Le tribunal n’a pas retenu la légitime défense. L’entraîneur de la Jeunesse d’Esch a été condamné pour meurtre ce jeudi. Il avait poignardé un assaillant déjà immobilisé avec un de ses couteaux en marge d’un entrainement.
Lisandro, un ancien entraîneur de la Jeunesse d’Esch, a été condamné ce jeudi à 18 ans de réclusion criminelle, dont 12 assortis d’un sursis probatoire. Le 20 janvier 2023, il avait poignardé à mort un jeune réfugié kurde venu perturber l’entraînement de l’équipe des minimes du club de football. Dorian, le père d’un joueur qui lui avait prêté main-forte dans un premier temps avant d’essayer de protéger la victime, bénéficie d’une suspension du prononcé. La 13e chambre criminelle du tribunal d’arrondissement a estimé qu’il avait mal agi, mais n’a pas prononcé de peine à son encontre.
Au civil, Lisandro, dont le sursis probatoire s’accompagne d’un certain nombre d’obligations comme celle de suivre un traitement psychiatrique pour régler ses problèmes d’agressivité, a été reconnu coupable aux deux tiers. Halo, sa victime décédée, du tiers restant. L’entraîneur devra s’acquitter de 56 000 euros de dommages et intérêts au profit de la famille du défunt et de 7 350 euros auprès de la Caisse nationale de santé. L’entraîneur était jugé pour homicide et le père de joueur pour coups et blessures.
Le soir des faits, Lisandro et son frère préparaient le terrain de la Hiehl pour un entraînement des U13 quand la victime, en état d’ébriété, est venue les interrompre en s’amusant avec les ballons, dont un qui atterrit dans le visage de l’ancien entraîneur. Halo le lui a jeté avant de l’attraper par le col. Lisandro, qui apprécie moyennement, le repousse et assène un coup de poing au jeune homme.
Ce dernier part sans demander son reste. Pour les personnes présentes, l’incident est clos. Mais Halo revient. Armé cette fois. Il était allé acheter un lot de quatre couteaux et brandissait les deux plus grands. Lors du procès, on apprendra par les enquêteurs qu’en proie à une colère noire, il vociférait à travers Esch-sur-Alzette et mimait des mouvements de boxe.
La légitime défense écartée
Peu avant 18 h, il est donc de retour sur le terrain et se dirige avec détermination en direction de Lisandro. L’ancien entraîneur veut protéger ses joueurs. Avec son frère et Dorian, le père d’un d’entre eux, il parviennent à l’attirer à l’écart et à le désarmer. Dans sa tentative de fuite, Halo laisse tomber l’un des couteaux. À l’extérieur du stade, il trébuche et perd le deuxième couteau.
Une fois l’agresseur immobilisé au sol et le danger écarté, Lisandro se saisit d’un des couteaux et poignarde le jeune Kurde à trois reprises dans la fesse et la cuisse. Un coup fait douze centimètres de profondeur, un autre, de treize centimètres, sectionne l’artère fémorale. L’issue est fatale. Halo était alors sans défense.
Avant d’en arriver là, Lisandro s’était armé d’une poubelle et son frère, de la hampe d’un poteau de corner. Puis les deux hommes avaient frappé l’assaillant au sol à la tête avec les poings et une brique et lui ont donné des coups de pied. Dorian s’était saisi de la brique pour la lancer à la poitrine de Halo.
La 13e chambre criminelle a choisi de ne pas faire bénéficier les deux hommes de la légitime défense – du moins en partie pour Dorian – ou de l’excuse de provocation. En mars dernier, le ministère public était parvenu à la même conclusion. Son représentant avait requis une peine de 18 ans de réclusion criminelle à l’encontre de Lisandro pour meurtre sur un agresseur immobilisé et désarmé. Le lancer de brique du père de joueur est, cependant, à considérer comme un acte de légitime défense, selon le magistrat, qui avait requis une simple amende à son encontre.
La victime était arrivée au Luxembourg depuis moins de deux ans. Une période qui lui avait suffi à sortir du lot, notamment en raison de comportements déplacés envers les femmes. Il a été accusé d’avoir harcelé sexuellement des femmes, dans des bus – avec un hachoir – et dans des centres d’hébergement pour réfugiés.
Lisandro était, lui aussi, déjà connu des services de police pour violences domestiques. Il a d’ailleurs été condamné ce jeudi à 24 mois de prison avec sursis et à 2 000 euros d’amende. Il est accusé de coups sur sa compagne et de l’avoir menacée avec un couteau.