Accueil | A la Une | Substances chimiques : une étude pour les traquer et s’en protéger

Substances chimiques : une étude pour les traquer et s’en protéger


Comme le LNS, près de 200 partenaires participent dans leurs pays respectifs au projet européen de biosurveillance «PARC». (Photo : archives lq/ julien garroy)

Dans le cadre d’un projet européen, le LNS réalise une enquête de biosurveillance prévue jusqu’en 2027 afin de mesurer la présence de produits chimiques qui se trouvent dans le corps humain et l’environnement.

À quel point sommes-nous quotidiennement exposés à des produits chimiques qui pourraient nuire à la santé? Voilà tout l’enjeu de l’étude de biosurveillance LëtzHBM menée depuis le mois de mars dernier par une équipe du Laboratoire national de santé (LNS). «La biosurveillance est une collecte de certains échantillons biologiques ou environnementaux dans la population, dans notre cas, de l’urine, du sang et des cheveux. Dans une approche plus large, on peut également inclure la surveillance environnementale, qui porte sur l’eau, l’air et la poussière», indique le Dr Maria Torres Toda, épidémiologiste environnementale au LNS.

Une fois les échantillons récoltés, ce qui prend entre deux et trois heures, ces derniers sont analysés en laboratoire afin d’analyser certains produits chimiques puisqu’«il serait pratiquement impossible de le faire pour tous». Dans le cadre de LëtzHBM, les quatre cibles sont : les plastifiants, les pesticides, les métaux et les PFAS, une large famille de substances chimiques aussi appelée les polluants éternels.

Six cents participants recherchés

La collecte est prévue de durer jusqu’en 2027 afin d’obtenir des échantillons auprès de 300 enfants, 300 adultes et 300 maisons, le tout dans les différentes régions du Grand-Duché pour parvenir à une représentativité nationale.

À ce jour, 42 enfants et autant d’adultes ont déjà participé à cette enquête basée sur le volontariat mais avec quand même quelques critères d’inclusion, dont «le fait d’avoir vécu au Luxembourg pendant au moins cinq ans avant la collecte, car cela nous donne une meilleure idée de l’exposition dans le pays». Les volontaires majeurs doivent également avoir entre 18 et 39 ans, en plus d’être parent d’un enfant âgé entre 6 et 11 ans. Un court formulaire est disponible sur le site internet du LNS* afin de signaler son envie de participer.

En plus de recevoir un bon d’achat de 30 euros par enfant et de 50 euros par adulte sur le site Letzshop.lu, les participants auront le mérite de participer à la plus grande enquête de biosurveillance nationale jamais réalisée. En 2018, l’initiative HBM4EU soutenue par l’Union européenne avait été réalisée auprès de 210 adultes au Luxembourg, sans prendre en compte les mineurs.

«Développer des valeurs de référence»

Cette fois, le panel est trois fois plus important, incluant également les enfants qui constituent une population plus vulnérable quand ils sont exposés à des polluants environnementaux.

De cette façon, l’enquête actuelle LëtzHBM permet d’améliorer la biosurveillance humaine aussi bien au niveau luxembourgeois qu’européen. Pour cause, LëtzHBM «fait partie d’un projet européen plus vaste appelé le PARC, pour « Partenariat pour l’évaluation des risques liés aux substances chimiques« , auquel trois agences européennes participent : celle de l’environnement, des produits chimiques et de la sécurité alimentaire».

Sur les 600 participants requis d’ici 2027, LëtzHBM a déjà récolté des échantillons auprès de 84 personnes, adultes et enfants. (Photo : lns)

À l’instar de l’étude du LNS, d’autres sont également soutenues par la Commission européenne dans 24 pays membres du PARC. «Les données de tous les pays européens qui participent seront rassemblées et utilisées afin de réussir à développer des valeurs de référence», résume le Dr Maria Torres Toda.

L’enjeu est grand puisque, à ce jour, il n’existe pas, à l’échelle européenne, de valeurs de référence en termes d’exposition pour la population. Une harmonisation permettra donc de contribuer à «développer des politiques appropriées dans le but de protéger la santé publique».

Des résultats à vocation collective

Cette absence de valeurs de référence explique l’absence de communication pour les résultats individuels des prélèvements biologiques (cheveux, urine, sang) de LëtzHBM. «Les participants n’auront pas leurs résultats mais un résultat global, car il n’existe pas de valeurs référence pour la majorité des produits chimiques qui ont été priorisés. Ainsi, pour la majorité de ces produits chimiques, aucun médecin ne peut dire si ce niveau est préoccupant ou non.»

Le développement de ces valeurs de référence au niveau de l’Europe prendra plusieurs années, la fin du PARC étant fixé au printemps 2029.

Par contre, pour certaines substances, il est déjà possible d’analyser les valeurs d’exposition. Les personnes dont les résultats sont problématiques seront alors contactées par les médecins du LNS et référées vers le service hospitalier national de la médecine de l’environnement au CHEM. Elles pourront bénéficier d’une prise en charge individuelle ainsi que pour leur enfant, et, si nécessaire, les autres membres du même foyer.

* Le formulaire est disponible sur : lns.lu/enquete-generale-de-biosurveillance-au-Luxembourg

De la biosurveillance sur les salades

Par le passé, le ministère de l’Environnement a déjà réalisé de la biosurveillance à partir de légumes cultivés par des habitants de quartiers proches des sites sidérurgiques à Differdange, Esch-sur-Alzette et Schifflange. Grâce à la couche grasse présente à la surface de ses feuilles, le légume à feuilles (salades, choux, céleris) peut capter et fixer les polluants de nature organique présents dans l’air environnant.

Les aiguilles des épicéas possèdent également un film protecteur gras qui fait d’elles un autre bioindicateur efficace. Tout comme la mousse qui, n’ayant pas de racines, est très sensible à l’atmosphère et accumule les polluants tels que les métaux lourds.