L’abattement de maintien dans la vie professionnelle (AMVP), c’est une nouvelle incitation fiscale pour tenter de freiner les départs anticipés. Une mesure «socialement juste», selon Gilles Roth.
L’abattement de maintien dans la vie professionnelle (AMVP) va-t-il participer à allonger le temps de travail de ceux qui pourraient prétendre à leur retraite avant l’âge de 65 ans ? C’est en tout cas ce qu’espère le gouvernement qui a déposé un projet de loi à cet effet. Une incitation fiscale qui pourrait ne pas laisser indifférents celles et ceux qui hésitent à partir avant l’âge légal.
En tout cas, cette mesure est devenue un sujet qui s’invite dans les conversations entre amis, autour d’un verre après la journée de travail. Sabrina, qui vient de fêter ses 63 ans, pourrait déjà demander sa pension. Elle a élevé deux enfants, mais n’a pas de carrière complète au Luxembourg. «J’étais décidée à faire les démarches en me disant que j’allais en profiter avant l’heure, mais cette nouvelle mesure me paraît assez séduisante et je vais l’étudier de plus près», confie cette cadre, employée dans un service de communication.
Elle ignore encore si le montant de l’abattement la fera changer d’avis, il faut d’abord le calculer. Comme beaucoup, elle a eu vent des grandes lignes du projet et des deux exemples fournis par le ministre des Finances, Gilles Roth. Le contribuable aura droit à un abattement de revenu imposable qui s’élève à 9 000 euros par an dans la limite de 750 euros par mois. «Sur le papier, l’idée est vraiment sympa, et je me dis qu’à ce tarif-là, je pourrais faire l’effort de travailler encore deux ans de plus, même si je m’étais déjà imaginée en jeune retraitée.»
«Très tentant pour ceux qui n’ont pas leurs 40 années de cotisation»
Grâce à l’introduction de l’AMVP, le contribuable qui disposerait d’un revenu imposable ajusté de 50 000 euros, en classe d’impôt 1, ne devrait plus payer que 4 820 euros d’impôt contre 7 854 sans cet abattement, soit un gain de 3 034 euros. La base imposable a pu être réduite de 50 000 euros à 41 000 grâce à ce nouvel abattement.
Pour un revenu imposable de 100 000 euros, le même contribuable bénéficierait d’un gain de 3 756 euros à la suite de l’introduction de cet abattement, ce qui est plus élevé que dans le premier cas de figure, mais il faut noter que l’impôt qui lui restera à payer sera également nettement plus conséquent, s’élevant à 24 881 euros. Sabrina se situe entre ces deux tranches de revenu et va sérieusement étudier la question.
Pour Jean-Philippe, qui fêtera ses 60 ans en août prochain, le calcul est vite fait. «C’est très tentant pour ceux qui n’ont pas leurs 40 années de cotisation, mais franchement je ne compte pas continuer à travailler pour si peu. Je veux dire par là que je vais me contenter de ma pension le plus tôt possible, même si je n’ai que 38 ans de carrière», explique cet employé dans une compagnie d’assurance. Selon son calcul rapide, cette mesure lui ferait gagner moins de 300 euros par mois, pas assez pour le convaincre de prolonger sa carrière. «Évidemment, j’ai calculé à la louche, mais je pense que c’est à peu près ça», ajoute-t-il.
Les faibles revenus sont les gagnants
Récemment, les députés ont interrogé le ministre en commission pour savoir ce que cet abattement représentait pour les personnes travaillant au salaire minimum, puisque leur base imposable est très basse et qu’elles ne profiteraient donc pas d’un abattement fiscal. Pour cette catégorie de contribuables, le mécanisme permettrait, selon le ministre, une base imposable négative, faisant bénéficier les personnes concernées d’un avantage d’une centaine d’euros par mois. Les équipes du ministre ont affirmé qu’elles feraient parvenir la méthode de calcul exacte aux députés. C’est aussi ce qu’attendent les futurs retraités, du moins ceux qui remplissent toutes les conditions pour prendre une retraite anticipée.
Le ministre des Finances, Gilles Roth, parle d’une mesure «socialement juste», car les personnes à faible revenu gagnent le plus proportionnellement.
Afin d’éviter d’éventuels abus, le projet de loi prévoit l’obligation de fournir une certification d’éligibilité à la pension personnelle. Un document à demander aux organismes de pension compétents luxembourgeois et à remettre à l’administration des Contributions directes.
Le contribuable bénéficie de l’entièreté de l’abattement mensuel à partir du mois suivant le mois d’ouverture des droits à la pension personnelle jusqu’au mois durant lequel il exerce ses droits à la pension personnelle ou à la date d’anniversaire de ses 65 ans.