Accueil | A la Une | Serge Petro, président de la FLPS : «La pêche est boycottée»

Serge Petro, président de la FLPS : «La pêche est boycottée»


Les pêcheurs sportifs ont un équipement imposant composé de cannes à pêche, mais aussi de pontons amovibles, de filets, de seaux et de montures adaptées aux conditions. (Photo : archives lq)

La pêche n’est pas qu’un passe-temps de pensionnés voulant échapper à leurs épouses. C’est un sport à part entière avec ses différentes techniques et qui permet de protéger la nature.

Un asticot qui frétille au bout d’un hameçon à l’idée de se faire croquer par un poisson. L’image est sympathique, mais ne correspond plus du tout à la réalité des pêcheurs et surtout pas à celle des pêcheurs sportifs pour qui une bonne prise est tout un art.

De quoi discutent les pêcheurs sportifs entre eux? Du grammage des lestes, de la composition quasi-scientifique des appâts, de la longueur des lignes ou de montures et de techniques de pêche dans l’espoir de réitérer l’exploit de Frank Meis qui, en 2010, a décroché un titre de champion du monde de pêche sportive ou d’obtenir le titre par équipe, comme en 1955, 1977 et 1984. L’espoir fait vivre, mais les vrais mordus se font rares. Et la relève aussi. La pêche ne prend pas l’eau pour autant. Des concours et des championnats sont organisés presque tous les week-ends en saison et la Fédération luxembourgeoise des pêcheurs sportifs (FLPS) défend assidûment cette pratique face aux obstacles qui la guettent.

«J’espère que l’avenir de la pêche sportive au Luxembourg sera prospère, mais il dépend de la jeunesse. Sans relève, nous n’avons pas d’avenir. Il appartient aux pêcheurs d’aujourd’hui de donner envie de pratiquer ce sport aux futures générations de pêcheurs», note Serge Petro, le président de la FLPS. «Nous avons eu quelques jeunes champions, comme Maik Raach actuellement. Malheureusement, ce sont des cas isolés qui n’ont pas d’équipe pour les accompagner aux championnats internationaux. Il nage seul. C’est dommage. Après lui, il n’y a plus personne.»

Le prix onéreux du matériel nécessaire à tout bon pêcheur rebute plus d’un jeune amateur. «À partir d’un certain niveau, il faut bien s’équiper. C’est un investissement», explique Serge Petro. «Un jeune n’en a pas nécessairement besoin au début, mais cela peut faire peur aux parents.» De même que le temps de préparation du matériel pour les concours et les compétitions qui ont lieu en matinée. «Nos membres sont trop vieux pour ramener un titre», regrette le président et, malgré les efforts pour les attirer, les jeunes ne mordent pas à l’hameçon.

«Des bâtons dans les roues»

Un autre frein à la pratique de la pêche sportive et au recrutement de nouveaux éléments est l’accès aux berges. «C’est sans doute le pire. On nous met des bâtons dans les roues», estime Serge Petro. «Il y a des années, nous avions demandé à pouvoir marquer les emplacements de pêche. 317 au total le long de la Moselle. Il n’y a pas d’emplacements de stationnement, de plus en plus de nouvelles constructions, des pistes cyclables à traverser pour déposer nos équipements sur des emplacements qui ne sont plus nettoyés, les berges sont accidentées… Nous sommes constamment en train de nous battre pour régler des problèmes que nous n’avions pas avant. J’ai l’impression que la politique est contre la pêche.» Ou qu’elle est mise de côté, voire carrément oubliée. «On nous promet beaucoup, mais on attend toujours des résultats.»

«La pêche est boycottée par rapport à d’autres sports», affirme-t-il. «Nous pouvons recruter autant que nous voulons, mais si les infrastructures manquent, cela ne sert à rien. Nous avons proposé d’installer 25 pontons le long des berges à Bech-Kleinmacher pour permettre aux pêcheurs handicapés ou âgés et aux jeunes d’avoir un meilleur accès à l’eau.» Et pourquoi pas attirer des touristes amateurs de pêche? «Ce genre de propositions devraient être encouragées.»

Ces personnes se rabattent souvent sur les étangs à truites – plus assez nombreux – et le carpodrôme où l’accès à l’eau est mieux aménagé et facilité. «Il y a des emplacements de stationnement, aucun obstacle au transport du matériel, des pontons, le calme, pas de cyclistes… Cependant, les pêcheurs qui y pêchent exclusivement n’apprennent plus d’autres techniques de pêche en eau vive. C’est une question de point de vue», commente le président.

Serge Petro : «La fédération souhaite que beaucoup de gens puissent pêcher encore longtemps». Photo : hervé montaigu

Aucune maltraitance

La pêche est un sport complexe et varié consistant en différentes techniques et approches pour attraper du poisson. Un être vivant traité avec respect et grand soin par les pêcheurs. Lors des concours, les prises doivent être remises à l’eau après la pesée. «Nous utilisons des hameçons de moins de deux millimètres sans crochets. C’est sans douleur. Nous ne maltraitons pas les poissons», souligne Serge Petro. «Les poissons doivent être manipulés à mains nues et humides pour ne pas abîmer leur couche de mucus protectrice contre les parasites… La pollution causée par les bateaux qui circulent sur la Moselle fait plus de mal aux poissons que les pêcheurs.»

Seuls 2 à 3 % des poissons pêchés meurent. «Les poissons sont mangés par de plus gros poissons, par les hérons ou par les cormorans. Le cycle naturel est respecté.» Le cormoran serait davantage un ennemi des poissons que les pêcheurs, selon notre interlocuteur. «Ils mangent entre 500 et 750 grammes de poisson par jour. Faites le calcul! Des mesures devraient être mises en place pour réduire les populations, mais nous dépendons de réglementations européennes. La FLPS a les mains liées.»

La pêche est également un sport de pleine nature dont l’environnement doit lui aussi être respecté. «Si les eaux sont polluées, il n’y aura plus de bonnes pêches. Les clubs et les pêcheurs ont été invités à signaler les pollutions des cours d’eau et à veiller à ce que les berges restent propres après leur passage», explique Serge Petro. «Nous travaillons avec l’administration de la Gestion de l’eau dans une cellule destinée à la protection de la faune et de la flore au sein de la fédération.»

Les pêcheurs, qui passent leurs week-ends au bord de l’eau, apportent également leur pierre à l’édifice en ce qui concerne la protection de la nature. Ils savent la lire et la décrypter. Le président de la FLPS regrette que leur importance et leur utilité soient sous-estimées. «Nous ne voulons pas tout obtenir du jour au lendemain. Nous serions déjà contents de pouvoir obtenir des améliorations de la part des pouvoirs publics plutôt que nos sollicitations soient classées horizontalement. La fédération souhaite que beaucoup de gens puissent pêcher encore longtemps.»

PUBLIER UN COMMENTAIRE

*

Votre adresse email ne sera pas publiée. Vos données sont recueillies conformément à la législation en vigueur sur la Protection des données personnelles. Pour en savoir sur notre politique de protection des données personnelles, cliquez-ici.