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Un pipi contre un mur vire au règlement de comptes à Remich


Les deux protagonistes de l’affaire ont brillé par leur absence au tribunal. (Photo : archives lq)

Surpris par sa victime présumée en train d’uriner contre un mur, le prévenu est accusé d’avoir tenté de la toucher avec une arme à feu, la manquant de peu. Il aurait pensé tirer à blanc.

André était parti acheter des cigarettes. Sur le chemin du retour, il a croisé la route d’Aymen. Aymen était en train d’uriner contre la façade de la maison de sa compagne. André n’a pas apprécié et l’a fait savoir à Aymen qui lui aurait rétorqué : «Tu veux que je te tue?» Ces deux-là n’étaient pas près de s’entendre. Ils auraient échangé quelques coups de poing jusqu’à ce qu’Aymen dégaine un pistolet et le pointe en direction du ventre d’André puis de sa tête. Il tire, une fois, deux fois…

Et loupe sa cible à chaque fois. André parvient à dévier l’arme à deux reprises et à mettre Aymen en fuite avant d’aller lui-même se réfugier dans un café de la place du Marché à Remich. Il s’agit de la version de la victime. La version du prévenu est différente. Mais aucun des deux n’était présent face à la 13e chambre criminelle pour se défendre. Me Stroesser a assuré ce rôle pour Aymen. Le procès ayant déjà été reporté à plusieurs reprises en raison de l’absence de l’un ou l’autre de ses protagonistes, sa présidente a décidé de se passer d’eux et de s’en remettre au dossier.

«Les tirs auraient pu lui causer des blessures létales»

Aymen a prétendu avoir dégainé l’arme dans le but de se défendre de sa victime présumée qui aurait été très remontée. Le prévenu se serait contenté de tirer en direction du sol avec ce qu’il pensait, a-t-il affirmé aux policiers, être une arme chargée de balles à blanc. Il s’en serait ensuite débarrassé dans la Moselle.

Une version qui, pour la représentante du ministère public, «ne tient pas». «Je ne crois pas qu’Aymen ait pu avoir peur d’André et d’une supposée réaction violente de sa part. Il était plutôt agacé et énervé de s’être fait remarquer.» Selon les témoins, Aymen aurait tiré à deux reprises. L’arme a été retrouvée dans un camion poubelle. «Le prévenu a menti délibérément», a estimé la magistrate avant de requérir une peine de dix ans de prison à son encontre.

Dans son réquisitoire, elle a notamment souligné son obstination et la menace immédiate qu’Aymen représentait pour sa victime présumée. «Les tirs auraient pu lui causer des blessures létales ou le mettre en état de danger de mort», note-t-elle. «Une issue fatale n’a été évitée que par la réaction d’André.» Et certainement pas par un désistement du prévenu.

Une victime «fantasque»

Me Stroesser regrette également l’absence des protagonistes. «L’accusation repose intégralement sur les déclarations du témoin qui n’est pas présent.» Un témoin, la victime présumée, qu’il juge «fantasque» et qu’on ne devrait «pas croire sur parole». Selon l’avocat, André n’aurait pas supporté de voir Aymen uriner et ne l’aurait «plus lâché», même quand son client a essayé de «prendre le large».

Aymen aurait seulement voulu faire peur à André en tirant au sol. Un impact de balle a été retrouvé par la police technique. «Il n’a pas visé André» et n’avait pas conscience que son arme, un calibre 6.35, avait été modifiée pour tirer à balles réelles, affirme l’avocat. «Seul un expert peut procéder à cette modification. Le projectile tiré ne peut pas traverser un crâne.»

«Quatre balles sur six ont été retrouvées dans le barillet du pistolet. Si mon client avait eu l’intention de le tuer, il aurait pu tirer encore», poursuit Me Stroesser qui assure que son client ignorait que son arme était potentiellement létale. «En outre, ils se trouvaient dans une impasse, il lui aurait été impossible de rater sa cible.» Aussi a-t-il plaidé en faveur de l’acquittement de son client quant à la tentative de meurtre dont il est accusé.

Pour ce qui est des coups et blessures volontaires qui lui sont également reprochés, l’avocat a avancé la légitime défense et l’excuse de provocation. Il a ensuite rejeté les menaces verbales et reconnu les menaces par arme en précisant qu’Aymen n’a pas visé le ventre et la tête de sa victime présumée. Me Stroesser a demandé au tribunal de condamner son client à une peine la plus basse possible et de l’assortir du sursis intégral au cas où son client peut encore y prétendre.

Le prononcé est fixé au 12 mars.