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Sept choses à savoir sur le gigantesque rassemblement de gens du voyage en Moselle


L’ancienne base militaire de Grostenquin vue du ciel : entre 30 000 et 40 000 personnes sont attendues d’ici dimanche. (Photo Jean Bor)

A partir du lundi 28 août, la base aérienne de Grostenquin, en Moselle, réquisitionnée par l’État à l’armée, accueillera des gens du voyage dans le cadre du grand rassemblement évangélique tsigane qui se tiendra du 3 au 10 septembre. Tour d’horizon des questions les plus fréquentes.

Pourquoi un tel rassemblement de gens du voyage ?

30 000 à 40 000 tsiganes sont annoncés durant le rassemblement qui durera du 3 au 10 septembre. Celui-ci est l’aboutissement de plusieurs missions d’évangélisation débutées au printemps. « Dans chacun des 95 départements français, des pasteurs organisent l’été des rassemblements sous chapiteau, accompagnés de 50 à 200 caravanes », détaille le pasteur Joseph Charpentier, organisateur de la manifestation.

Fin août, toutes ces caravanes convergent vers le lieu du grand rassemblement évangélique. « C’est une manifestation religieuse et j’appuie bien sur ce point. Il ne s’agit pas d’une réunion de tsiganes. Les pèlerins viennent dans un but précis. Ecouter la parole de Dieu et prier. Il s’agit de partager des moments de joie et de réjouissances spirituelles. » Durant le rassemblement, une journée sera consacrée aux baptêmes. Des cérémonies chantantes durant lesquelles les adultes sont entièrement plongés dans l’eau.

Pourquoi le rassemblement a-t-il lieu à Grostenquin ?

C’est la question qui est fréquemment revenue ces dernières semaines. Pourquoi Grostenquin alors que l’association Vie et Lumière possède un terrain à Nevoy dans le Loiret ? Tout simplement parce que celui-ci est désormais trop petit pour accueillir autant de monde.

Pour rappel, plus de 6 000 caravanes sont annoncées. Soit entre 30 000 et 40 000 tsiganes. En décembre 2022, le pasteur Joseph Charpentier, organisateur de la manifestation, a donc sollicité l’État pour trouver un lieu plus approprié à l’événement.

Or, « les bases aériennes de l’Otan se prêtent, en général, très bien à un tel rassemblement. Il y a de l’espace et des pistes goudronnées qui permettent aux caravanes, en cas de pluie, de circuler facilement ».

Le site de Grostenquin n’a pour autant jamais été spécifiquement demandé dans les échanges entre l’association Vie et Lumière et le gouvernement. « J’ai juste demandé un terrain. Peu importe la région, le département, la ville… Quel que soit l’endroit, j’aurais accepté », affirme le pasteur. « A Nevoy, nous disposons de 130 hectares. Grostenquin, c’est 250 hectares… ».

De son côté, le préfet de la Moselle, Laurent Touvet, l’a reconnu devant les maires de Moselle-Est qui lui demandaient de s’expliquer sur le choix du gouvernement : « C’est la base de Grostenquin qui représente le moins d’inconvénients parmi les différentes solutions qui ont été étudiées ».

Pourquoi les maires se sont-ils opposés au rassemblement ?

C’est la quatrième fois que le rassemblement évangélique des tsiganes a lieu à Grostenquin, après 2006, 2015 et 2017. Des éditions qui avaient engendré bon nombre de désagréments pour la population des villes et villages environnants. « Troubles à la sécurité, à la salubrité et à la tranquillité publique, ainsi qu’à des dégâts environnementaux importants » avaient été évoqués.

Les élus ont notamment pointé du doigt les très nombreuses déjections humaines qui ont « miné » leurs territoires après le passage des gens du voyage. Sans compter les difficultés à circuler, pendant la durée du rassemblement, au sein de leurs communes qui ne comptent que quelques centaines d’habitants en temps normal. Mais aussi les jours précédents l’ouverture de la base, les caravanes s’installant anarchiquement sur le moindre espace disponible pour être au plus près du site au moment de l’ouverture des portes.

En 2017, suite à la fronde des élus et les nuisances constatées, Édouard Philippe, alors Premier ministre, s’était fendu d’un courrier dans lequel il s’engageait à ce que le site Est-mosellan ne soit plus retenu pour les rassemblements à venir. Il l’avait également confirmé en séance publique du Sénat le 7 février 2018. Une promesse qui n’aura pas tenu dans la durée.

Quid des années futures ?

L’inquiétude est réelle. Les élus n’ont cessé de le répéter ces dernières semaines. Le risque de voir ce rassemblement se pérenniser à Grostenquin les années suivantes est dans tous les esprits. Le terrain du Loiret étant trop petit, le site de Grostenquin étant celui « qui représente le moins d’inconvénients » dixit le préfet, tout porte à croire que la Moselle-Est pourrait à nouveau être amenée à accueillir les gens du voyage lors des prochaines manifestations. Là encore, la réponse du préfet, interrogé à ce sujet par les élus, n’a pas été celle espérée : « Quid des années futures ? Je n’en sais rien ».

Qui paie quoi ?

