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[Tennis] Chris Rodesch : «Je suis fier de ce que j’ai accompli»


Chris Rodesch a enchaîné les succès. (Photo : Luis Mangorrinha)

Auteur d’un bond de près de 350 places au ranking mondial en l’espace de quelques mois seulement, le n° 1 grand-ducal dresse le bilan de sa splendide demi-saison sur le circuit professionnel.

Cette saison 2024 a été incroyable pour vous. Ou plutôt devrait-on dire demi-saison ?

Chris Rodesch : J’ai d’abord joué de janvier à mai sur le circuit universitaire (NDLR : avec son université de Virginie), puis après j’ai continué l’année sur le circuit professionnel à temps plein à partir du mois de mai, une fois mes études terminées.

Avant de faire votre retour en Europe, vous n’avez pas pu aider votre équipe des Virginia Cavaliers à défendre le titre NCAA en raison d’une mononucléose. On imagine que cela a dû être un peu frustrant, en sachant qu’en plus vous aviez remporté les deux dernières éditions ?

On a joué de malchance cette année avec les blessures. Notre n° 2 a, lui, contracté une blessure à l’épaule par exemple. C’était un peu frustrant pour nous, surtout cette classe qui a terminé l’université. Mais on doit aussi dire qu’on a eu la chance d’avoir été épargnés par les blessures au cours des années précédentes, au terme desquelles on a gagné deux fois le titre et trois fois celui dans notre conférence.

Vous avez ensuite vite retrouvé le sourire sur le circuit Futures où vous avez enchaîné les bons résultats…

J’ai bien commencé, oui, j’ai joué à mon niveau et je me suis aussi bien amélioré mentalement. Je crois aussi que le fait de ne plus avoir l’école à côté m’aide à être plus clair sur le court. Je peux mieux récupérer car je n’ai pas de devoirs à faire, ou à étudier pour un examen. Je pense que cela m’a toujours un peu freiné dans mon niveau de tennis. Désormais, je peux être focus à 100 % et d’ailleurs on le voit en termes de résultats. Je me donne deux années pour me consacrer à fond au tennis. Si je vois que je ne m’améliore plus, j’arrêterai. Mais pour l’heure, je veux vraiment faire tout ce qui est possible afin de m’améliorer encore pour atteindre mon potentiel maximal.

Vous avez même remporté cinq titres de suite à ce niveau…

Pendant cette période là, et même après, quand j’ai perdu en demi-finale à cause d’une blessure en Tunisie, ou plus tard lorsque j’ai fait un quart et une finale en Challenger, j’ai continué à prouver mon niveau de jeu. Bien sûr, ces cinq titres m’ont rendu très fier. Ce n’est pas facile de gagner autant de matches de suite à ce niveau. Et je crois que je n’aurais pas été capable de le faire sans mes quatre années passées aux États-Unis. Durant cette période, j’ai joué en tant que n° 1 et comme on était les favoris sur toutes les rencontres, puisqu’on avait une équipe énorme, je me devais de gagner chaque match. De ce fait, il y avait quand même toujours une certaine pression. Quand j’ai gagné le 3e ou 4e tournoi de suite, j’ai ressenti que mes adversaires jouaient mieux parce qu’ils n’avaient rien à perdre, et j’ai réussi à résister.

Sans mes quatre années passées aux États-Unis je n’aurais pas été capable de gagner autant de matches de suite

Et puis, vous avez poursuivi votre saison en participant à des Challengers, le niveau supérieur. Avez -vous pu intégrer les tableaux principaux grâce à des wild cards obtenues suite à vos bons résultats sur le circuit universitaire ?

J’ai en effet pu jouer quelques Challengers grâce à mes wild cards, mais ceux que j’ai disputés en fin d’année, c’était grâce à mon ranking. Par exemple au tournoi du Canada, j’ai directement pu intégrer le tableau principal avec mon classement. Actuellement, je suis aux alentours de la 300e place, donc je vais toujours m’inscrire avec mes wild cards, mais si j’intègre le tableau grâce à mon ranking, je garde mes wild cards. Il m’en reste quatre à utiliser jusqu’à juin.

Justement, vous avez aussi obtenu votre toute première victoire en carrière dans le tableau principal d’un tournoi Challenger…

À Charlottesville, c’était la première fois que je remportais un match dans le tableau principal d’un Challenger. Ensuite, j’ai réussi à me qualifier en quarts de finale. Après cela, j’ai fait une semaine d’entraînement aux États-Unis, puis je suis allé au Canada où j’ai joué ma première finale à ce niveau.

À cette occasion, vous avez éliminé au 1er tour l’Australien James Duckworth, classé au 77e rang à l’époque, au terme d’un match dantesque. S’offrir son premier top 100, cela doit forcément être un moment particulier ?

