Depuis le 5 décembre, Putscheid est devenue la seule commune du pays membre du réseau DarkSky International. Elle fait donc «tout pour protéger l’obscurité naturelle», au bénéfice des hommes et des animaux.
Au nord du Luxembourg, la petite commune de Putscheid vient de franchir une étape inédite : devenir la seule commune du pays membre du réseau DarkSky International. Cette association rassemble les territoires les plus engagés du monde pour la protection du ciel nocturne.
Sous l’appellation «Stärepark Pëtschent», Putscheid a été reconnu International Dark Sky Community grâce à un travail mené par le parc naturel de l’Our. «Nous travaillons depuis 2022 sur le dossier», souligne Daniel Gliedner, conseiller en éclairage au sein du parc naturel.
Avec une population de 1 177 habitants, cette commune rurale «avait déjà une politique locale fortement orientée vers la protection de la nature», indique Daniel Gliedner.
Mais pour répondre aux cahiers des charges imposés par l’association américaine, Putscheid a engagé un vaste programme de réduction de la pollution lumineuse. «Il ne s’agit pas d’être le lieu le plus sombre possible, mais de prouver que l’on fait tout pour protéger l’obscurité naturelle», précise-t-il.
De la technique et de la concertation
L’innovation occupe une place centrale dans cette démarche. La commune a mené une étude approfondie à l’aide de drones, complétée par l’installation de capteurs permanents pour surveiller en continu la qualité du ciel. Ces outils offrent, selon Daniel Gliedner, «une vision de long terme indispensable pour comprendre et réduire la pollution lumineuse».
Cette stratégie s’accompagne d’un strict respect des normes d’éclairage, sans les dépasser, contrairement «à de nombreuses communes qui utilisent encore une intensité lumineuse excessive», d’après le conseiller. Tous les luminaires ont été orientés horizontalement afin de limiter toute diffusion vers le ciel.
Une lumière chaude, jaunâtre, a été privilégiée pour réduire l’impact sur les écosystèmes. Enfin, l’intégration de détecteurs de mouvement permet aux lampadaires de ne s’allumer qu’en présence de passants, avec une montée progressive de 0 à 100% en deux secondes, pour ne pas éblouir les automobilistes.
Parallèlement, une importante campagne de sensibilisation a été menée «pour ne pas créer de révolution», plaisante Daniel Gliedner. Même si la décision n’a pas été soumise à un référendum, elle a été faite en concertation avec les résidents via des balades nocturnes par exemple. Les résidents n’ont rien eu à changer, mais les nouvelles constructions devront respecter certaines normes de luminosité.
L’association DarkSky œuvre depuis 1988 à préserver le ciel nocturne. Au début, l’association était un petit groupe d’astronomes et depuis 2001 elle labellise des «International Dark Sky Places», soit des territoires engagés contre la pollution lumineuse avec un éclairage responsable. Depuis la première certification de Flagstaff en Arizona, plus de 250 sites rejoignent déjà ce réseau international.
«Attirer un tourisme doux»
Pour le conseiller, la pollution lumineuse représente un enjeu crucial pour la biodiversité. La majorité des espèces vivent la nuit, avec une estimation à 69% pour les mammifères d’après une étude de l’université d’Exeter, au Royaume-Uni.
Daniel Gliedner illustre que «la majorité des pollinisateurs agissent la nuit. Si nous continuons à suréclairer, nous risquons de perturber gravement la pollinisation dans les années à venir». Il rappelle également que les impacts ne concernent pas que la faune : «Les LED froides utilisées sont riches en bleu. Ces lampes perturbent la mélatonine et affaiblissent surtout nos rétines.»
Pour Putscheid, ce titre marque une reconnaissance, mais surtout un commencement. Même si la certification obtenue est valable dix ans, «un Stärepark n’est pas un aboutissement», selon Daniel Gliedner, «la certification peut nous être retirée».
Soutenue par le parc naturel de l’Our, la commune entend devenir un lieu où le ciel étoilé n’est pas seulement protégé, mais célébré, au service des passionnés : «Nous sommes en contact avec l’Association des amateurs astronomes du Luxembourg (AAL).» Enfin, la commune espère «attirer un tourisme doux» et prévoit entre autres «d’aménager une zone d’observation avec par exemple des repères pour observer l’étoile polaire», conclut le conseiller.
Il existe trois parcs naturels au Grand-Duché : le Mëllerdall, celui de la Haute-Sûre et celui de l’Our. Ces entités sont des syndicats intercommunaux regroupant de quatre à onze communes. Pour Daniel Gliedner, ces derniers servent à mettre «en commun des activités et du personnel spécialisé que les communes ne pourraient pas financer ou assurer seules.»