Le Bus du cœur des femmes est présent depuis mercredi pour la première fois au Luxembourg, place de la Constitution, dans la capitale. Il offre un dépistage gratuit aux femmes et sensibilise le public aux maladies cardiovasculaires.
Chaque jour, 25 000 femmes dans le monde meurent d’une maladie cardiovasculaire. Au Luxembourg, elle est encore la première cause de mortalité. La Pr Claire Mounier-Véhier et Thierry Drilhon sont partis de ce constat pour fonder Agir pour le cœur des femmes il y a quatre ans. «Nous avons cofondé la fondation autour de cette urgence médicale et sociétale que sont les maladies cardiovasculaires», indique le cofondateur. Ils ont par la même occasion lancé le Bus pour le cœur des femmes. «Dans huit cas sur dix, on peut éviter à ces femmes d’entrer dans la maladie par de la prévention positive, bienveillante et de terrain.» Pour ce faire, le Bus du cœur des femmes fait le tour des villes de France pour offrir un dépistage gratuit.
Pour sa 51e étape, de mercredi à aujourd’hui, le bus fait un arrêt de trois jours sur la place de la Constitution à Luxembourg, sous les yeux attentifs de la Gëlle Fra. «C’est la première fois qu’il dépasse les frontières», note Monique Isebaert, ancienne présidente et fondatrice de l’Amicale des patients de l’Institut national de chirurgie cardiaque et de cardiologie interventionnelle (INCCI), qui a invité le bus ici.
Une écrasante majorité de femmes se préoccupent davantage de la santé de leurs proches (conjoint, parent, enfant…) que de la leur.
De nombreuses personnes défilent sous le cœur marquant l’entrée du village. Elles sont accueillies par les bénévoles aux vestes blanches de la fondation Agir pour le cœur des femmes et de l’Amicale des patients. Pour les femmes qui viennent se faire dépister, une fois entrées dans le village bien-être, différentes étapes les attendent. «Le but est d’essayer de faire en une heure et demie ou deux heures ce qui se fait normalement en quatre ou cinq consultations successives en six mois ou en un an», explique Arnaud Charpentier, médecin chirurgien cardiaque à l’INCCI.
Le parcours comporte une consultation médicale, une prise de sang, un électrocardiogramme, une échographie vasculaire, une prise de tension et un entretien d’addictologie. «On donne un conseil médical de prévention, de diagnostic. On ne fait pas de traitement sur place», précise le docteur. Si une maladie est détectée lors de ce rendez-vous, les patientes sont alors dirigées vers des médecins ou l’hôpital pour leur permettre d’être soignées.
Mais cette lourde problématique n’empêche pas la bonne humeur. L’ambiance place de la Constitution est amicale et festive. Des chaises et des bancs sont posés devant le bus et les tentes dressées là afin de permettre aux personnes d’attendre patiemment. Au milieu de la place, des transats permettent même de se détendre. Et, tout autour, divers stands attendent les visiteurs. «Il y a le village bien-être et santé pour sensibiliser et apporter des informations sur la santé des femmes», complète Monique.
Un dépistage pour les femmes vulnérables
Au-delà du dépistage des maladies cardiovasculaires et de la sensibilisation, le bus a aussi pour but de «soigner des personnes en rupture de soins». L’initiative cible donc surtout les femmes en situation de vulnérabilité et de précarité. «Ce n’est pas uniquement de la précarité financière, mais aussi de la précarité sociétale… Par exemple, les femmes qui n’ont pas le temps de s’occuper d’elles-mêmes», dit tristement Monique.
C’est une réalité : les femmes sont moins dépistées et moins soignées que les hommes. Les signes de maladie sont également différents de ceux des hommes et ils sont moins bien connus. «Les études en la matière ont été faites sur les populations masculines… Heureusement, ça s’améliore, les professionnels sont de plus en plus formés aux populations féminines», relève le Dr Charpentier.
En France, pour cibler ces femmes, la fondation travaille avec la Caisse primaire d’assurance maladie (CPAM). Cette dernière lui fournit une liste de femmes n’ayant pas pris de rendez-vous médicaux depuis longtemps. «Trop de femmes ne s’occupent pas de leur santé», constate Thierry Drilhon. Elles reçoivent une invitation pour subir un dépistage gratuit. «Depuis le début, nous avons dépisté 14 000 femmes, dont 90 % avaient au moins deux facteurs de risque.» Pour l’étape au Luxembourg, la fondation n’a pas travaillé avec une liste. La population est donc légèrement différente, peut-être moins précaire dans son ensemble. «Nous espérons quand même recevoir 200 patientes», estime le chirurgien.
Lui, en tout cas, en est convaincu : «Le meilleur traitement, c’est la prévention!» Si la maladie est diagnostiquée assez tôt, elle se soigne bien, rappelle le médecin. «C’est une chose simple à dire aux gens… Il faut écouter son corps et voir ses médecins.» C’est justement là le but de la fondation : «Éduquer les femmes à prendre soin de leur santé, leur apprendre à respecter leurs différents rendez-vous et à faire de la prévention en action… Donc, prévenir plutôt que guérir pour éviter à ces femmes d’entrer dans la maladie et de décéder», conclut le cofondateur d’Agir pour le cœur des femmes.
«C’est valorisant pour les femmes»
Marie est installée sur les transats, une pile de documents d’information posée sur les genoux. «Je suis là pour m’informer», dit la jeune retraitée. Elle était au marché, à quelques pas de la place de la Constitution. C’est complètement par hasard qu’elle est tombée sur le bus. Après être entrée par curiosité et avoir fait le tour des stands, elle a pris rendez-vous pour un dépistage le lendemain. «Je suis suivie depuis le début de l’année, j’ai même un traitement. Mais le dépistage fera du bien pour la fin de l’année!» Pendant sa petite pause au soleil, Marie contemple autour d’elle. «Il n’y a pas assez de monde…», souffle-t-elle. «On devrait être plus nombreuses… C’est valorisant pour les femmes, elles ont besoin qu’on s’occupe d’elles!»