermination interdit du 1er octobre. « Cette affaire espagnole et catalane met l’Europe à l’épreuve », résume Charles Michel, évoquant « une guerre des nerfs ».
De même, l’accord sur le nucléaire iranien, que le président américain Donald Trump refuse de « certifier », pourrait trouver sa place au sommet, la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni s’étant fendus d’un communiqué commun pour exprimer leur préoccupation.
Le Quotidien / AFP