Après avoir surmonté une entrée dans l’emploi compliquée, ces personnes autistes diagnostiquées sur le tard s’épanouissent au travail en aidant leurs pairs chacune à leur façon. Joanne Theisen a centralisé toutes les ressources disponibles.

Les besoins spécifiques liés à son autisme l’ont privée du rêve de sa vie : devenir enseignante. Mais Joanne Theisen, 36 ans, a trouvé un autre moyen de transmettre son savoir.

Co-fondatrice du site web Hasilux, elle contribue à faire changer le regard sur les personnes autistes et met à disposition une mine d’informations sur l’éducation inclusive au Luxembourg.

«Je ne comprenais pas»

Ses difficultés ont démarré dès la petite enfance et se sont intensifiées au moment de devenir plus autonome.  Si elles ne l’ont pas empêchée de faire de brillantes études – un bachelor en Sciences de l’éducation à l’Université du Luxembourg – elles ont entravé son entrée dans la vie active.

«J’avais donné des cours particuliers et j’adorais ça. Je voulais vraiment être institutrice. Mais au moment d’effectuer mes premiers stages, tous mes espoirs se sont effondrés. Je ne comprenais pas pourquoi ça ne fonctionnait pas.»

Impossible d’être face à une classe

Trop de stimuli sensoriels, d’interactions, d’imprévus : Joanne doit se rendre à l’évidence, elle est incapable d’enseigner face à une classe. «Je l’ai vécu comme une immense défaite. J’étais en détresse, j’ai dû prendre une longue pause.»

Elle ne lâche rien et, soutenue par ses proches, décide de boucler son bachelor, tandis qu’elle prend contact avec la Fondation Autisme.

À 26 ans, en recevant son diagnostic, elle peine à y croire : «Je pensais qu’ils s’étaient trompés parce que je ne cumulais pas tous les signes autistiques et que je me débrouillais dans beaucoup de situations.»

Premiers pas en public

Prise en charge, la jeune femme apprend comment mieux gérer les situations les plus problématiques – le supermarché, les voyages, les interactions sociales, les émotions fortes – et parle publiquement de son expérience en témoignant lors de formations.

Les gens m’ont dit qu’avoir ce regard de l’intérieur est utile

Les retours sont nombreux : «Ça m’a fait plaisir de voir que les gens veulent comprendre les personnes autistes. Ils m’ont dit qu’avoir ce regard de l’intérieur est utile, et moi, j’ai retrouvé le plaisir de partager mes connaissances.»

Joanne se lance alors dans la création de vidéos où elle aborde de nombreux aspects de l’autisme.

Des milliers de connaissances compilées

«J’ai ouvert un blog car les mêmes questions revenaient souvent : la façon dont se passe le diagnostic, le choix de parler de son autisme ou pas, la vie d’après, etc. Je souhaitais les diffuser de manière plus efficace.»

Heures silencieuses dans les commerces, droits des personnes avec handicap, Schueberfouer : elle aborde tous les sujets et compile dans des articles les connaissances actuelles sur l’autisme.

Une équipe d’experts engagés

C’est en 2024, lors d’un atelier sur la régulation émotionnelle, qu’elle rencontre d’autres personnes engagées dans l’aide concrète aux personnes autistes et que germe l’idée de réunir toutes les ressources disponibles.

Elle fonde l’association Crunch Box avec un ami et, financés par l’Œuvre Nationale, ils créent la plateforme Hasilux dédiée à l’autisme et l’inclusion scolaire.

«Tous nos contenus sont validés par une équipe multidisciplinaire de professionnels – psychologues, enseignants, éducateurs, parents – et des personnes autistes qui apportent leur expérience pratique.»

Un site en 7 langues et des webinaires

Aujourd’hui étudiante en master en Développement organisationnel et Inclusion à l’Université des sciences appliquées de Neubrandenbourg, Joanne Theisen ambitionne de faire grandir Hasilux en ajoutant de nouveaux contenus.

Des traductions en portugais, espagnol, arabe et ukrainien sont aussi prévues en plus du français, de l’anglais et de l’allemand déjà disponibles.

«On organise également des webinaires pour informer le public comme les professionnels et faciliter les échanges avec les experts et les personnes concernées». Les prochaines dates figurent sur le site.