L’artiste drag-queen, qui a subi un flot de haine sans précédent la semaine passée, sera bien présente ce samedi 29 juillet à la bibliothèque d’Esch-sur-Alzette pour assurer ses lectures. Et garde la tête haute.
S’il fallait un mot pour qualifier l’histoire que vous vous apprêtez à lire, ce serait certainement le suivant : «résilience». Même si les termes de «courage» ou de «conviction» pourraient également convenir. À vous de faire votre choix.
L’histoire contée ici n’est autre que celle de Tatta Tom, artiste drag-queen luxembourgeoise, qui sillonne les quatre coins du pays depuis maintenant cinq ans pour rencontrer des enfants et leur faire la lecture.
Son sac à main rempli d’aventures à partager avec les plus jeunes, elle n’hésite pas à aborder des thèmes importants comme la tolérance ou encore la diversité au sein de la société.
Munie de ses cornes de cerf, elle leur offre ainsi une parenthèse un peu féérique où «tout le monde est beau à sa façon». Une belle manière de voir la vie, non? Malheureusement pas pour tout le monde.
Depuis plusieurs jours, Tatta Tom subit les foudres de «haters» sur les réseaux sociaux, après l’annonce de deux nouvelles lectures ce samedi 29 juillet à la bibliothèque d’Esch-sur-Alzette.
Des attaques violentes, mesquines : «vous êtes dégueulasse», «malade», peut-on notamment lire sur le post Facebook annonçant l’événement. Des mots qui ont profondément touché l’artiste et indigné certains représentants politiques, à l’image de Taina Bofferding ou de la municipalité d’Esch, qui sont rapidement montés au créneau pour la défendre.
«Je n’avais jamais subi une telle vague de haine jusqu’à aujourd’hui», se désole Tatta Tom, toujours bouleversée une semaine après les faits. «C’est grâce au soutien de mes proches, qui m’ont dit de prendre du recul face à tout ça, que j’ai pu garder la tête haute, mais c’était très compliqué.»
Plusieurs plaintes ont été déposées, notamment à la suite des menaces de mort. «Ceux qui s’en sont pris à moi ne s’informent pas. Ils ne savent pas ce que je raconte aux enfants, ils ne s’y intéressent même pas. Ils me tapent dessus sans savoir», poursuit l’artiste.
«Mon meilleur public ? Les enfants»
C’est en 2019 que Tatta Tom se révèle au public, après une collaboration avec la bibliothèque d’Esch-sur-Alzette. Avant cela, c’était sous le pseudonyme de Séraphine Mirage qu’elle proposait des lectures, aux adultes cette fois-ci.
Un intérêt pour le travestisme qui remonte à sa jeunesse lorsqu’elle regardait des artistes drags à la télévision avec ses parents, des étoiles plein les yeux. «J’ai toujours adoré cet art de la scène. Je me suis lancée à 18 ans, lors de ma première Pride à Trèves. J’ai fait mes propres recherches et je me suis lancée, à mon rythme.»
Après 20 ans sous les traits de Séraphine, c’est donc via un nouveau personnage, Tatta Tom, femme à barbe et à cornes, destiné spécifiquement aux enfants, qu’elle propose des lectures interactives d’ouvrages spécialement traduits en luxembourgeois.
«L’aspect LGBTQIA+ n’est pas le thème principal de ces histoires, comme beaucoup le pensent. Ce sont plutôt des histoires banales, comme deux personnes qui partagent une glace par exemple», explique-t-elle, soulignant, avec le sourire, que «les enfants sont le meilleur public que je n’aie jamais eu».
«Le message principal que je veux leur faire passer durant ces moments, c’est que chacun a le droit d’être comme il est. La société ne pourra être que plus forte si elle accepte toutes les diversités. C’est très positif et c’est ce qui transparaît dans les histoires que je leur lis.»
Ce samedi, deux lectures sont proposées aux enfants : l’une, à partir de 6 ans et l’autre, à partir de 10 ans.
Si des «précautions particulières» ont été prises à la suite des événements de la semaine dernière, Tatta Tom ne veut pas s’avouer vaincue et souhaite poursuivre autant que possible son travail auprès des jeunes. «C’est justement à cause de ce qui s’est passé qu’il faut continuer», assure-t-elle, déterminée.
D’autres rendez-vous sont d’ores et déjà prévus cet automne, dans des bibliothèques et crèches. Résiliente, jusqu’au bout.