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Stress test pour la Santé luxembourgeoise


La ministre de la Santé, Martine Deprez, en échange, hier matin au château de Senningen, avec le Dr Hans Henri P. Kluge, le directeur régional de l’OMS pour l’Europe. (Photo : didier sylvestre)

Des experts de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) évaluent sur deux jours la force de résistance du Luxembourg en cas de crise sanitaire majeure. Les conclusions seront partagées à l’international.

L’alerte est donnée en début d’après-midi. Un virus se déclare dans un des grands hôpitaux du Luxembourg, avant de se propager à travers le pays. Dans un tel scénario, la réponse sanitaire mais aussi logistique doit être rapide et cohérente. «Il nous faut activer nos canaux pour avertir l’OMS, les autorités sanitaires de l’UE et assurer le flux d’informations», résumait Martine Deprez, la ministre de la Santé, hier, en marge d’un exercice de simulation opérationnelle organisé en présence d’experts de l’Organisation mondiale de la santé (OMS).

Le château de Senningen a servi de décor pour cet Examen universel de la santé (UHPR), un outil «offert par l’OMS aux États membres pour évaluer les capacités en matière de préparation sanitaire». Après le Portugal, le Grand-Duché n’est que le deuxième pays à mener cet exercice. «Il ne s’agit pas seulement de se préparer à lutter contre des virus, mais aussi de se préparer à des catastrophes causées par le changement climatique ou les conflits géopolitiques», précise Martine Deprez.

«Une forteresse dans le système de santé»

«En quoi c’est important ?», interroge le Dr Hans Henri P. Kluge, le directeur régional de l’OMS pour l’Europe. «Parce qu’on fait face à beaucoup d’urgences et de problèmes de sécurité. Dès lors, il est d’une grande importance de tirer les leçons de la pandémie de covid ou d’autres crises majeures», répond-il.

La santé ne devrait pas être considérée «comme un coût, mais comme un investissement». «Les deniers publics sont aujourd’hui consacrés à la sécurité et à la défense. Mais s’il n’y a pas une forteresse dans le système de santé, on sera certainement confronté à beaucoup d’autres problèmes. Si on doit fermer les frontières, l’économie s’arrête», développe le haut représentant de l’OMS.

Il préside la mission présente depuis hier au Luxembourg. De premières conclusions ont déjà pu être tirées au bout de la première journée. «Les constats s’entrecoupent avec des problèmes déjà identifiés, dont notre forte dépendance à l’étranger pour recruter notre personnel de santé. Les réseaux de transmission et d’échange de données doivent aussi être améliorés», avance la ministre chrétienne-sociale.

Plus de 60 parties prenantes sont mobilisées pour cet examen de l’OMS. Sont présents à Senningen les hôpitaux, les soins primaires, la protection civile (CGDIS), le secteur environnemental, la défense, l’université du Luxembourg et le secteur de la recherche. «Leurs contributions ont permis de garantir que l’examen reflète la diversité et l’interconnexion de notre système de santé ainsi que nos dispositifs nationaux de résilience, explique Martine Deprez. Tout s’enchaîne naturellement. Notre Stratégie nationale de résilience a d’ailleurs été discutée avec la délégation de l’OMS. Tous les ministères appelés à gérer des situations de crise sont présents autour de la table. Nous sommes tous dans le même bateau.»

La contribution majeure du ministère de la Santé est la future loi de santé publique, en cours de préparation . «Les enseignements tirés de l’examen de l’OMS seront directement intégrés à l’élaboration de cette loi afin de garantir un cadre plus solide et plus cohérent, mieux adapté aux défis futurs en matière de préparation et de réponse sanitaires», souligne Martine Deprez.

«L’OMS n’impose pas de lois»

Le futur cadre légal, reposant notamment sur les leçons tirées de la pandémie de covid, sera conforme aux cadres européens et de l’OMS. Il comportera d’ailleurs un dispositif pour endiguer une nouvelle pandémie. Dans ce contexte, l’accord trouvé à l’échelle de l’OMS sur les pandémies a suscité des inquiétudes, surtout dans le camp des covidosceptiques.

Interrogé sur ces critiques, le Dr Kluge rappelle d’abord qu’«un pays seul ne peut jamais gérer une pandémie». «Alors, la solidarité est très, très importante. Et ça, c’est l’essence de cet accord», poursuit le directeur, avant d’évoquer les nombreuses «fake news» ciblant l’OMS. «On ne va pas prendre la souveraineté des pays. L’OMS travaille avec les pays, avec confiance et solidarité. Mais on n’est pas une organisation qui impose des lois», appuie-t-il.

L’attention devrait bien plus être portée sur l’action commune des membres de la communauté internationale : «Être ensemble pour mieux se préparer, c’est vraiment essentiel, surtout pour les vaccins mais aussi les médicaments».