Karine Reuter, présidente du RFCU, dit avoir atteint le point de non-retour avec la commune, coupable à ses yeux de mise en danger de ses joueurs et joueuses par un entretien des infrastructures insuffisant.
Vous aviez une réunion programmée, mardi matin, avec la Ville de Luxembourg pour aborder encore une fois les problèmes liés à la qualité de vos installations, inspectées récemment par la FLF et jugées en très piteux état, avec de nombreux terrains déclarés inaptes au jeu. Qu’a-t-elle donné, cette réunion?
Karine Reuter : Rien parce qu’on l’a annulée, eu égard à tous les messages que nous avons pu recevoir préalablement de leur part. Alors qu’on pointait la dangerosité des surfaces de jeu, on a eu le culot de nous répondre, et je suis sérieuse, que nous « n’avions qu’à pas les utiliser« .
Et on nous a en plus renvoyés au soi-disant projet en cours rue Anatole-France. Il était déjà en cours en 2016, quand je suis arrivée à la présidence, et on nous explique encore, à l’heure actuelle, qu’on est sur le point de nous présenter des plans, qu’on a déjà vus très souvent.
On nous prend pour des canards sauvages ! Mais arrêtez de nous montrer des plans : construisez-le, ce centre d’entraînement ! On nous a même consultés sur ce sujet. Ils voulaient construire une tribune démente alors qu’on n’en a pas besoin.
On leur a dit : « À la place, construisez une salle, pour l’hiver, ce sera bien plus utile« . Mais on nous sort toujours des excuses dérisoires. Il y a six ans, il n’était pas au budget, ce centre, nous avait-on dit. Mais il me semble que ces huit dernières années, on aurait eu le temps de l’y mettre, au budget.
Ce n’est pas la première fois que vous vous plaignez ouvertement de la situation. Qu’est-ce qui fait qu’aujourd’hui, vous semblez plus remontée ?
Ah oui, peut-être vous en souvenez-vous mais il y a un an et demi, nous avions déjà rédigé une lettre ouverte à la FLF et à la commune pour dire que nous ne pouvons plus continuer comme ça. La fédération nous a répondu que ce n’était pas son souci, qu’elle se bornait à contrôler les installations. Mme Beissel (NDLR : l’échevine aux sports de la Ville) s’est étonnée de ce qu’on n’était pas satisfait avec tout l’argent des subsides qu’on recevait.
Mais moi, aujourd’hui, j’ai envie de lui dire que si la commune n’est pas capable de mandater des entreprises pour intervenir, qu’ils nous allouent un budget et on se chargera de le gérer, parce que le dernier rapport de la FLF pointe du doigt de sévères manquements et qu’aujourd’hui, outre de sévères blessures pour nos joueurs, on voit des employés communaux venir boucher des trous sur nos terrains avec des brouettes ! Nous, on a dans le club des gens qui sauront gérer.
Mais il faut croire qu’à la commune, on préfère les clubs de Beggen, Merl et Gasperich… Quand on voit les leurs, d’installations… En tout cas, on n’a toujours pas de réponses à nos mails des derniers temps. Si on n’en a pas avant la fin du week-end, lundi, on ferme boutique !
Nous avons envoyé des courriers avec accusé de réception, pour récupérer les terrains de Mühlenbach ou du Barthel, on attend encore les réponses
À vous écouter, c’est… politique ?
Je n’ai aucune idée de la façon dont les autres sports sont traités, mais il me semble qu’au niveau des sports, effectivement, on n’a pas du tout anticipé les évolutions du pays et notamment l’accroissement de la population. Il n’y a pas assez de terrains ni d’infrastructures. Et le RFCU est au cœur du problème. On avait déjà eu le problème avec le futsal.
Pour dénoncer l’absence de salle, on a fini par contacter la presse. Après des semaines sans aucun signe, on nous a appelés le lendemain de l’article, à 8 h, en nous disant qu’il n’y avait pas besoin de contacter la presse pour faire avancer les choses. Eh bien apparemment si… Donc aujourd’hui, on vous appelle pour faire part de notre situation, puisque personne ne répond à nos mails.
Existe-t-il des solutions alternatives pour vous permettre de continuer sur des terrains qui soient praticables et dans des conditions décentes ?
Nous avons envoyé une requête officielle avec accusé de réception quand Hamm est descendu en Division 1, en mai 2023, afin de savoir si nous ne pourrions pas profiter du site de Mühlenbach, dont le club avait hérité à la suite de sa fusion et alors que nombre de ses joueurs avaient quitté le club. La commune n’a jamais répondu.
Pas plus que quand on a demandé si on ne pourrait pas bénéficier du stade Josy-Barthel, qui est un peu notre stade puisque le Spora y jouait. Au moins le temps qu’on procède aux travaux nécessaires sur les autres terrains.
Nos 450 gamins vont aller sous les fenêtres de la bourgmestre pour demander pourquoi ils n’ont plus de terrains
On a du coup envie de vous demander : où en est le RFCU de son rapport à la commune? Une annulation de rendez-vous, dans la situation dans laquelle semblent être vos terrains, paraît marquer un point de rupture.
