Ils auraient pu voir double ou triple, mais ils n’ont rien vu du tout. Ni Ahmed qui traversait la rue, ni la barrière d’accès au site Arthur Welter. Les chauffards ne les ont pas loupés.
Ahmed est chauffeur de bus pour la Ville de Luxembourg. Le 27 août 2021, il débute sa pause sur le P&R Bouillon, traverse la rue du même nom sur le passage pour piétons pour se rendre au dépôt des AVL (autobus de la Ville) juste en face et se retrouve projeté sur le capot de la voiture d’Acacio. « J’avais regardé à gauche et à droite avant de m’engager. Je n’ai pas vu de voiture approcher. J’étais presque arrivé de l’autre côté quand une voiture m’a percuté », s’est souvenu la victime hier après-midi face à la 9eme chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg. Le témoin a des fractures au genou et est mis en arrêt maladie pendant près de cinq mois.
Deux ans plus tard, le 28 mai 2023, l’automobiliste de 67 ans à l’origine de l’accident d’Ahmed, est arrêté au volant de sa voiture en état d’ivresse. « Il sentait l’alcool et a perdu l’équilibre en sortant de la voiture », témoigne la policière qui l’a arrêté sur un parking de la rue d’Hollerich suite à son signalement par un automobiliste apeuré par son style de conduite hasardeux. Acacio est invité à faire un test d’alcoolémie, mais doit s’y reprendre à cinq reprises sans y parvenir correctement. Le tribunal et les policiers pensent qu’il a pu faire semblant de ne pas réussir à souffler dans l’éthylotest pour s’éviter des problèmes.
« J’avais bu un petit verre de vin, c’est tout. Je ne peux pas boire plus, mon médecin me l’interdit », prétend le sexagénaire. « J’étais très nerveux à cause de la police. » « Soit vous ne savez pas conduire, soit vous aviez bu plus que ce que vous voulez bien reconnaître », lui lance la présidente avant de l’interroger sur les premiers faits. Des faits pour lesquels il est en aveux. Pour autant, il ne reconnaît pas sa responsabilité. « Il n’y avait personne sur le passage pour piétons », a assuré le sexagénaire.
Le parquet a requis une interdiction de conduire de 9 mois pour coups et blessures involontaires, de 24 mois pour le refus de souffler dans le ballon et 18 mois pour signes manifestes d’ivresse ainsi qu’une amende appropriée à l’encontre du prévenu.
Ils s’échouent chez Arthur Welter
« Je n’étais pas à côté de la voiture, mais je ne me cachais pas de la police », conteste un jeune français de 25 ans. Le 22 octobre 2023 vers 4h30 du matin, Maxime et Vincent ont traversé la barrière d’entrée du site de l’entreprise Arthur Welter à Leudelange. Arrivés sur les lieux quelques minutes plus tard, les policiers ont trouvé une épave, mais pas ses deux occupants qui, selon le policier, se cachaient derrière les camions stationnés sur le parking.
Vincent était au volant de la voiture qui appartenait à Maxime au moment de l’accident. « Il n’était pas en état de conduire, donc je lui ai proposé de conduire à sa place », explique Vincent qui présentait un taux de 2 grammes d’alcool par litre de sang ce soir-là. « Vous n’étiez plus en état non plus », a constaté la juge. « Vous avez heurté la bordure du rond-point et vous poursuivez malgré tout votre chemin. » « Nous nous sommes rendus compte qu’il y avait un problème avec la voiture. Nous avons vu le parking et nous avons voulu nous y arrêter », explique un des jeunes hommes.
Ils ont vu le parking, mais pas la barrière. « Vous auriez dû rester près du véhicule. Votre réaction fait que vous vous retrouvez au tribunal pour délit de fuite parce que vous avez essayé d’échapper à un contrôle de police », indique la juge à Vincent qui reconnaît s’être éloigné de la voiture accidentée pour s’isoler. « Il y en a eu deux », soulève le procureur qui énumère les mauvaises décisions des deux jeunes hommes cette nuit-là, à commencer par celle de Maxime de confier les clés de sa voiture à Vincent.
Le magistrat a requis une peine de 18 mois d’interdiction de conduire pour délit de fuite et de 20 mois pour conduite en état d’ivresse à l’encontre de Vincent ainsi qu’une interdiction de conduire de 18 mois pour délit de fuite ainsi qu’une amende appropriée à l’encontre de Maxime. Les deux jeunes hommes n’ayant pas d’inscription à leur casier judiciaire, le parquet ne s’est pas opposé à l’octroi d’un sursis.
Les prononcés sont fixés au 27 juin prochain.