Au Grand Théâtre, la «Jam des autrices et auteurs» tient sa deuxième édition ce samedi. Auteurs installés ou émergents, les participants doivent composer un texte en 24 heures, et abordent ce saut dans le vide moins comme un défi que comme une source de plaisir et d’inspiration.
C’est un rendez-vous qui s’est installé au Grand Théâtre il y a un an, et né de façon un peu impromptue. Et à juste titre, puisque la «Jam des autrices et auteurs» a en effet quelque chose du saut dans le vide, en transposant à la littérature et à l’écriture dramatique cette pratique musicale qui repose entièrement sur l’improvisation. La règle est la suivante : quatre autrices et auteurs reçoivent le même thème (resté secret), à partir duquel chacun doit composer en 24 heures une œuvre courte, d’environ quinze minutes, qu’ils feront découvrir ce samedi soir sur la scène du théâtre. L’auteur Ian De Toffoli, concepteur du projet, y voit une «excellente plateforme d’expérimentation» pour les auteurs et, pour le public, «un moment de grande liberté et de joie».
Pour cette deuxième «jam session», l’auteur associé aux Théâtres de la Ville de Luxembourg a réuni l’écrivain et dramaturge Tullio Forgiarini, la comédienne et metteuse en scène Aude-Laurence Biver, l’autrice Céline De Bo et le comédien Ashton Laffineur. «Le but, explique Ian De Toffoli, est d’avoir côte à côte des auteurs confirmés et des émergents, voire des tout jeunes, qui ont à peine commencé à écrire.» Et de déclencher ainsi «un mélange de genres, de styles, de tonalités et de langues», en admettant tout de même que cette édition 2025 devrait se dérouler «sous le signe de la francophonie», estime son concepteur.
Le regard d’un autre sur son texte, ça fait avancer sa propre écriture
Pas forcément familiers les uns des autres, et aux niveaux d’expérience, sensibilités et styles d’écriture différents, les quatre auteurs choisis viennent pourtant chercher plus ou moins les mêmes choses à la «Jam des auteurs» : tester de nouveaux textes, sortir de sa zone de confort, prendre de la confiance et de l’inspiration… À titre d’exemple, Aude-Laurence Biver, que l’on connaît pour son travail sur les planches et de mise en scène, «écrit depuis assez longtemps, mais elle n’a jamais tout à fait osé mettre en avant son écriture ou la proposer à des théâtres», glisse Ian De Toffoli. Céline De Bo assure elle que «le regard d’un autre auteur ou d’une autre autrice sur son texte, ça fait avancer sa propre écriture». Et il faut souligner cet avantage que «chez nous, le milieu du théâtre est petit, on a de l’admiration les uns pour les autres, de la curiosité aussi, et il y a beaucoup de solidarité et de bienveillance».
«Semer des graines»
«On n’est pas là pour chercher l’approbation de qui que ce soit», apprécie pour sa part Ashton Laffineur. Le benjamin de cette édition, à qui Ian De Toffoli a proposé de venir «jammer» à la suite de leur rencontre au dernier TalentLAB, écrivait longtemps avant de devenir comédien, mais «plutôt à des fins personnelles, comme un hobby». Même s’il a depuis pris des cours d’écriture et «gagné en technique», cet exercice sera une «grande première». Lui dit rechercher avant tout «le challenge» et «l’inspiration» : «J’ai envie de véhiculer mes idées, mon univers, mes opinions; l’écriture est un des moyens de le faire, mais je ne l’ai pas tellement fait jusqu’ici.»
Idem pour Céline De Bo, déjà plus installée en tant qu’autrice mais qui est, elle, arrivée à l’écriture par le chemin inverse de son collègue, ayant débuté dans la comédie, et particulièrement «l’improvisation théâtrale», avant de préférer au jeu «l’écriture et la transmission». C’est en quelque sorte un retour aux sources pour elle, qui se dit ravie de retrouver «le plaisir que cela procure de ne pas savoir et de devoir y aller direct». «Je suis dans une phase où j’ai clôturé pas mal de textes, et peut-être que cette « jam » va me relancer sur autre chose, ouvrir une nouvelle brèche ou, en tout cas, semer des graines, pas seulement dans ma tête mais dans celle de chacun et chacune», ajoute-t-elle.
Pour faire honneur aux origines musicales de la «jam session», les textes seront présentés sur un accompagnement musical – improvisé lui aussi – signé Pol Belardi, qui «réagira» donc au piano aux mots et aux rythmes des phrases. Voilà un autre argument qui réjouit Céline De Bo, qui adore «performer (s)es textes en live avec des musiciens». Elle risque d’être servie : «Pol est un grand maître dans l’improvisation», abonde Ian De Toffoli, qui loue encore la «spontanéité assez superbe» du musicien et assure qu’il incarnera «le grand effet spécial» d’une soirée qui en appelle d’autres. Car «c’est vraiment un truc à pérenniser», jure le concepteur, qui souhaite en faire un rendez-vous annuel. Son idée a en tout cas déjà fait des petits, puisqu’en novembre, une «Jam des chorégraphes» a eu lieu déjà au Grand Théâtre, sous la curation d’Elisabeth Schilling, et destinée elle aussi à être reconduite.
Ce samedi, à 17 h. Grand Théâtre – Luxembourg.