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Ukraine : au 100e jour de conflit, la Russie s’acharne sur le Donbass


Les forces russes contrôlent actuellement "environ 20%" du territoire ukrainien, soit près de 125.000 km2, a indiqué jeudi le président ukrainien. (Photo : AFP)

L’invasion de l’Ukraine par la Russie atteint vendredi son 100e jour, une offensive qui a permis à Moscou de s’emparer de 20% du territoire ukrainien et qui se concentre sur la région du Donbass (est) et sa ville stratégique de Severodonetsk.

« Nous avons rencontré quelques succès dans la bataille pour Severodonetsk. Mais il est encore trop tôt. C’est la zone la plus difficile actuellement », a indiqué jeudi soir le président ukrainien Volodymyr Zelensky, évoquant une situation similaire aux alentours notamment à Lyssytchansk et à Bakhmout.

Concernant la région du Donbass dans son ensemble, il a indiqué que la situation n’avait pas « changé de manière significative dans la journée ». Il avait fait savoir un peu plus tôt que la situation dans l’est était « vraiment difficile (…) Nous perdons de 60 à 100 soldats par jour, tués au combat, et quelque 500 sont blessés ».

« Aujourd’hui nous combattons et tenons chaque mètre de la région de Lougansk », a indiqué vendredi matin Serguiï Gaïdaï, gouverneur de ce territoire. « Et, malgré toutes les déclarations des Russes, nous célébrons son anniversaire sous le drapeau ukrainien ». « Depuis 100 jours, ils détruisent tout ce qui démarquait la région de Lougansk », a-t-il ajouté, affirmant que plus de 400 km de « routes aux standards européens » avaient été détruites ainsi que 33 hôpitaux, 237 cliniques rurales, près de 70 écoles et 50 maternelles.

La veille, il avait affirmait que Severodonetsk, capitale administrative du Donbass, était « occupée à 80% » par les forces russes et que les combats font rage dans les rues. Les forces russes contrôlent actuellement « environ 20% » du territoire ukrainien, soit près de 125.000 km2, a indiqué jeudi le président ukrainien.

Avant l’invasion, les forces russes ou prorusses y contrôlaient 43.000 km2, depuis l’annexion de la Crimée et la prise d’un tiers du Donbass en 2014. Depuis le 24 février, elles ont notamment avancé dans l’est et au sud, le long des mers Noire et d’Azov, contrôlant désormais un corridor côtier stratégique reliant l’est russe à la Crimée.

Après l’échec de leur offensive-éclair pour faire tomber le gouvernement de Kiev, les forces russes se concentrent sur la conquête du Donbass où se joue désormais une guerre d’usure.

Marioupol bis?

Les dirigeants ukrainiens ont ces derniers jours accusé Moscou de vouloir faire de Severodonetsk un « nouveau Marioupol ». Ce port stratégique sur la mer d’Azov, conquis mi-mai après la reddition de plus de 2.000 combattants ukrainiens qui s’étaient retranchés dans l’aciérie Azovstal, a été largement détruit par le pilonnage russe.

La pression russe reste également importante sur Donetsk, l’autre région du Donbass, notamment Sloviansk, à quelque 80 km à l’ouest de Severodonetsk. Les habitants de la région manquent notamment de gaz, d’eau et d’électricité, selon Kiev. L’Ukraine attend des livraisons de systèmes de lance-missiles plus puissants promis par le président américain Joe Biden, en espérant que cela change le rapport de force sur le terrain.

La Russie a affirmé jeudi avoir stoppé l’afflux de « mercenaires » étrangers voulant combattre aux côtés de l’armée de Kiev, à force de leur infliger de lourdes pertes ces dernières semaines. Selon le ministère russe de la Défense, le nombre de combattants étrangers a été « quasiment divisé par deux », passant de 6.600 à 3.500, et un « grand nombre » d’entre eux « préfèrent quitter » le pays « le plus rapidement possible ». Des lignes de chemin de fer dans la région de Lviv (ouest), où arrivent notamment les armes livrées à l’Ukraine par les pays occidentaux –aide dénoncée par Moscou– ont été bombardées.

Dans le sud, les Ukrainiens s’inquiètent d’une possible annexion des régions conquises par les forces russes, Moscou évoquant des référendums dès juillet. A Mykolaïv, près d’Odessa, les bombardements russes ont fait au moins un mort et plusieurs blessés dans la population civile, a fait savoir jeudi soir le commandement ukrainien de la région sud.

Sur le plan diplomatique, les pays de l’UE ont approuvé jeudi un sixième paquet de sanctions contre Moscou incluant un embargo, avec des exemptions, sur les achats de pétrole mais renoncé à inscrire sur la liste noire le chef de l’Eglise orthodoxe russe, le patriarche Kirill, sous la pression de la Hongrie.

Accord des 27

Le texte doit encore recevoir l’accord écrit de chaque Etat membre en vue de sa publication vendredi au Journal officiel pour permettre l’entrée en vigueur des mesures, a précisé la présidence française du Conseil de l’UE.

« Les consommateurs européens seront les premiers à souffrir de cette décision. Non seulement les prix du pétrole mais aussi ceux des produits pétroliers augmenteront. Je n’exclus pas qu’il y ait un grand déficit de produits pétroliers dans l’UE », a déclaré le vice-Premier ministre russe chargé de l’Energie Alexandre Novak.

Aux Etats-Unis, l’administration Biden a annoncé de nouvelles sanctions visant une série d’oligarques ou membres de « l’élite » de Moscou, dont la porte-parole de la diplomatie russe Maria Zakharova. « Je suis reconnaissant envers le président Biden, tous nos amis américains et la population des Etats-Unis pour leur soutien », a relevé M. Zelensky jeudi soir. Le secrétaire général de l’Otan Jens Stoltenberg a estimé jeudi que les pays occidentaux devaient se préparer « à une guerre d’usure » sur le « long terme ».

La guerre en Ukraine « pourrait se terminer demain, si la Russie mettait fin à son agression », avait déclaré mercredi M. Stoltenberg lors d’une conférence de presse aux côtés du chef de la diplomatie américaine Antony Blinken. Mais « nous ne voyons aucun signe dans cette direction à ce stade », avait-il ajouté. La guerre menée par la Russie en Ukraine va durer encore « de nombreux mois », avait abondé M. Blinken.