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Un observatoire de la délinquance réclamé unanimement


Tom Oswald, le président de l’ALC, et Sophie Gosselin, criminologue, ont grand espoir de voir se créer, enfin, un observatoire de la délinquance. 

L’Association luxembourgeoise de criminologie a de quoi être satisfaite. Les députés ont voté unanimement en faveur de la création d’un observatoire de la délinquance et des réponses pénales.

Il s’agit là d’une vieille requête des socialistes et du député Dan Biancalana, diplômé en criminologie, en particulier. Un observatoire de la délinquance ne serait pas du luxe au Luxembourg, où les statistiques ne sont pas toujours légion. En 2020, déjà, le député avait posé une question parlementaire à ce sujet, à laquelle la ministre de la Justice de l’époque, Sam Tanson, avait répondu.

Actuellement, au Luxembourg, les statistiques relatives à la criminalité et à la délinquance sont collectées et présentées séparément et isolément : les statistiques judiciaires et pénitentiaires par le ministère de la Justice, les statistiques policières par le ministère des Affaires intérieures, celles relatives à la délinquance routière par le ministère de la Mobilité et celles concernant la violence domestique sont recueillies par le ministère de l’Égalité des genres et de la Diversité.

«Cette manière de procéder ne donne guère une vue et analyse générale sur les faits délictueux au Luxembourg», rappelait le député à la nouvelle ministre de la Justice, Élisabeth Margue. Il citait l’exemple de la France qui avait créé l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales, fonctionnant de manière indépendante et chargé d’analyser l’évolution des phénomènes criminels et des réponses pénales qui y sont apportées.

Le député insistait pour qu’un tel observatoire soit mis en place au Luxembourg, dont la mission consisterait à recueillir et exploiter les sources de données disponibles sur la délinquance et les réponses pénales. Il avait bon espoir que ce vœu aboutisse, eu égard à la réponse de Sam Tanson qui, en 2020, était plutôt favorable à cette idée, tout en admettant qu’aucun projet dans ce sens n’était prévu.

En juillet 2024, Élisabeth Margue avait répondu au député que l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales qui existait en France avait été dissous en 2020, ses missions ayant été reprises par le Service statistique ministériel de la sécurité intérieure.

La ministre CSV citait, dans le contexte luxembourgeois, le projet de «Datawarehouse» (entrepôt de données) sur lequel le service informatique de la Justice travaille toujours dans le cadre du programme «Paperless Justice» et dont la première phase, la démonstration de faisabilité (proof of concept), s’est achevée fin juin 2024. Le «Datawarehouse» a pour but de permettre l’accès aux données des juridictions judiciaires en garantissant une protection et une sécurité des données maximales et en permettant une analyse de la qualité des données pour pouvoir établir des statistiques qualitatives.

Cependant, comme l’ajoute la ministre, la mise en place d’un observatoire central nécessiterait de doter ce dernier de criminologues et de sociologues qualifiés. Par ailleurs, il faudrait s’assurer que le traitement des dossiers pénaux par cet observatoire respecte scrupuleusement les règles en matière de protection des données personnelles. «Il s’agit dès lors d’un projet de grande envergure» qui n’est ni à l’étude ni en projet, assurait-elle.

Avancée majeure

Mais mercredi dernier, dans le cadre d’une interpellation à la Chambre du député Dan Biancalana au sujet de la politique pénitentiaire au Luxembourg, une motion a été votée à l’unanimité pour insister sur la création d’un observatoire de la délinquance et des réponses pénales.

Les députés ont relevé l’absence de statistiques harmonisées dans le domaine de la justice et de la police, la nécessité de se doter d’outils permettant d’analyser l’impact des décisions judiciaires dans la durée, l’absence d’indicateurs fiables sur les taux de récidive selon les types de peines appliquées et le manque de données consolidées concernant les profils des justiciables, leur parcours pénal et les effets des différentes peines sur leur réinsertion. Ils ont jugé indispensables le recueil, l’analyse et la publication régulière de données objectives à des fins d’évaluation et d’ajustement de la politique pénale.

L’Association luxembourgeoise de criminologie (ALC) ne peut que saluer la décision unanime de la Chambre des députés, elle qui alerte depuis des années sur le manque criant de données statistiques fiables et systématiques relatives à la délinquance sur le territoire national. «Cette absence d’un véritable système d’observation nuit incontestablement à la compréhension des phénomènes criminels et limite l’élaboration de politiques publiques fondées sur des faits», exprime l’association.

«La mise en place d’un registre national constitue une avancée majeure en faveur d’une approche rationnelle, moderne et responsable de la sécurité et de la justice dans notre pays», affirme-t-elle en se déclarant disponible pour accompagner la mise en œuvre et le suivi d’un tel observatoire, en collaboration avec les autorités concernées, les chercheurs et les acteurs de terrain.

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