Accueil | A la Une | Télétravail des frontaliers : la France reste muette

Télétravail des frontaliers : la France reste muette


Le prochain débat public à la Chambre des députés à la suite du succès de la pétition n° 2384 pour l’introduction de deux jours de télétravail pour tous, y compris les frontaliers, qui a recueilli près de 14 000 signatures, devrait permettre d’approfondir encore le sujet. (Photo Pixabay)

Tandis que le Luxembourg veut ouvrir des négociations pour porter le seuil de télétravail des frontaliers à 41% – soit deux jours par semaine – sans que l’affiliation à la sécurité sociale ne soit remise en cause, la France n’a pas encore répondu à l’invitation.

Entre accords fiscaux bilatéraux et règles européennes en matière sécurité sociale, le modèle du télétravail qui s’est imposé avec la crise sanitaire se heurte à un cadre complexe qui ne correspond plus à la réalité du terrain et aux nouvelles attentes des salariés.

Interrogés par les députés CSV Gilles Roth et Marc Spautz, les trois ministres du Travail, de la Sécurité sociale et des Finances, ont fait le point, dans une réponse parlementaire commune, sur l’état actuel des négociations avec les pays limitrophes.

Et notamment la discussion, début septembre, entre le cabinet du ministre de l’Économie français, Bruno Le Maire, et des parlementaires lorrains, au cours de laquelle un «télétravail illimité avec compensation fiscale intergouvernementale» a été évoqué.

Un nouveau seuil de tolérance au 1er janvier

Les ministres Georges Engel, Claude Haagen et Yuriko Backes rappellent d’abord que sur le plan fiscal, l’accord conclu entre le Luxembourg et la France à la dernière Commission intergouvernementale franco-luxembourgeoise en octobre 2021 a augmenté le seuil de tolérance de 29 à 34 jours de télétravail annuels.

Puis, le 30 septembre 2022, à l’occasion de la visite de travail du Premier ministre, Xavier Bettel, à Paris, la ministre des Finances a pu fixer, avec son homologue français, les modalités techniques de cette mesure applicable à partir du 1er janvier 2023.

En parallèle, la question du télétravail des 112 500 travailleurs frontaliers français – un quart des salariés du Luxembourg en 2021– a également été évoquée lors d’entrevues entre le Premier ministre et les autorités françaises, sans toutefois que le système de compensation fiscale intergouvernementale ou la méthode de prélèvement de l’acompte en question n’aient fait partie des discussions.

Des dérogations face à la crise sanitaire

Sur le plan de la sécurité sociale cette fois, les règles européennes imposent à tout salarié d’être affilié à la sécurité sociale de son pays de résidence dès qu’il y exerce une activité professionnelle dépassant 25 % de son temps de travail.

Un seuil valable pour tous les secteurs et tous les pays entrant dans le champ d’application de ce règlement. Et si des dérogations ont été accordées ces dernières années pour faire face à la crise sanitaire, celles-ci prendront fin le 31 décembre, après avoir été prolongées à la demande du Luxembourg et des pays limitrophes.

Ce qui ne satisfait pas le gouvernement qui se dit favorable au relèvement de ce plafond de 25 % : dès le mois d’août, le ministère de la Sécurité sociale a formellement demandé l’ouverture de négociations multilatérales avec la Belgique, la France et l’Allemagne pour porter ce seuil à 41 %, soit deux jours de télétravail par semaine en moyenne, sans avoir à changer d’affiliation.

Une mesure à laquelle pourraient également s’associer les Pays-Bas, concernés eux aussi. Encore faut-il que les partenaires avancent dans ce sens, et à ce stade, le Luxembourg n’a pas encore reçu de réponse officielle de la France, selon les ministres.

Un cadre européen pour tout simplifier

Quant à la position du gouvernement sur la création d’un cadre européen du télétravail valable pour toute l’Union, il estime que cela «permettrait de réduire les charges administratives entre pays et d’assurer une plus grande sécurité juridique avec des règles homogènes».

Le Luxembourg soutient d’ailleurs, au sein du Conseil de l’Union, les États membres qui demandent que ce nouveau régime soit pris en compte dans la révision en cours du règlement précité. Mais «la sécurité sociale et la fiscalité sont des matières très hétérogènes, avec des spécificités bien distinctes, qu’il serait difficile, voire impossible, de combiner en une seule et même réglementation», préviennent les ministres.

Le prochain débat public à la Chambre des députés à la suite du succès de la pétition n° 2384 pour l’introduction de deux jours de télétravail pour tous, y compris les frontaliers, qui a recueilli près de 14 000 signatures, devrait permettre d’approfondir encore le sujet. La date sera fixée très bientôt.