À l’occasion de son congrès annuel, dimanche, la Fédération luxembourgeoise des pêcheurs sportifs (FLPS) a une nouvelle fois tiré la sonnette d’alarme sur l’état des eaux de surface. Elle réclame une surveillance scientifique.
Jos Scheuer, le président de la FLPS, a eu la dent dure pour parler de l’état des eaux de surface : «J’ai dit et ça a été confirmé par tous les orateurs que la pollution des cours d’eau est réelle. Pour nous, elle vient d’un manque de stations d’épuration. Elles ne réussissent pas à éliminer toutes les substances polluantes modernes, comme les résidus de médicaments ou les nanoparticules. Normalement, il devrait y avoir un certain nombre de stations en fonction du nombre d’habitants et du nombre d’industriels.Le problème, c’est que la croissance de la population est supérieure à la capacité des stations d’épuration. Il faut les moderniser, les améliorer. C’est ça que nous demandons.»
Il va plus loin en exigeant que l’État effectue «un monitoring pour connaître l’état de santé de la faune et la flore aquatiques. Cela nous permettrait de savoir ce qui se passe sous l’eau d’un point de vue scientifique […] dans toutes les eaux de superficie, ruisseaux ou rivières qui forment les frontières…»
Les pêcheurs se donnent pour rôle de surveiller la qualité de l’eau, une mission qui leur tient à cœur. Ils transmettent leurs informations et statistiques au ministère de l’Environnement, car ils sont en première ligne pour constater la santé de ceux qui peuplent les cours d’eau.
«Nous ne sommes pas du tout satisfaits que la ministre (NDLR : Carole Dieschbourg) ne soit pas présente pour notre congrès. Elle s’est fait représenter par des fonctionnaires d’État», a d’ailleurs lancé Jos Scheuer.
«À jour entre 2022 et 2027»
Du côté des fonctionnaires présents au congrès, Nora Welschbillig et Carole Molitor, de l’administration de la Gestion de l’eau, on est bien conscient qu’il y a du retard à rattraper au niveau des stations d’épuration. Le pays avait d’ailleurs été condamné fin 2013 pour «traitement insatisfaisant des eaux urbaines résiduaires», notamment dans la capitale par la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE).
Depuis, toutes les stations d’épuration des grandes villes ont été mises en conformité, assurent les fonctionnaires. Dans les plus petites villes et dans les villages, des constructions ou modernisations des équipements sont en cours ou en projet à travers tout le pays. Tant et si bien que les entreprises ont du mal à suivre et qu’il faudra être patient. «On devrait être à jour dans les années 2020, entre 2022 et 2027», indiquent les spécialistes de l’eau avec prudence.
Un mode de vie qui pose problème
«On ne s’y est pas mis assez tôt», reconnaissent les fonctionnaires qui expliquent que cela relève de la compétence des communes et que les projets de station n’étaient pas forcément une priorité pour les bourgmestres. À la suite de la condamnation, l’État a baissé progressivement les subsides pour l’eau aux communes qui ne jouaient pas le jeu afin de les inciter à réagir. Ce qu’elles ont fait, notamment en se regroupant en syndicats des eaux.
Mais tous les problèmes ne viennent pas seulement du manque de stations d’épuration, loin de là. Notre mode de vie et les constructions effectuées depuis les années 1950, dans l’après-guerre, n’ont pas aidé la faune aquatique. Certains poissons indigènes sont devenus rares, comme l’ombre commun.
L’eau a besoin de surfaces et la population luxembourgeoise, qui ne cesse de croître, a besoin de terrains pour s’étendre. Les zones urbaines ont remplacé les zones alluviales. Ces lieux situés aux abords des cours d’eau, régulièrement inondés, ont des courants faibles et une végétation dense. Des conditions idéales qui permettent aux poissons de se reproduire et aux petits de survivre. Des travaux de renaturation sont effectués ou vont l’être sur certains petits cours d’eau comme l’Alzette et prochainement la Pétrusse. Pour la Moselle, ce sera plus compliqué.
Audrey Libiez