Savoir où se trouvent les moustiques du pays afin de mieux les surveiller, tel est l’objectif de ce premier atlas publié par le Musée nationale d’Histoire naturelle (MNHN).
En 2018, un jeune habitant de Stolzembourg découvre, à son domicile, un moustique un peu plus grand que la normale, dont il a entendu parler quelques jours auparavant dans un reportage. L’Aedes japonicus (voir photo) est ainsi repéré pour la première fois dans le pays. Informés, des scientifiques se rendent aussitôt dans la localité et découvrent trois femelles de cette espèce invasive.
Le Dr Christian Ries, à l’époque conservateur de la section d’écologie du musée d’Histoire naturelle (MNHN), est d’autant plus sensible au sujet qu’il a eu la malchance de contracter une forme grave de la maladie causée par le virus du Nil occidental (West Nile Virus) véhiculé par un autre moustique, de type Culex, lors d’un voyage à Vienne. La présence du moustique japonais interroge : le trouve-t-on ailleurs au Grand-Duché et surtout, quels autres types de moustiques vivent sur le territoire ?
Le MNHN avec sa Fondation faune-flore, la direction de la Santé, le ministère de l’Environnement, sous la férule de Francis Schaffner, un expert entomologiste médical et vétérinaire à l’université de Zurich décident alors de dresser l’inventaire des moustiques au Grand-Duché. Grâce à cette base de données, un atlas vient d’être publié et a été présenté hier, lors d’une conférence de presse.
Pendant trois ans, entre 2019 et 2021 – le covid a ralenti les travaux – une stratégie est mise en place : d’abord lister tout ce qui a été rédigé sur le sujet (l’occasion de lire les premiers rapports publiés sur ces insectes dans le pays dès 1910), puis collecter les données apportées par les citoyens mis à contribution par des campagnes publicitaires et enfin mener des enquêtes de terrain. Les scientifiques découpent alors le territoire en 230 carrés (voir carte ci-contre représentant les sites de prélèvement), prélèvent des larves de moustiques et des adultes qu’ils obtiennent grâce à des pièges de CO2, des filets aquatiques ou des aspirateurs manuels.
Qu’il s’agisse de lieux, principalement aquatiques, en pleine nature ou en centre-ville, les scientifiques sont à pied d’œuvre. Les zones près du Findel ou sur des aires de repos sont aussi scrutées de près, car ce sont dans ces lieux de passage que les espèces invasives ont de grandes chances d’être introduites dans le pays.
Une menace pour les humains et les animaux
Il ressort de cette étude que le Grand-Duché est un pays fort apprécié par les moustiques! Au total, 28 espèces différentes ont été identifiées, cinq ont été trouvées pour la première fois au Luxembourg, explique le MNHN. Le Culex pipiens et le Culex torrentium sont les espèces les plus répandues. Une seule espèce de moustique invasive a été observée : le moustique japonais, qui est en train, avec le Culiseta longiareolata, de coloniser le pays.
À titre indicatif, pour comparer en fonction de la taille des territoires, le nombre d’espèces de moustiques par 1 000 km2 est de 10 au Luxembourg, contre 0,11 en France ou 1,11 en Belgique. La faute à ses paysages variés et humides, ainsi qu’à son emplacement : les moustiques du sud de l’Europe parviennent à remonter jusqu’au Grand-Duché, tandis que ceux du nord s’y frayent un chemin sans encombre. Le fait que les résidents du pays voyagent dans des pays lointains et que les routes du pays soient un lieu de passage en Europe expliquent aussi ces données.
Cet atlas intéresse bien évidemment la direction de la Santé, car les moustiques peuvent représenter une menace pour la santé humaine et animale. D’ailleurs, au moins 15 espèces présentes dans le pays peuvent être impliquées dans une transmission d’agent pathogène ou de parasite. En septembre dernier d’ailleurs, le moustique tigre, connu pour transmettre la dengue, avait été découvert dans le pays, sans toutefois provoquer d’épidémie.
Le Dr Jean-Claude Schmit, directeur de la Santé, reconnaît que ses équipes surveillent les zones près de Remerschen, les aires d’autoroutes, le multimodal de Bettembourg, les gares d’autobus ou, les commerces de pneus, ces derniers pouvant contenir des eaux usées dans lesquels les moustiques pondent. Des pièges sont placés dans ces endroits stratégiques et les populations avoisinantes sollicitées pour traquer les points d’eaux stagnantes.
Comment faire pour ne pas avoir de moustiques autour de chez soi
Pour profiter pleinement de ses soirées estivales en terrasse ou de ses nuits, fenêtres grandes ouvertes, sans être importuné par des moustiques, le MNHN, la direction de la Santé et le département de l’Environnement donnent des conseils relativement simples à mettre en place. L’élément le plus important à retenir est qu’il faut éliminer les sources d’eau stagnantes.
Pour cela, observez votre environnement : la petite bâche de protection dans le jardin, pour conserver le bois par exemple, ne ferait-elle pas des plis susceptibles de recueillir quelques gouttes de pluie ? Et là, ne pourrait-on pas combler la petite flaque qui se reconstitue à chaque averse ? Quant à ce réservoir d’eau, bien pratique pour arroser son potager, un couvercle, une moustiquaire ou un tissu empêcheront efficacement les femelles des moustiques de pondre.
On peut bien sûr continuer à mettre à disposition des oiseaux des petites coupelles d’eau, surtout en période de sécheresse, mais il faut une fois par semaine les vider entièrement et les nettoyer vigoureusement. Idem pour les petites piscines ou les soucoupes sous les plantes en pot qui parfois conservent le trop-plein d’arrosage. Lorsque l’on sait qu’en 7 jours, une femelle moustique peut déposer quelque 200 larves dans l’eau, on comprend l’intérêt de faire la chasse à l’eau stagnante. Quant à la mare naturelle, si les feuilles mortes et les branchages sont régulièrement ramassés autour d’elle, il y a peu d’inquiétude à nourrir son sujet : les prédateurs des moustiques y figurent souvent en grand nombre.