Ce samedi, à Yokohama, Jeanne Lehair est devenue la première triathlète grand-ducale à monter sur un podium en World Triathlon Championship Series, le plus prestigieux circuit mondial. Et comme elle ne fait pas les choses à moitié, elle repart avec l’or!
Jeanne Lehair est une triathlète exceptionnelle. Et même si elle n’a pas toujours la chance de son côté, quand le talent est là, à un moment ça se voit. On peut dire que la mésaventure cruelle de Paris-2024, où un morceau d’élastique avait cassé son dérailleur, appartient désormais au passé. Et c’est une jeune femme résolument tournée vers Los Angeles-2028 qui a repris le chemin de la compétition.
Cette année, après une rentrée anodine en pulvérisant le record de l’Aquathlon de la Coque en janvier, elle avait enchaîné en prenant une belle 7e place à la WTCS d’Abou Dhabi. Et il y a quelques semaines, elle avait fait des débuts plus qu’encourageants sur 70.3 en se classant deuxième à Valence, performance qui la qualifiait pour les championnats du monde de la spécialité, en fin d’année.
Mais en 2025, son gros objectif, c’est les WTCS. Et justement, elle était au départ, ce samedi matin heure luxembourgeoise, à Yokohama, au Japon. Une épreuve où figuraient au départ les meilleures mondiales à l’image de l’Allemande Lisa Tertsch, vainqueur à Abou Dhabi ou encore la Française Cassandre Beaugrand, championne olympique à Paris. Pas de quoi impressionner une Jeanne Lehair visiblement relax : «Elle était très détendue au départ. Elle n’avait pas de pression», explique Thomas Andreos, le DTN de la FLTri, présent sur place. Et d’ajouter : «Elle savait qu’elle était plutôt en forme même si elle était encore un peu fatiguée du 70.3. Mais elle ne s’attendait à rien.»
Et d’entrée, elle est dans le coup : «Elle prend un super départ en nat. Elle est tout de suite dans les deux ou trois premières. À la première bouée, elle se fait rejoindre par une Autrichienne qui nage très fort.» Finalement, c’est un trio qui se détache quelque peu avec Jeanne Lehair, Lisa Terstch et donc l’Autrichienne Therese Feuersinger. Visiblement, le fait que ça se nage sans combinaison n’a pas été un problème pour la Luxembourgeoise : «L’eau était à 20 degrés. Peut-être que certaines ont eu du mal avec la température. Mais pas Jeanne.»
Les trois jeunes femmes prennent une quinzaine de secondes d’avance pour prendre le départ de la partie à vélo. Un vélo qui sera fatal à Cassandre Beaugrand : «Il a plu toute la journée. La route était mouillée, c’était assez technique. Cassandre a chuté lourdement sur l’épaule, les Français l’ont conduite à l’hôpital pour vérifier s’il n’y avait pas de fracture.» Jeanne et l’Autrichienne essaient de creuser l’écart. Mais «comme d’habitude, Lisa Tertsch ne participe pas. Elle sait qu’elle est très forte en course à pied donc pour elle l’objectif c’est de poser le vélo en ayant fait le moins d’effort possible.» Le trio se fait donc logiquement rejoindre par le reste de la troupe.
Ce qui n’empêche pas Jeanne Lehair de rester très concentrée : «Elle a été actrice pendant toute la partie vélo. Comme la route était glissante et qu’il y avait un gros groupe, elle savait qu’il y avait un risque de chute si elle se laissait glisser à l’arrière. Du coup, elle était tout le temps dans les toutes premières places. Bien concentrée.»
Le paquet arrive groupé à la dernière transition. Et la Luxembourgeoise se montre très performante. C’est en effet elle qui s’élance en tête pour les 10 km de course à pied. Elle ne relâche pas son effort et comptera même jusqu’à une quinzaine de secondes d’avance sur ses poursuivantes. Parmi lesquelles une certaine Beth Potter qui ramène un petit groupe dans le sillage de Jeanne Lehair : «C’était un peu dur sur la fin. Beth fait une très belle deuxième partie de course à pied et ramène Lisa sur les talons de Jeanne. Mais Jeanne parvient à garder quatre petites secondes d’avance à l’arrivée. Il ne fallait pas un tour de plus», rigole Thomas Andreos.
Énorme émotion en franchissant la ligne
En franchissant la ligne d’arrivée, Jeanne Lehair ne peut contenir son émotion. Il faut dire qu’elle, qui avait déjà terminé deux fois au pied du podium, à Hambourg l’an passé et Montréal l’année précédente, n’était jamais montée sur la boîte en WTCS. Et c’est donc directement sur la plus haute marche qu’elle inaugure son palmarès. Ça valait bien quelques petites larmes.
Pour Jeanne Lehair, désormais deuxième au classement général de la WTCS derrière Lisa Tertsch, c’est un début de saison quasi-idéal. Elle va rapidement rentrer en Europe car dans deux semaines se profile déjà la prochaine épreuve. Ce sera en Sardaigne, du côté d’Alghero, dans deux semaines. Avec, pourquoi pas, l’idée de réaliser la passe de deux!
Romain Haas
Le classement : 1. Jeanne Lehair (LUX) 1 h 51’33 »; 2. Beth Potter (GBR) 1 h 51’37 »; 3. Lisa Tertsch (ALL) 1 h 51’39 »; 4. Gwen Jorgensen (USA) 1 h 51’52 »; 5. Annika Koch (ALL) 1 h 51’55 »; 6. Diana Isakova (AIN) 1 h 52’03 »; 7. Rosa Maria Tapia Vidal (MEX) 1 h 52’19 »; 8. Tilda Mansson (SUE) 1 h 52’24 »; 9. Taylor Spivey (USA) 1 h 52’27 »; 10. Maria Tome (POR) 1 h 52’41″…