Un an après le feu qui a ravagé l’hôtel de ville de Junglinster, le chantier de reconstruction est toujours au point mort. La faute à un litige avec deux compagnies d’assurance, déplore le bourgmestre.
À l’étroit dans un bureau normalement affecté au Service technique, le bourgmestre de Junglinster, Ben Ries (DP), a de plus en plus de mal à contenir sa colère, alors que les travaux de réhabilitation de l’hôtel de ville, en partie détruit par les flammes dans la nuit du 25 au 26 janvier 2024, n’ont toujours pas commencé.
Si le public est accueilli depuis un an dans des locaux loués spécialement dans la zone d’activité du Lënster Bierg à trois kilomètres de là, le bourgmestre, le collège échevinal, le personnel du secrétariat et les agents du Service technique se partagent quant à eux les quelques espaces qui ont pu être sauvés au 12 rue de Bourglinster.
«L’humidité s’est diffusée partout»
Sur le site, rien ou presque n’a bougé depuis cette nuit où le toit s’est embrasé. Une couverture provisoire et des bâches ont été installés pour empêcher les infiltrations d’eau, et des ventilateurs tournent en continu pour sécher la structure, mais ces équipements sont loin de protéger efficacement la bâtisse sérieusement fragilisée.
«On a eu le feu vert des assurances pour déblayer le premier étage il y a seulement deux mois. Ici, tout a été trempé par les lances à incendie des pompiers, l’humidité s’est diffusée partout, il y a des champignons dans l’isolation. Tout est foutu.»

La commune décide alors de se faire aider juridiquement avec l’espoir d’avancer, tandis que son architecte constitue un dossier complet, incluant des devis détaillés pour 80 % des travaux à entreprendre, et une estimation pour le reste, pour un montant total sous la barre des 7 millions d’euros.
Deux offres refusées par les élus
«L’assurance n’a pas accepté son travail, sans nous en communiquer les raisons. En parallèle, elle a fait une offre, très loin de l’estimation globale de notre architecte, pourtant basée sur des devis. Le conseil communal a donc jugé que ça ne suffisait pas, et l’a refusée en octobre», raconte le bourgmestre.
Une nouvelle offre est mise sur la table dès novembre, après que le bourgmestre a pointé un sérieux manque de professionnalisme dans la gestion du dossier. Un peu plus généreuse, mais encore en dessous des besoins, elle sera également retoquée.
Pour Ben Ries, la confiance est rompue
«Le conseiller qui gérait notre sinistre depuis le début s’est alors vu retirer le dossier du jour au lendemain», rapporte Ben Ries, regrettant que la confiance soit rompue.
«Maintenant, ils nous proposent de collaborer à nouveau avec les experts, mais je refuse : je veux avoir la garantie que les conclusions qui en sortiront ne seront pas ignorées, comme les premières.»
Le juge des référés pour débloquer le litige
La patience de l’édile arrive à ses limites. Ben Ries insiste au passage sur les cotisations et primes d’assurance payées rubis sur l’ongle, et l’obligation contractuelle pour l’assurance d’indemniser son client à hauteur des dégâts subis.
Sans réponse favorable des deux grandes compagnies d’assurance luxembourgeoises impliquées, il indique étudier la possibilité de saisir le juge des référés afin d’obtenir la nomination d’un expert neutre.
«On ne peut pas continuer comme ça. L’objectif pour nous, c’est reconstruire les trois bâtiments, donc l’ancienne ferme, l’étable et l’annexe, et de pouvoir boucler les travaux avant 2029.»

Les murs pourront être conservés, mais pour le bourgmestre, il est clair que toute la structure en bois préfabriqué, y compris la dalle qui a aussi pris l’eau, doit être intégralement remplacée.
«On ne laissera pas pourrir la bâtisse»
Et si l’assurance ne suit pas, le collège échevinal se dit déterminé à sauver l’édifice : «On ne laissera pas pourrir la bâtisse. S’il faut avancer tous les frais pour reconstruire, on le fera.»
36 heures contre les flammes
Cette nuit-là, un feu couvant – suite à des travaux d’isolation du toit effectué dans l’après-midi – enflamme subitement l’aile centrale de l’administration communale, mobilisant 130 pompiers et causant l’effondrement de la charpente et de la toiture, où la température est montée jusqu’à 600 degrés.
D’importants moyens sont déployés par les soldats du feu pour dégager les débris, les éteindre au fur et à mesure et accéder directement aux braises. Une société de construction met à leur disposition une excavatrice, mais la place étant trop étroite, ces derniers sont forcés de réaliser ce travail eux-mêmes.
36 heures de lutte viendront finalement à bout de ce sinistre qui aura dévasté le local abritant les archives, le bureau de la population, les recettes, le secrétariat et l’état civil. Heureusement, aucun blessé ne sera à déplorer et la nouvelle extension inaugurée quelques mois auparavant s’en sortira indemne.