Le Quotidien Indépendant Luxembourgeois
Plus de 80 bénéficiaires de la Stëmm vun der Strooss ont pu profiter d’une coupe de cheveux gratuite, mais aussi de massages des mains, d’une manucure et d’un maquillage, mardi, à Hollerich.
Bien plus qu’une coupe ou un vernis, c’est du baume au cœur, du temps et de l’attention que professionnels et bénévoles ont offerts aux personnes en état de précarité.
C’est devenu une tradition. Chaque année, la Stëmm vun der Strooss offre une journée de bien-être à ses bénéficiaires. Hier matin, dans le local de l’association à Hollerich, il y avait foule. Il faut avouer que ces derniers temps, c’est souvent le cas au moment des repas. Un mauvais indice sur la santé de la société, mais aujourd’hui c’est particulier. À côté des tables prises d’assaut pour manger, plusieurs coiffeurs se sont installés et peignent, coupent, coiffent sans s’arrêter.
Pour l’occasion, la Stëmm vun der Strooss a ouvert dès 10 h. Avant le repas, Mike Clement, 37 ans, profite d’une coupe sur mesure, sous les mains expertes de Cyrille Hohl. Cela fait près de huit mois que ses cheveux n’ont pas été coupés. Aller chez le coiffeur est un luxe nécessaire qui plombe son maigre budget.
Une salle de bains pour trois logements
Il vient se faire coiffer à la Stëmm pour la première fois sur les conseils de son frère. «J’habite à Neudorf dans une petite chambre que je loue 800 euros par mois, dans laquelle je ne peux ni cuisiner ni manger. Nous partageons à trois une salle de bains», explique-t-il pour que nous mesurions l’importance pour lui de venir se ressourcer dans un endroit où il peut «manger tranquillement, être avec du monde et parler». Il précise : «Quand je suis dans ma chambre à Neudorf, le plafond me tombe sur la tête. Je n’ai pas de travail, pas de télé, pas d’accès internet, j’ai juste une recharge téléphonique.»
Pour lui, il s’agit bien plus que d’une simple coupe, avoir une équipe qui prend soin de lui et être entouré est essentiel. Il confie : «Je suis passé par la rue avant de retrouver un toit et même si venir dans le local de la Stëmm, c’est côtoyer un monde dur, j’aime y venir.»
En haut du local de Hollerich, on maquille, on masse les mains et on fait des manucures. Bref, on chouchoute tous ceux qui le désirent. L’ambiance est un peu plus féminine mais pas uniquement. Nicolina Varga, 48 ans, vient depuis six ans se faire faire une beauté, un moment qu’elle attend avec impatience parce que la coquetterie, «c’est toute (sa) vie». Mais à la maison, elle prend moins le temps et son «mari ne (la) regarde pas». Elle espère bien que ce soir ce sera différent. Pour être sûre de son effet, elle a choisi un vernis rose à paillettes.
Un vrai relooking
À côté d’elle, Ciuraru Loredana Florica, 33 ans, profite également des joies de la manucure. Elle a retrouvé un travail et n’a pas trop le temps de se pomponner, surtout «que mon mari n’aime pas trop que je me fasse belle», dit-elle à voix haute pour que le concerné l’entende, mais celui-ci est également occupé à profiter des soins des mains.
En voyant, Lisa, 51 ans, Alexandra Oxacelay, la directrice de la Stëmm, s’exclame : «Mais je ne t’avais pas reconnue!» C’est tout un relooking que la femme s’est offert sur une journée. Ses cheveux bruns aux reflets rouges sont passés du niveau des omoplates à au-dessus des épaules. Un fard à paupières gris mauve vient mettre en valeur ses yeux et ses ongles sont couverts d’un bordeaux brillant. «C’est la première fois que je fais une manucure», indique-t-elle. La maquilleuse bénévole poursuit son travail avec le mascara. Même si elle travaille pour la Stëmm vun der Strooss (qui a accepté qu’elle quitte son poste pour venir se faire belle), aller chez le coiffeur représente un investissement important. Donc bénéficier d’une nouvelle coupe sans payer, cela signifie se faire plaisir sans culpabiliser, être totalement «relax», d’autant qu’elle aide toujours son fils de 23 ans qui ne trouve pas de travail.
Cyrille Hohl, Jean-Michel Raguet et leur équipe de coiffeurs ont au total réalisé 83 coupes de cheveux dans les locaux de la Stëmm vun der Strooss. Et une séance de manucure et de maquillage a été offerte à 88 personnes.
Audrey Libiez