J’en suis fier. J’ai très bien joué ce match là en restant focus. En jouant face à des gars du top 150, j’ai remarqué que la vitesse de balle n’était pas plus rapide qu’en Futures, mais qu’ils étaient vraiment plus solides du fond de court. Plus solides mentalement aussi. Ils sont concentrés pendant l’intégralité du match et ne commettent pas beaucoup de fautes. Pendant ce match, j’étais mené 5-1 et 40-15 sur son service. Mais je suis parvenu à gagner le premier set 7-6. C’était quand même un nouveau petit déclic pour moi : je me suis prouvé que je pouvais gagner un top 100 et que j’avais la vitesse de balle et la concentration nécessaires pour gagner des matches comme celui-là.

Un des buts que je me suis fixés, c’est de disputer les qualifications de Roland Garros

Continuer votre progression à l’échelon du dessus était la suite logique. Vous vous en tirez d’ailleurs plutôt bien…

J’étais vraiment content de gagner mon 1er tour à Charlottesville car j’avais ce sentiment qu’il fallait que je franchisse une étape. Cela a été comme une sorte de déclic. Je me suis dit : ’’Ah ok, c’est la place où je dois être.’’ Et j’ai confirmé par la suite au Canada. En Challenger, tu n’as jamais un match facile, alors qu’en Futures, parfois, tu peux avoir un 1er et même un 2e tour où tu peux faire un mauvais match, mais gagner. En Challenger, c’est plus rare, même si ça peut aussi arriver, à condition d’être vraiment très focus mentalement. Je crois que ça va être un step à encore améliorer pour 2025. J’espère pouvoir le faire. En tout cas, je m’entraîne chaque jour pour ça.

Tous ces bons résultats vous ont permis de faire un bond de près de 350 places au ranking mondial…

Je crois qu’en tant que joueur, on essaye de ne pas trop regarder le ranking… Mais oui, être 300e à la fin de l’année en ayant joué seulement cinq mois sur le circuit, c’est vraiment bien. Je suis fier de ce que j’ai accompli. Et puis maintenant, je n’ai rien à défendre pendant six mois, ce qui fait que je n’ai pas de pression, comparé aux autres. C’est un truc positif pour moi. Je vais pouvoir aller sur le court et jouer librement.

Est-ce que l’exemple Ben Shelton, qui lui aussi est sorti de l’université et fait désormais partie des meilleurs joueurs mondiaux, est une source de motivation ?

Ça devient de plus en plus intéressant d’aller aux États Unis. Le tennis est de plus en plus physique et, mentalement, il faut être mature. Dès son arrivée sur le circuit, Shelton était mature mentalement et physiquement. Je crois que cela l’a aidé pour éviter les blessures aussi. Je l’ai joué à trois reprises avant la saison durant laquelle il a explosé sur le circuit, dont une fois où j’ai perdu 7-5 au 3e set. Ça me motive de voir qu’il fait partie des meilleurs mondiaux. C’est aussi le cas d’autres joueurs comme Adam Walton, qui est top 100 maintenant et que j’ai battu à l’université. Et je pense qu’on va voir de plus en plus de joueurs sortis des universités intégrer le top 100.

Qu’est-ce qu’on peut vous souhaiter pour la saison 2025 ?

Au niveau du ranking, je n’ai pas un objectif précis. Ce que je veux, c’est continuer d’améliorer mon jeu. C’est le point le plus important. Un des buts que je me suis fixé, c’est de disputer les qualifications de Roland Garros. J’avais déjà cette idée dans un coin de la tête pour l’Open d’Australie, après ma finale au Canada, mais ensuite j’ai eu la malchance de tomber malade au Mexique, donc je n’ai pas pu faire grand-chose. J’aurais peut-être eu une petite chance d’y participer. Roland, c’est à côté de la maison et ce serait beau comme premier grand chelem. Mais j’ai encore des points à prendre, on verra comment cela va se passer.

Quelques chiffres

28 Comme le nombre de victoires d’affilée décrochées par Chris Rodesch sur le circuit Futures du 17 juillet, date de son premier tour à Esch, au 12 octobre, date de son abandon en demi-finale en Tunisie en raison d’une blessure. À titre de comparaison, le record est détenu par l’Espagnol Arnau Brugues-Davi, invaincu entre mars 2011 et mai 2012, soit une série de 44 succès de rang.

5 Comme le nombre de titres consécutifs remportés (Esch, Ystad, Hong Kong à deux reprises et Monastir), toujours sur le circuit Futures, durant ce laps de temps.

346 Comme le nombre de places gagnées par le Luxembourgeois entre le 25 juin, date de son premier match en Europe après avoir terminé ses études aux États-Unis (il pointait alors au 648e rang à l’ATP), et lundi, date de publication du dernier classement, où le jeune homme de 23 ans est classé 302e joueur mondial.

8 Comme le nombre de victoires remportées en fin d’année sur le circuit Challenger (pour 4 défaites).

77 Comme le ranking mondial de l’Australien James Duckworth, premier membre du top 100, que le n° 1 grand-ducal a épinglé à son tableau de chasse. C’était le 12 novembre dernier à l’occasion du 1er tour du Challenger de Drummondville, au Canada.