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Querelle de voisinage : une octogénaire et son fils accusés de harceler leurs voisins


Marie est même allée jusqu’à mordre un policier. «Elle m’a dit qu’elle ne savait pas comment ses doigts étaient arrivés dans sa bouche», précise l’expert. (photo archives LQ)

Une octogénaire a déclaré la guerre à ses voisins. Marie, qui a embrigadé son fils de 55 ans, souffre entre autres d’une paranoïa qui la pousse à les agresser dès qu’elle les croise.

Marie, 89 ans, est persuadée qu’un arbre situé sur le terrain de ses voisins va faire crouler sa maison et doit être abattu. Elle n’en démord pas. «Elle s’est mis en tête que ses voisins en veulent à sa maison avec la complicité de la police locale», explique l’expert neuropsychiatre qui a diagnostiqué une paranoïa et un début de démence. L’octogénaire est accusée d’avoir mis en place tout un système de surveillance de ses voisins et de la rue avec la complicité de Claude, son fils âgé de 55 ans.

«Il reconnaît ne pas toujours répondre aux demandes de sa mère, notamment de prendre des photographies, mais il a peur qu’elle ne lui adresse plus la parole pendant une semaine s’il ne s’exécute pas», témoigne l’expert judiciaire. «Marie est un peu le moteur de l’affaire. Elle est parfaitement charmante tant qu’on n’évoque pas les deux familles voisines. Elle devient alors méfiante et amère.» Et s’emporte.

Marie est même allée jusqu’à mordre un policier. «Elle m’a dit qu’elle ne savait pas comment ses doigts étaient arrivés dans sa bouche», précise l’expert. Ce jour-là, elle avait croisé ses voisins dans un supermarché et aurait commencé à les insulter vertement au point que la police avait dû être appelée pour apaiser les esprits.

L’expert a conclu à «une altération grave de ses capacités de jugement» et à «une altération des capacités de jugement» de son fils qui présente «un trouble autistique léger». «Il est isolé et reconnaît ne pas parvenir à résister à sa mère.»

Un procureur sceptique

Les deux prévenus étaient représentés par leur avocat. Ils sont notamment accusés de rébellion, de harcèlement obsessionnel, de calomnie, d’injure et de destruction de propriétés ou d’objets mobiliers. Une clôture cisaillée. Les différentes parties sont restées relativement discrètes sur les agissements de la mère et de son fils, lundi après-midi.

Des agissements qu’un séjour de deux semaines en détention préventive n’ont pas suffi à calmer, selon les avocats des parties civiles. «Mes clients restent entre leurs quatre murs», précise un des avocats, ajoutant qu’ils ne jouissent plus de leur jardin pour éviter d’attiser le courroux de l’octogénaire qui les accuse de tous les maux. Entre autres, de faits dont elle se rend elle-même coupable, a précisé l’expert judiciaire.

«Il n’y a aucun indice d’apaisement et mes clients craignent que cela ne finisse jamais», note le deuxième avocat de la partie civile. Le procureur est, lui aussi, sceptique. «Je ne pense pas que le jugement prononcé par votre tribunal sera la solution idéale», a-t-il avancé face à la 7e chambre correctionnelle du tribunal d’arrondissement de Luxembourg, espérant que se sentant mis sous pression par la justice, le duo se calme, voir se sente encouragé à déménager.

Discernement altéré

Le magistrat a requis une peine de 18 mois de prison assortie du sursis probatoire à l’encontre de la mère et de son fils. Le sursis probatoire devra s’accompagner d’une interdiction d’entrer en contact avec les voisins ainsi que d’un suivi psychologique et psychiatrique. Le procureur y voit une piste pour ramener l’octogénaire à la raison et à apaiser son fils grâce à l’intervention des services sociaux qui encadrent ce type de suivi.

Il a également conclu que l’article 71.1 du code pénal devait être retenu. Cet article prévoit des circonstances atténuantes pour les prévenus, qui demeurent punissables, mais qui étaient atteints, au moment des faits, de troubles mentaux ayant altéré leurs discernements ou entravé le contrôle de leurs actes.

De quoi satisfaire l’avocat des deux prévenus qui a plaidé en faveur d’un sursis simple ou probatoire après s’être rallié à l’opinion du magistrat concernant l’utilité d’un jugement étant donné «la dynamique spéciale entre le fils et sa mère» que l’expert psychiatre a qualifiée de «symbiotique». En outre, Marie refuserait d’admettre qu’elle souffre d’un trouble psychique, ce qui rend tout traitement ou thérapie inopérante.

Le prononcé est fixé au 7 décembre.