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Réforme des pensions : place aux négociations tripartites


La ministre Martine Deprez reconnaît des manquements dans la communication sur les plans de réforme du gouvernement.

La ministre Martine Deprez se dit à son tour ouverte à une remise à plat du débat sur l’avenir du système des pensions. L’objectif serait de «ficeler un package», en concertation avec les syndicats et le patronat.

En charge des travaux pour pérenniser le système des pensions, la ministre de la Sécurité sociale, Martine Deprez, affirme avoir entendu le message envoyé samedi dernier par les 25 000 manifestants (14 000 selon la police) qui ont défilé dans les rues de la capitale.

À l’image du Premier ministre, Luc Frieden, elle se dit désormais disposée à engager des négociations avec les partenaires sociaux. L’objectif est de «débloquer le dialogue social», comme elle l’a souligné, hier, devant les députés, venus prendre connaissance du rapport final sur le processus de consultation «Schwätz mat».

La proposition du gouvernement de prolonger la durée de cotisation avant de pouvoir prendre sa retraite (trois mois par an), afin de rapprocher progressivement l’âge de départ réel (en moyenne 60 ans) de l’âge de départ légal (qui restera fixé à 65 ans), ne sera pas retirée dans l’immédiat.

«Nous avons pensé qu’il s’agit de la solution la plus équilibrée, sachant que les Luxembourgeois sont dans l’UE ceux qui partent le plus tôt à la retraite», avait expliqué Luc Frieden, samedi soir, sur le plateau de RTL. Hier, Martine Deprez a dû admettre que les annonces faites lors de la déclaration sur l’état de la Nation «ne sont pas passées (auprès du public), comme elles l’auraient dû».

Le camp syndical est vent debout contre la piste avancée par le chef du gouvernement. OGBL et LCGB réclament qu’une véritable négociation soit enfin menée, en format tripartite, sur le document de 130 pages que la nouvelle Union des syndicats a rédigé, et qui comprend entre six et huit propositions de réforme alternatives.

Le Premier ministre a signalé samedi être «prêt à discuter de l’ensemble des pistes qui seront mises sur la table» par les partenaires sociaux.

Quel a donc été l’apport de la large consultation sur la viabilité à long terme de notre système de pension, lancée en octobre dernier? Même s’il ne s’agit pas d’un sondage ou d’un échantillon représentatif, il est intéressant de noter que la prolongation de la durée de cotisation ne figure pas parmi les positions convergentes. Par contre, les 800 personnes qui ont joué le jeu veulent maintenir le régime commun comme «colonne vertébrale» du système. 

Une autre revendication est le renforcement de la lutte contre la pauvreté des personnes âgées. Les autres points retenus sont une entrée en pension plus flexible, et plus de souplesse pour reconnaître des réalités de vie différentes et des carrières non linéaires.

La retraite progressive se trouve sur la table

La possible hausse progressive des années de cotisation a monopolisé l’attention depuis la mi-mai. Le Premier ministre a pourtant mis sur la table d’autres pistes, qui correspondent aux résultats du processus de consultation : introduction de la retraite progressive et une prise en compte plus flexible des années d’études.

En termes de lutte contre la précarité des pensionnés, la piste retenue est l’introduction d’une aide sociale ciblée. «Et pour celles et ceux qui ont la possibilité d’épargner, nous rendrons les retraites privées (…) plus attractives, afin de les encourager à se constituer une réserve pour les périodes difficiles», a complété Luc Frieden devant la Chambre des députés.

Les positions des syndicats et du patronat sur ces différents points et propositions risquent de fortement diverger. Selon Martine Deprez, l’Inspection générale de la sécurité sociale (IGSS) a préparé une soixantaine de scénarios sur l’apport de différentes mesures.

Ni une augmentation des années de cotisation, ni une hausse des cotisations – comme réclamé par le camp syndical – ne permettrait de pérenniser à plus long terme le système des pensions.

Le gouvernement compte attendre l’issue des discussions et négociations à venir en format tripartite avant d’arrêter une nouvelle position. La ministre de tutelle s’engage à «ficeler un package» qui pourra être supporté par les syndicats (OGBL, LCGB et CGFP) et par le camp patronal (UEL).

Le dépôt d’un avant-projet de loi est attendu au plus tôt après les vacances d’été.

«Ne rien faire, n’est pas une option»

Le Premier ministre et la ministre de la Sécurité sociale martèlent depuis des mois que des correctifs sont nécessaires pour garder viable le système des pensions. «Ne rien faire, n’est pas une option», a encore rappelé, hier, Martine Deprez.

Selon les dernières prévisions de l’IGSS, l’assurance-pension présenterait un déficit de 100 millions d’euros en 2026. Le déséquilibre financier pourrait grimper à 300 millions d’euros en 2027. Sans intervention, les réserves – qui se chiffrent actuellement à quelque 30 milliards d’euros – seraient épuisées dans les années 2040.

En attendant une réforme en profondeur, les mécanismes ancrés dans la réforme des pensions de 2012 pourraient rapidement devenir réalité. En cas de déficit du système, il est notamment prévu de renoncer au réajustement des pensions à l’évolution des salaires.