Si elle ne réagit pas d’ici une semaine, je vous l’ai dit, je ferme le club ! Comme ça, nos 450 gamins, mais aussi nos dames et nos seniors iront crier sous les fenêtres de la bourgmestre en demandant pourquoi ils n’ont plus de terrains et plus le droit de jouer. De toute façon, ils ne peuvent plus : leurs parents commencent à leur faire quitter le club à cause des risques de blessures. J’ai une anecdote à vous raconter, pour que vous compreniez : il y a deux ou trois ans, la commune est intervenue sur le Polfer I. Elle a changé toute la pelouse. Elle était magnifique.
Puis, elle a décidé d’enlever les gradins en pierre situés le long de la tribune. Or pour déblayer les gravats, les employés communaux n’ont rien trouvé de mieux que de faire rouler le tracteur directement sur le gazon… Comment voulez-vous que les terrains soient bons ! Quand je pense que ce stade porte le nom du père de notre bourgmestre et qu’on le laisse dans cet état !
Franchement, la buvette est dans un tel état, tellement dangereuse, que si on était un patron et qu’on était victime d’un signalement, on aurait l’Inspection du travail avant la fin de la journée ! Cela fait six ans qu’on le signale : il y a des fissures, elle va finir par s’écrouler !
Vous parliez d’administrer vous-même, en tant qu’entité sportive, un budget destiné à remettre en état vos infrastructures. Simple bravade, bien entendu ?
Je ne sais pas si c’est possible. Il faudrait poser la question à un juriste. Je ne sais pas si on serait autorisé à le faire. Mais… Tiens, j’ai encore une anecdote : récemment, nous voulions construire un panneau d’affichage pour le score. Un endroit, bien entendu, où l’on peut aussi mettre de la pub. L’un de nos sponsors nous le faisait pour 10 000 euros.
La commune a dit non, qu’il y avait des règles à respecter, un cahier des charges à mettre en place, un appel d’offres à faire… Rien que la structure a coûté le triple. Et une fois que ça a été prêt, on nous a dit qu’on ne pouvait pas mettre le tableau d’affichage parce qu’on pouvait gagner de l’argent avec et que ce n’était pas à eux de financer ce genre de choses qui pouvaient nous faire gagner de l’argent. Mais ce n’est pas pour en gagner, c’est simplement pour en faire entrer un peu. Personne ne devient riche avec ça !
De quel investissement parle-t-on, pour remettre vos infrastructures en état ?
Aucune idée, mais il y en a quand même pour un peu de sous. Parce qu’il n’y a pas que les terrains, mais aussi les vestiaires. Des blocs sanitaires qui ont plus de 50 ans. Dont celui des arbitres au stade Achille-Hammerel ! Et on a le culot, devant le calcaire et la rouille, de nous dire qu’on n’a qu’à faire le ménage et nettoyer. La commune nous a écrit une lettre allant dans ce sens. Voilà où on en est…
État des terrains : un bilan alarmant
La FLF les ferme les uns après les autres
À l’heure actuelle, selon les dirigeants du Racing, le seul terrain à leur disposition qui ne soit «pas dangereux», c’est le terrain principal du stade Achille-Hammerel, là où évolue toutes les deux semaines l’équipe de BGL Ligue.
Mais un état des lieux récents orchestré par la FLF rend compte de cette situation mieux que ne saurait le faire le club lui-même, qu’on pourrait accuser de noircir le trait à dessein. Ainsi, lors de l’inspection du 10 janvier, on peut lire que le synthétique situé derrière la tribune du Hammerel est à jeter : «état vétuste, espérance de vie atteinte. Point onze mètres cassé.
Lignes trop élevées de +/- 2 cm par rapport au reste du tapis. Conclusion : le terrain est fermé. Aucun match officiel ne peut avoir lieu sur le terrain. Probabilité élevée de blessures». Sans compter la «vétusté» des blocs vestiaires avec des «douches sales» nécessité de… «protéger les prises» !
Les autres enceintes vont encore plus mal. Le stade Camille-Polfer ? «Pelouse âpre» et «on remarque l’équipement d’un arrosage ultérieur». Le terrain d’Hollerich ? «État du tapis : vétuste, espérance de vie atteinte. Probabilité trop élevée de blessures.
Accord provisoire donné jusqu’au 30 juin. Après cette date, aucun match officiel ne peut avoir lieu sur ce terrain.» La fédération impose également un contrôle de la structure de la buvette avant que «des personnes ne soient blessées».
Sur cette base, la directrice de la formation, la Belge Aline Zeler, avoue «être très tracassée pour les enfants. Cela me tracasserait de voir mes enfants jouer dans de telles conditions. Comment leurs corps vont-ils évoluer sur de tels terrains ? Et comme on ne peut plus s’entraîner sur certaines surfaces car c’est interdit, on en vient à annuler des séances pour opérer une rotation. Ou on décale les séances».