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Rosetta s’est écrasée sur la comète Tchouri


Alors qu'elle se trouvait à 720 millions de kilomètres de la Terre, Rosetta s'était placée jeudi soir sur une trajectoire la menant en collision avec la comète. (image ESA)

La sonde Rosetta s’est écrasée volontairement vendredi sur la comète Tchouri, signant la fin d’une odyssée spatiale européenne historique de plus de douze ans pour tenter de percer les mystères de la formation du système solaire.

La fin de la mission a été annoncée sous les applaudissements par Sylvain Lodiot, responsable des opérations de vol de Rosetta au Centre européen d’opérations spatiales (ESOC) à Darmstadt (Allemagne) qui contrôle la sonde. « C’est la fin de la mission », a-t-il dit, avec émotion. « C’est fait. Je peux confirmer le plein succès de la descente historique de Rosetta », a ajouté Patrick Martin, le responsable de la mission.

« Adieu Rosetta, tu as bien fait ton travail », a-t-il lancé. « Merci Rosetta. Bien joué », a tweeté Jan Wörner, le directeur général de l’ESA. La sonde, elle-même, a envoyé via Twitter une dernière image alors qu’elle ne se trouvait plus qu’à 51 mètres de la surface de la comète. « Mes amitiés depuis 67P », écrit-elle sur son compte animé par l’ESA. Une photo un peu floue qui montre l’endroit où elle repose désormais.

L’ESOC a déclaré la mission officiellement terminée à 13h19 après avoir constaté la perte du signal de Rosetta au moment de l’impact contrôlé. Alors qu’elle se trouvait à 720 millions de kilomètres de la Terre, Rosetta s’était placée jeudi soir sur une trajectoire la menant en collision avec la comète.

Sa lente descente, à la vitesse d’un marcheur, a duré 14 heures. Décidée en 1993 par l’Agence spatiale européenne (ESA), la mission est auréolée de plusieurs succès: Rosetta est la première sonde à avoir escorté une comète dans sa course, pendant plus de deux ans. Elle a récolté une abondante moisson de données qui occuperont les scientifiques « pendant des décennies », selon l’ESA.

Son petit robot-laboratoire Philae a réalisé le 12 novembre 2014 une première historique en se posant sur un de ces petits corps qui sont parmi les plus primitifs du système solaire. La mission Rosetta vise à mieux comprendre la formation du système solaire. Les comètes sont apparues il y a 4,5 milliards d’années et sont en quelque sorte restées dans le « congélateur » de l’espace pendant quasiment tout ce temps. Ce qui en fait des témoins d’exception.

« La recherche continue »

Lancée en mars 2004, Rosetta, qui a parcouru 7,9 milliards de kilomètres, escortait depuis août 2014 la comète Tchourioumov-Guérassimenko. Dotée de grands panneaux solaires, la sonde commençait à manquer de puissance. L’ESA a donc choisi de mettre fin à la mission pendant qu’elle contrôlait encore la sonde et que celle-ci avait encore assez de puissance pour travailler. « Nous voulions une fin propre », a expliqué Paolo Ferri, chef des opérations de missions à l’ESA.

Rosetta n’avait pas été conçue pour atterrir. Mais les ingénieurs de l’Agence spatiale européenne ont fait leur possible pour que l’impact contrôlé de la sonde sur la comète soit le plus « soft » possible. La sonde avait été programmée pour s’éteindre dès qu’elle entrerait en contact avec la surface du noyau cométaire. La sonde a continué à travailler jusqu’au bout, la plupart de ses instruments étant allumés.

Rosetta a pris des images de très près de la comète. Elle a « sniffé » autant que possible les gaz qui l’entourent et analysé les poussières. « C’est la fin de la sonde mais la recherche scientifique continue », a déclaré Matt Taylor, responsable scientifique de la mission Rosetta. L’impact de Rosetta a eu lieu sur une zone qui comporte des « puits », sortes de dépressions circulaires larges et profondes, d’où s’échappent parfois des jets de gaz et de poussières.

« Nous espérons voir sur les flancs de ces puits des structures qui pourraient remonter à la période pendant laquelle la comète s’est formée et qui nous donneraient des indications sur l’évolution primordiale du système solaire », a expliqué Jean-Pierre Bibring, responsable scientifique en charge de Philae.

Les scientifiques s’interrogent sur le rôle que les comètes ont pu jouer dans l’apparition de la vie sur Terre. La sonde a découvert que l’eau de 67P ne ressemblait en rien à celle de la Terre: cette famille de comètes n’a donc pas contribué à l’apport d’eau sur notre planète, comme le supposaient les scientifiques. Elle a en revanche identifié des molécules organiques nécessaires à l’apparition de la vie, notamment des acides aminés, qui pourraient avoir participé à « l’ensemencement » de nos océans.

Tout comme la pierre de Rosette, qui a donné son nom à la mission, « a marqué un tournant dans notre compréhension des hiéroglyphes et de l’histoire antique, le vaste trésor que constituent les données envoyées par Rosetta révolutionne notre vision du processus de formation des comètes et du système solaire », a estimé Matt Taylor.

« La comète n’a pas encore livré tous ses secrets et les archives extraordinaires dont nous disposons à présent nous réservent sans aucun doute bien des surprises », a-t-il ajouté.

Le Quotidien / AFP