Difficile de savoir du côté de l’Etat ce qui reste à la charge du contribuable…  La question a pourtant été posée au préfet par Alexandre Loubet, député RN. « L’organisation d’un marché de Noël dans une ville coûte aussi à la collectivité », avait rétorqué Laurent Touvet sans avancer toutefois une somme…

Ce qu’on peut énumérer par contre, c’est ce que l’association Vie et Lumière prend à sa charge, à savoir « une grande partie des coûts » selon l’organisateur de l’événement.

La consommation d’eau, d’électricité, le ramassage et le traitement des ordures ménagères, l’installation et l’entretien de 120 toilettes mobiles sur la base, la pose de grumes afin de sécuriser la circulation… En 2017, le pasteur évoquait une fourchette de 150 000 à 200 000€. « Mais ce qu’il faut dire aussi, c’est que nous faisons marcher l’économie locale le temps du rassemblement », argue le pasteur.

Zoom sur le dispositif mis en place par l’Etat

A événement exceptionnel, mesures exceptionnelles ! Face à la fronde des élus et de la population, la préfecture de la Moselle a déployé les gros moyens pour faire en sorte que le rassemblement se déroule « le moins mal possible » dixit Laurent Touvet.

Le problème des déjections humaines : « Le premier point d’attention, c’est l’hygiène, la salubrité, face à un comportement que nous avons du mal à comprendre », a souligné le préfet lors d’une réunion (houleuse) avec les maires et parlementaires du territoire le 16 août dernier.

L’association s’est engagée à mettre à disposition des maires une équipe de trente hommes, chargée de ramasser les détritus. 120 toilettes mobiles sont installées sur la base le temps du rassemblement.

La sécurité routière : La D79, route principale qui permet de rejoindre la base, est limitée à 70 km/h durant le rassemblement, avec la mise en place d’un radar de chantier. La crainte des autorités est de voir sur cette longue ligne droite « des rodéos ou tentatives de circulation imprudente ».

700 infractions routières avaient été relevées lors du dernier rassemblement. « Mais ce n’était pas uniquement des gens du voyage qui avaient été verbalisés », a rappelé le général Marc Payrar, à la tête du groupement de gendarmerie départementale de la Moselle. Beaucoup d’habitants du secteur avaient eux aussi été flashés…

300 gendarmes mobiles déployés : Les forces de l’ordre sont déjà mobilisées sur le site et dans ses environs sur un rayon de 25 km. Outre les gendarmes du territoire et les renforts de réservistes, « nous avons le concours de la police nationale, ainsi que des renforts de motocyclistes de la police d’autres départements et des unités de forces mobiles », a souligné Laurent Touvet.

Soit 300 hommes environ pour les unités de forces mobiles. Mais en tout, ce seront plus de 400 personnels qui seront déployés chaque jour. Pour la durée de l’événement, la brigade de gendarmerie de Grostenquin rouvre à nouveau ses portes au public.

Un centre de secours tenu par une douzaine de sapeurs-pompiers est également prévu sur la base 24 heures sur 24.

Chaque jour, vers 17 h, se tiendra une réunion entre les services de la préfecture, les gendarmes et les pompiers, sur le site. Les maires les plus proches de la base aérienne sont également invités à y participer.

Pourquoi la zone Natura 2000 se retrouve au centre des préoccupations  ?

La base aérienne de Grostenquin se situe au cœur d’une zone protégée classée Natura 2000. Un territoire de  2 481 hectares qui accueille un patrimoine naturel exceptionnel, tant au titre de la directive «  Oiseaux » qu’au titre de la présence d’autres espèces de faune et de flore. Or, les précédents rassemblements avaient « été à l’origine d’atteintes graves à ce site Natura 2000 », selon les associations de protections de l’environnement.

Pour cette édition, 11,5 km de barrières ont été installées afin de limiter l’accès aux gens du voyage à la zone préservée. Une mesure qui ne rassure pas pour autant les associations environnementales. Car en 2017 déjà, ces mêmes barrières avaient été installées par l’État tout autour du site de Grostenquin, pour protéger la plaine du Bischwald. Mais face à une population aussi dense, elles n’avaient pas tenu bien longtemps… « Il s’agissait de simples barrières de chantier, glissées dans des blocs en béton. »

Vu le nombre d’excréments retrouvés de l’autre côté du grillage, celui-ci n’a freiné personne… », désespère Norbert Veber, président de l’Aise (Association intercommunale de sauvegarde de l’environnement). Cette fois-ci, le préfet de la Moselle l’a assuré : « Il y aura une surveillance renforcée des milieux aquatiques, des espaces boisés, des prairies sensibles, des parcelles agricoles et des parcelles desservies par les chemins ruraux » avec la présence de patrouilles « jour et nuit ».

Comment se prémunir du démarchage agressif ?

Le sujet a été soulevé par les maires, lors de leur rencontre avec le préfet. Dans les villages, le porte à porte a déjà débuté depuis la mi-août. Certaines personnes âgées en auraient déjà fait les frais.

Pour lutter contre ce démarchage à domicile, un arrêté préfectoral a été pris afin de l’interdire, du 24 août au 17 septembre inclus, et ce, dans toutes les communes des cantons de Sarralbe, de Saint-Avold, du Saulnois, de Freyming-Merlebach et de Faulquemont.

Si vous faites face à un démarchage agressif, appelez le 17 ou rapprochez-vous du maire de votre commune.